Algérie

Le bâton pour faire le vide



Le bâton pour faire le vide
En Algérie, c'est la police qui fait la loi. Quasi unique interface avec le citoyen, ce corps non militaire, devant l'absence de décideurs assumés, décide de quelle loi appliquer et comment la mettre à exécution. Hier, des étudiants de différentes filières se sont rassemblés devant l'Assemblée populaire nationale. Ils étaient venus manifester leur refus de la décision du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique d'unifier les cursus du doctorat. Ils ont demandé l'annulation de l'arrêté ministériel n°2016/547 daté du 2 juin 2016, fixant les conditions d'inscription en troisième cycle, pour les diplômés de l'ancien système dit classique.Et ont réclamé l'application du décret exécutif n° 98-254 du 17 août 1998 relatif à la formation doctorale, à la post-graduation spécialisée concernant l'inscription automatique en doctorat aux détenteurs de magistère. En somme, des dizaines de jeunes étudiants sont passés discuter de lois devant l'un des pilier du pouvoir législatif. De loin le plus aisément accessible au citoyens de tout bord, du moins normalement. Devant le désengagement d'une tutelle qui a fini par ériger une chape de plomb au-dessus du monde universitaire, ces étudiants pensaient trouver auprès de leurs représentants plus ou moins bien-élus, des voix qui puissent porter la leur.Mais face à un hémicycle qui refuse de jouer son rôle, par ignorance et surtout par peur, c'est l'homme à la matraque, tout de bleu vêtu qui répond aux diplômés. Et ce dernier ne connaît qu'un seul langage : celui de l'interdiction. Il faut reconnaître à ce corps de police, qu'il est l'un des rare à exécuter vraiment et parfois avec zèle, ce qu'il promet. C'est-à-dire, souvent, matraquer. Sauf qu'il oublie aussi souvent que sa raison d'être est de faire respecter la loi, toute la loi et pas seulement celle qui arrange ses donneurs d'ordres.Plus important que la directive de la wilaya ou celle du commissariat du coin qui interdit le rassemblement devant l'APN, il y a la Constitution, la mère de toutes les lois qui, révisée tout récemment, fait de la manifestation un droit sacré. Sans vouloir ressasser la sempiternelle antienne populaire qui veut que l'Etat algérien utilise la main de velours contre les casseurs et celle de fer face aux élites, il est quand même gravissime que des étudiants pacifiques et pacifistes rassemblés devant leur APN soient tabassés par la police.Pourtant, ces manifestants ont fait preuve d'un geste citoyen qui aurait dû faire plaisir à des décideurs intelligents. Par leur action, ils ont presque réussi à légitimer une institution de l'Etat qui a perdu son lustre depuis presque Naegelen. Mais malheureusement, les décideurs d'aujourd'hui comme ceux de jadis, ne savent gérer qu'en créant le vide et en ratant les bonnes occasions. Un vide par lequel ils sont aujourd'hui absorbés.


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