Algérie

Le baroud d'honneur de Zohra



Le baroud d'honneur de Zohra
Il est des déclarations et des prises de position qui font date dans l'histoire des nations quand elles sont prononcées par des personnalités emblématiques. Le coup de sang de la battante et combattante Zohra Drif contre le projet de révision constitutionnel du pouvoir devrait être inscrit en lettres d'or dans ce registre des hauts faits «d'armes» de la politique algérienne. Beaucoup reprochent à cette grande dame de s'être acoquinée, des années durant, avec un régime foncièrement autoritaire.D'avoir servi d'alibi révolutionnaire à une entreprise de confiscation de la République. C'en était trop pour cette femme courage qui a gagné ses galons dans méandres de La Casbah contre les troupes de Massu. Beaucoup de ses admirateurs abhorrent la caution morale qu'elle accorde à ce régime intrinsèquement négateur de la liberté pour laquelle elle s'est battue. Zohra Drif ne pouvait plus supporter le reniement de son combat noble pour une Algérie libre et heureuse en jouant la VRP du pouvoir.Elle s'est bien lâchée cette fois en disant tout le bien qu'elle pense de ceux qui lui ont offert un strapontin politique pour services rendus par son silence? Sa lettre à Ouyahia s'adresse surtout à Bouteflika en sa qualité de metteur en scène de ce simulacre de consultations politiques où l'on reçoit du tout-venant. Mme Drif a déconstruit un montage constitutionnel de trop qui ferait de l'Algérie une république en sursis. Et cela fait très plaisir de lire son pamphlet politique qui sonne comme un tir contre son camp. Une balle traceuse qui a déchiré l'omerta générale de tous les thuriféraires pour qui le silence est plus «porteur» que la voix.Zohra Drif a choisi de soulager sa conscience bien qu'elle soit jusqu'à preuve du contraire, et à son corps défendant, un élément constitutif du régime, ne serait-ce que par son siège au Sénat. Il n'est jamais trop tard pour se rebeller contre l'ordre (ou le désordre) établi, cela dit.Le réquisitoire de la veuve de Rabah Bitat contre le projet de Bouteflika est à la mesure de son combat et de sa réputation. En convoquant la mémoire du grand Ben M'hidi pour appuyer sa récusation d'une Constitution au rabais, elle aura enlevé la caution révolutionnaire à une volonté de légitimation politique.Zohra Drif écrit que Ben M'hidi aurait décrété cette énième trituration de la Constitution comme un «sacrilège». Qui va donc oser affronter cette dame absolument inattaquable ' Qui pourra lui inventer une bifurcation dans son parcours droit et héroïque de révolutionnaire ' Personne.Le tir «ami» de Zohra Drif a gâché la fête de la famille, alors que s'ouvrait hier celle de l'opposition aux couleurs chatoyantes. Sûr que le régime ne pourra pas se mettre à dos Zohra après avoir perdu Djamila. Il affichera profil bas le temps, espère-t-il, que l'écorchure de la moudjahida se cicatrise. Mais il y a des mots qui blessent plus que les balles.




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