Algérie

LADDH : une chance de renouveau '



LADDH : une chance de renouveau '
Ceux qui, à l'instar de syndicats autonomes ou d'associations, ont suivi M. Bouchachi dans son opération de parasitage de la dynamique de mobilisation de février 2011 contre le système en place et pour le changement, savent maintenant que l'ex-président de la Laddh était formellement investi de cette mission.
On s'en souvient, l'argument massue pour semer la confusion dans le mouvement de mobilisation était que la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) ne devait pas admettre des partis politiques en son sein alors que lesdits partis en étaient fondateurs ; le changement, affirmait M. Bouchachi, ne peut être porté que par la société civile, suggérant en filigrane que tous les partis sont les mêmes, pouvoir et opposition confondus. Entré à la ligue quasiment par effraction pour devenir son président par défaut, après le retrait d'Ali Yahia Abdenour, M. Bouchachi vient de rééditer une autre intrusion en se voyant confier la tête de liste du FFS à Alger pour les législatives du 10 mai, lui qui décriait les partis.
Ce ralliement vient opportunément après l'accord entre Hocine Aït Ahmed et le pouvoir. Tout porte à croire que ce deal n'est pas circonscrit seulement au quota du vieux parti mais aussi, en attendant d'autres révélations, à la composante des futurs membres de l'APN qui siégeront officiellement au nom du FFS. La mise à l'écart des cadres, ayant un parcours d'opposants avérés, est une donnée vérifiée dans toutes les wilayas où ce parti active.
Les quotas étant déjà distribués, la campagne électorale ne sert qu'à justifier la manipulation du nombre de votants. Comme l'a si brillamment démontré Me Ali Yahia Abdenour, les militants des droits de l'Homme ont la responsabilité d'éclairer l'opinion sur le parcours de ceux qui se revendiquaient de ce combat et qui pensent aujourd'hui que le moment est peut-être venu d'en tirer quelques dividendes.
Tout au long de la décennie 1990, la folie meurtrière instaurée par les groupes armés islamistes et les exactions des services de sécurité ont plongé le pays dans la terreur. Mais cette douloureuse période a forgé et fait émerger des militants qui ont bravé la peur en exigeant que la vérité et la justice soient faites sur de tels drames. L'instrumentalisation de cette cause par des partis politiques a conduit à des divisions et des catégorisations fallacieuses dans la société. Cela, en plus de ne pas aider les familles des victimes, a conduit au morcellement des luttes que le pouvoir a accompagnées par la répression et la corruption.
Dans les années 2000, le rapprochement entre les associations des familles de victimes du terrorisme et des disparitions forcées, pour lequel l'ANFD a toujours milité, aurait dû donner un souffle nouveau pour ce combat mémoriel. Le cadre de la Laddh, de par ses missions et l'aura de son président d'honneur, aurait pu fédérer toutes les énergies pour porter ce noble combat et dépasser, à terme, un traumatisme qui marque l'histoire du pays pour des générations.
Malheureusement, la marginalisation des militants des associations de victimes a englué la ligue dans des luttes de chapelle et des motivations où la dimension vénale éclate avec le départ de M. Bouchachi. Cette situation s'est particulièrement accentuée par une quasi-expulsion de ces animateurs tout au long du mandat de M. Bouchachi qui a scrupuleusement veillé à expulser les militants désintéressés et, donc, susceptibles de parler librement. L'audit moral et financier réclamé par de nombreux militants de la ligue et qui a été évoqué dans la presse par le nouveau président de la Ligue, Me Benissad, ainsi que Me Ali Yahia Abdenour, est un premier pas important vers le renouveau d'un combat pour une noble mission : la promotion de la dignité humaine.
L'impunité opposée aux victimes de tout bord par le pouvoir, le déni de justice que vit la majorité du peuple algérien, la répression et la pratique courante de procédés dégradants contre tous ceux qui osent dénoncer les orientations politiques en cours interpellent tous les militants des droits de l'Homme. Il s'agit d'un double impératif : redonner à ce combat, en Algérie, sa dimension humaniste et universelle et doter la société d'un cadre qui consacre ses valeurs.
En cette 32e commémoration du Printemps amazigh qui a précisément constitué le signal pour les revendications de la démocratie et les droits de l'Homme dans notre pays, tous les militants qui ont forgé ces luttes, au risque de leur vie et de tant de privations, sont aujourd'hui interpellés.
Devant l'entêtement du système à maintenir la chape de plomb sur la vie publique et à combattre toute vie politique organisant la cité dans un environnement consacrant les valeurs de la démocratie, le risque est grand que les mutations politiques, par ailleurs inéluctables, ne se fassent dans le désordre.
La refondation du combat pour les droits de l'Homme participe de la construction d'une autre alternative ; celle qui consacre la démocratie, la dignité de la personne humaine, le progrès et la souveraineté du peuple. La responsabilité des femmes et des hommes qui ont inspiré ces luttes est de se mobiliser dans une ultime initiative pour refonder un mouvement qui risque de subir les man'uvres du pouvoir, opposé à tous les dossiers qu'il ne peut plus nier : clonage et pollution. Ce serait un grand dommage pour la nation et une injustice pour celles et ceux qui ont consacré les meilleures années de leur vie à défendre le principe de l'inviolabilité des droits de la personne humaine.
Lila Iril
Présidente de l'Association nationale des familles de disparus (ANFD)
anfd_verite@yahoo.fr




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