Algérie

Le 3 juillet 1962, c'était la folie à Rocher-Noir



Le 3 juillet 1962, au matin, l'exécutif du GPRA installé à Rocher-Noir (Boumerdès) avait, lors d'une cérémonie officielle en présence des généraux des forces armées de l'ennemi, repris, à l'issue d'une guerre qui a duré 7 ans, 5 mois et 19 jours, le territoire délimité par les accords d'Evian et la souveraineté du peuple algérien sur ce territoire.L'indépendance de l'Algérie est officialisée et devenait effective en présence d'une foule immense en folie. Récit d'un témoin qui était au premier rang de cette cérémonie. Il s'agit de Hachemi Ahmed né le 8 juillet 1942 dans la commune de Thénia, ex-Ménerville ou Tizi-Naït Icha dans le centre de la wilaya de Boumerdès. Il pense qu'il a créé le premier groupe de scouts en Algérie juste avant l'indépendance. Ahmed nous a montré la carte du FLN alors qu'il était secrétaire national chargé de la culture de l'ère du parti unique. Ce qui donne du poids à son récit.
Il nous a affirmé que le groupe de scouts de Ménerville a été créé exactement le 18 mars 1962 dans la perspective de mener des festivités dans le cadre de la proclamation de l'indépendance de l'Algérie.
Les scouts de Ménerville. Certains ont été choisis pour la cérémonie.
Ahmed entre dans le vif du sujet. «Pendant 5 mois, nous avons répété et travaillé durement pour apprendre tous les (anachids) chants patriotiques et Kassamen. Nous écoutions à la radio Messaoudi pour apprendre. Un conseiller nous aidait à rédiger correctement les mots et les expressions que nous avions mal compris. Nous étions très bien préparés. Une délégation de l'exécutif provisoire (du GPRA ndlr) est venue le 1er juillet 1962 nous voir à Ménerville. Cette délégation nous a invités pour la levée des couleurs nationales à l'occasion de la proclamation de l'indépendance. Nous leur avons dit que nous n'avons pas de moyen de locomotion. Ils nous ont répondu que tout est prévu. Ils nous ont dit que le 3 juillet, nous devons être présents avant 8 heures du matin. Il y avait 7 scoutes filles et 7 scouts garçons. Le nombre 7 a été choisi par rapport au nombre d'années de guerre. A 5 heures du matin, les 7 filles et 7 garçons étaient présents à notre local qui est situé dans l'actuel stade de Thénia.»
Le siège de l'exécutif du GPRA.
«Le 2 juillet, nous nous sommes préparés jour et nuit. Le même jour (le 2 juillet), mon adjoint et moi étions invités à monter dans les bureaux de l'exécutif du GPRA. Ils étaient une quarantaine de personnes en réunion dans une grande salle. Parmi elles, j'ai reconnu Ben Bella. Des gens m'ont soufflé par la suite les noms de Boumediène, Abderrahmane Farès que je ne connaissais pas et Hattar qui était le proche collaborateur de Farès. Monsieur Abderrahmane Farès s'est assuré que nous maîtrisions la situation et que nos scouts seraient à la hauteur. Il nous donna quelques conseils pour la bonne exécution de la cérémonie, notamment la coïncidence avec la fin de la levée du drapeau.
Tout l'exécutif était présent le jour J. Il y avait également des généraux français qui ont salué, récupéré et plié le drapeau français qu'ils ont évacué avec la fanfare de l'armée française. Nous les scouts, nous nous tenions près du mât, les garçons à droite et les filles à gauche, et moi je tenais la corde. Au signal des responsables du GPRA, nous avons entamé la levée du drapeau national avec le chant du premier couplet de Kassamen. Il y avait les moudjahidine de l'ALN qui présentaient les armes.
Les généraux français sont restés pour saluer cette levée de notre drapeau. Il y a avait surtout une foule immense. A la fin de la levée, les moudjahidine tiraient en l'air, les hommes criaient tahia el djazaïr et les femmes n'arrêtaient pas de lancer des youyous. C'était de la folie. Cela a duré toute la journée (3 juillet).»
Ahmed nous a confié que ni Ben Bella ni Boumediène n'étaient présents à cette cérémonie de la levée du drapeau national alors que la veille, ils étaient présents à la réunion signalée plus haut. C'est donc Abderrahmane Farès qui avait présidé la cérémonie. Etaient présents à ses côtés d'autres dirigeants politiques et militaires comme Sator, Roth et Hamidou. Après 132 années d'occupation violente et une guerre qui a duré 7 ans, 5 mois et 19 jours, le GPRA reprend, au nom du peuple algérien, le territoire algérien et la souveraineté de ce peuple sur ce territoire délimité par les accords d'Evian. Revenons au récit de Ahmed. «Le 4 juillet, on nous a informé que la cérémonie de Rocher-Noir sera répétée à Alger, le 5 juillet. Les autorités ont appelé la population à assister à cette cérémonie. Tous les scouts de Ménerville, une centaine d'éléments presque tous en tenus réglementaires que nous fournissait un certain Djamel Ferfera de Blida seront présents. Nous avions des groupes de scouts âgés entre 8 et 25 ans. Nous sommes donc partis à pied de Thénia et nous avons marché toute la nuit pour arriver au petit matin à Alger et assister à cette seconde cérémonie.»
LA CONTOVERSE DU MÂT
L'endroit exact où était implanté le mât sur lequel flottait le drapeau de la République française remplacé le 3 juillet 1962 par celui de la République algérienne démocratique et populaire en renaissance ne concorde pas avec l'actuel.
Ahmed nous montre l'endroit exact où était implanté le véritable mât.
Le premier était implanté, selon Ahmed, à l'extrémité Est du bâtiment où siégeait l'exécutif du GPRA. A cet endroit, il n'existe plus aucune trace de ce fameux mât. Or, le mât que les autorités présentent comme étant celui sur lequel flottait l'emblème français avant son remplacement par l'emblème de l'Algérie est situé à plusieurs centaines de mètres, dans le périmètre du rectorat de l'université M'hamed-Bougarra. Ahmed est sûr de lui. « Je suis certain.
Le mât de substitution.
Cet endroit était un terrain vague avant l'installation du rectorat. Avant l'installation du rectorat, ces constructions érigées par la suite abritaient le siège de la Sûreté de la wilaya.
Ce mât a été construit peut-être bien après les années 1980. » En fait, on pourrait penser que le mât authentique a été vandalisé faute de protection ou délibérément éliminé.
Abachi L.


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