Algérie - 01- Indépendance

Le 22 juillet 1962 : la révolution bascule



Le 22 juillet 1962 : la révolution bascule
La date du 22 juillet 1962 marque immanquablement l’entrée de plain-pied de notre pays dans le règne du pouvoir personnel. En effet, au moment où des dignes révolutionnaires se démènent pour relancer le processus de la légalité, le duo Boumediene-Ben Bella complote en arrière-plan pour imposer le pouvoir de fait.
Ainsi, quand le CNRA « fut convoqué le 20 juillet en session ordinaire par son bureau pour le 2 août », le groupe de Tlemcen a pris tout le monde de vitesse en annonçant la formation du bureau politique, une instance dépourvue de toute légalité révolutionnaire, censée supplanter le GPRA.
Sur quelle base se fonde le groupe de Tlemcen pour s’emparer du pouvoir ? L’historien Gilbert Meynier résume en quelques mots ce passage en force. « En fait, ce furent 37 membres (soit à peine plus de la moitié de ses membres, loin des deux tiers exigés), réunis à Tlemcen sans y avoir été régulièrement convoqués par le bureau, qui reprirent fictivement la séance interrompue à Tripoli, et qui, sans s’être réunis, signèrent une proclamation décidant de nommer le bureau politique de sept membres tel que le parti de Ben Bella l’avait proposé début juin à la commission Benyahia », écrit-il.
Ainsi, bien que les positions soient inconciliables entre les groupes –d’un côté, on trouve Boumediene, Ben Bella, Khider, Ferhat Abbas, de l’autre côté, on trouve Mohamed Boudiaf et Krim Belkacem –, la fondation de la République se limite à mesurer la force des protagonistes. Et pour être juste, si le bilan du clan vainqueur était catastrophique à tous les niveaux, on ne pourrait pas dire autant de l’autre groupe, et ce, pour la simple raison qu’il n’a jamais exercé le pouvoir.
Hélas, ce qui manque dans cette course au pouvoir, c’est la place et le rôle du peuple. Car, pour bâtir des institutions viables, il faudrait que le dirigeant accepte de se soumettre à la volonté de son peuple. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’en 1962 les voix qui réclamaient honnêtement cette construction n’étaient pas nombreuses. À titre d’exemple, on peut citer quelques noms, à savoir Ben Youcef Ben Khedda, Hocine Aït Ahmed, Saad Dahlab. Mais, force est de reconnaitre que ces voix étaient marginalisées.
Du coup, depuis 1962, la désignation des dirigeants obéit à l’esprit du 22 juillet 1962. Il suffit, à chaque fois, d’une réunion informelle pour désigner les dirigeants. Jusqu’à février 2019, le régime n’avait aucun mal à procéder de la sorte. Sans l’acharnement du destin et sans la répression aveugle, la révolution du sourire aurait pu mettre fin à cette pratique. Malheureusement, les intérêts que procure l’exercice du pouvoir sont tellement énormes pour que le régime accepte cette transformation. Et l’esprit du 22 juillet 1962 risque encore de durer plus longtemps.


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