Algérie

La zenga zenga du régime contre lui-même


La zenga zenga du régime contre lui-même
Singularité algérienne : le régime fait son «printemps» contre lui-même. C'est lui qui sort dans la rue, occupe la place emblématique du pays, se crie à lui-même «dégage», invente des slogans, crée des dissidences, attaque son propre parti unique, lève ses généraux contre ses généraux, divise son armée, lance des rumeurs, encercle la «police politique», loue des chameaux et bombarde son camps. Juché sur un Palais en ruine, il tance, par message lu à l'APS : «Qui êtes vous ' des rats». C'est lui qui annonce et dénonce. Zenga Zenga. De l'inespéré dans le monde dit «arabe» : le régime échappe au «printemps» mais pas à lui-même. Lassé peut-être, sans issue et sans sexe comme un jeune chômeur «arabe», sans libido que vers le ciel, sans occupation, le régime est sorti dans la rue, a crié, s'est attaqué par gaz lacrymogène à lui-même, a étalé une banderole puis l'a déchirée avec son autre main, a divisé soigneusement son armée entre manifestants et anti-émeutes, puis a continué. Peu à peu, les rangs de sa révolte ont grandi, des retraités ont rejoint le soulèvement, des cadres, des militants, des indicateurs. Tout ce que le régime comptait comme client s'est retrouvé à jouer le double rôle : héros et anti-héros. Révolutionnaire et CRS, émeutiers et pneus. Pour Saïd contre Toufik mais avec Toufik contre Saïd. A la fin ' On ne sait pas. On peut avoir les deux fins en Algérie : le régime va tomber et se remplacer lui-même par lui-même. Ou résister et rester lui-même, contre lui-même.Car tout y est d'une vraie révolution «arabe» : Président malade, frère héritier, armée divisée, parti unique pris en otage, avion ravitaillé, clan «bénalisé» ou «bénalisant», charge des forces de l'ordre contre l'ordre des forces…etc., pétition des fonctionnaires de la Présidence, guerre électronique. Le cas est singulier seulement dans le casting : il manque le peuple. Pas un seul. Rien que le régime et les siens contre les siens du régime. Pas un émeutier et Dieu que l'Algérie en a formée des milliers. Pas une pierre, que des insultes et des fausses dents. Pas un seul jeune dans ce «printemps» ; que des vieux, vieillards, vieillissants. Des ex, des retraités, d'anciens généraux, de très antiques candidats, des retournés. Les noms de ce «printemps» en bocal ' Benhadid, Gaïd, Saïd, Saâdani, Sidi Saïd, Hamrouche, Brahimi, Louiza, Benflis…etc. Tranche d'âge, plus de 60 ans. Que des cannes et des ridés. Des plaques commémoratives qui font du trapèze.Le peuple, lui, est étrangement conservateur, surveille les femmes, les vêtements, attaque l'amour ou s'en passe, prie son Dieu et mâche son baril, allonge la colonne hallal/haram, ne veut pas de mouvement ou d'engagement, zéro risque, zéro sucre. Il ferme sa porte, enjambe les propos, se réjouit mais en mode intime et attend que cela passe. Et cela angoisse aussi un peu : qu'est-ce qu'un monde sans DRS ' Sans régime ' Sans colonisation ' Sans Généraux ' Sans décideurs ni complots ni putsch ni coups d'Etat ' Y a-t-il une vie après un régime ' C'est la vieille peur algérienne exprimée dans le conte de «la vache des orphelins». Avec la variante de la vache folle.


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