Algérie

Laurent Maffre. Bédéiste : «Une histoire débarrassée des stéréotypes» France-actu : les autres articles



-Comment vous est venue l'idée de cet ouvrage sur les bidonvilles de Nanterre au lendemain de la fin de la guerre d'Algérie'
Je souhaitais travailler sur une bande dessinée qui explorerait une zone d'ombre de l'histoire de France. Mon premier livre, L'homme qui s'évada, une adaptation des enquêtes d'Albert Londres sur le bagne en Guyane, m'avait permis d'aborder le reportage en bande dessinée. Même si ces textes dataient des années 1920, ils soulevaient des problématiques aujourd'hui d'actualité (sur la condition de détention des prisonniers, sur la difficulté de la réhabilitation).
Pour mon dernier livre, je souhaitais trouver un sujet qui aurait à nouveau cette capacité à raisonner avec aujourd'hui mais qui serait moins éloigné géographiquement et temporellement. C'est précisément parce que notre mémoire collective a enfoui certaines choses qu'il y a un intérêt à les mettre à nouveau en lumière. Pour cette histoire, je voulais créer le scénario (ne plus être dans l'adaptation) et le construire à partir des témoignages que je rassemblerai.
Le sujet du bidonville s'est donc précisé peu à peu, car il était question de précarité, d'immigration, de stigmatisation, c'est-à-dire de nombreuses problématiques qui aujourd'hui sont au c'ur de l'actualité.
-Sur quelle base vous-êtes-vous êtes appuyé pour nourrir la vie des familles que vous mettez en scène dans cet ouvrage '
L'histoire est construite à partir des témoignages de personnes qui ont vécu au bidonville de La Folie. Certains étaient enfants à l'époque, quant à Monique Hervo, elle était une militante qui a vécu 12 ans dans le bidonville pour apporter de l'aide à cette population. J'ai donc pu m'appuyer à la fois sur les interviews que j'ai réalisées, mais également sur les livres, les photographies et les enregistrements sonores des habitants de La Folie qu'elle a réalisés à l'époque.
-Il y a un côté documentaire dans la manière dont l'histoire est menée, et en même temps, un aspect romanesque. Comment avez-vous fait la part des choses. Où est le réel, où est l'inventé '
Il y a effectivement une dimension documentaire assumée dans la bande dessinée. Mais je souhaitais éviter de tomber dans quelque chose de didactique, de trop explicatif ; d'où l'absence de récitatifs (de voix off) par exemple.
J'ai donc pris le parti d'aborder les choses par l'intermédiaire de la fiction, de supprimer toute médiation entre le lecteur et les personnages (par exemple, je ne mets pas en scène un journaliste qui nous guiderait dans le bidonville) de telle sorte, qu'à la lecture, on a l'impression de vivre avec les personnages, de les accompagner un temps dans leur vie. L'histoire est celle d'une famille qui me permet de capter et d'exploiter l'ensemble des témoignages que j'ai recueillis. Cette famille n'a pas existé réellement, mais elle ressemble à n'importe quelle autre famille qui aurait pu vivre là-bas à cette époque.
-De tous ces témoignages auxquels vous vous êtes trouvé confronté, comment en êtes-vous ressorti '
J'ai abordé ce sujet en ne connaissant que peu de choses sur cette période. En deux ans et demi, j'ai compris et beaucoup appris. Les personnes que j'ai rencontrées ont toutes soutenu le projet et leur aide a été essentielle et régulière. Elles m'ont permis de construire une histoire débarrassée des stéréotypes ; une histoire qui serait plus incarnée qu'explicative et où l'on serait attentif au quotidien, aux espérances et aux désillusions.


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