Dans le petit village de Sidi Yacoub situé dans la commune rurale de Oulhaça Gheraba (wilaya de Témouchent) à quelques kilomètres de l’embouchure de l’oued «Tafna», est érigée une mosquée historique construite en 739 de l’hégire où active la zaouïa de Sidi Yacoub Ibnou el hadj Tlemçani et rassemble tous les jours de nombreux fidèles venus prier dans la ferveur de l’islam dans un environnement coranique.
Sidi Yacoub, dont le village porte le nom, est né à Tlemcen vers la fin du XIIIe siècle sous le règne de la dynastie d’Abou Saïd Othman (1282–1303), plus tard dynastie des Zianides. Sa biographie indique « qu’il fit ses premières études à Tlemcen où il eut comme premier maître son père El Hadj qui lui apprit le Coran à l’âge de 8 ans. Puis, il se consacra à l’étude des sciences islamiques ; il brilla en jurisprudence. Par la suite, il se rendit à Fès, capitale des Mérinides, pour approfondir ses connaissances avant de retourner dans sa ville natale ou il exerça la fonction de Qadi. Vers la première moitié du XIXe siècle, Sidi Yacoub s’installera dans le littoral d’Oulhaça, près d’une plage caillouteuse qui porte aujourd’hui son nom (plage de Sidi Yacoub). C’est sur le méplat d’une falaise que le wali (saint patron) méditait ».
On raconte – réalité où une légende ? – qu’un jour, alors qu’il contemplait les flots, il vit un voilier espagnol s’échouer dans les eaux proches. Le navire s’immobilisa et une des marins vinrent sur une barque jusqu’à la terre ferme pour demander du secours. Ces derniers aperçurent Sidi Yacoub et lui demandèrent : « Serais-tu marabout et aurais-tu jeté un sort sur nous ? ». « Pas du tout, aurait répondu Sidi Yacoub, je cherche seulement à me procurer du bois pour construire une mosquée au village ». « Aide-nous et nous t’en rapporterons de notre prochain voyage », lui proposèrent les marins. Il acquiesça : « Quand vous retournerez en Espagne, mettez le bois en piles, liez-le puis jetez-le a la mer. Dites « c’est pour toi Yacoub » et il me parviendra ».
Les chroniqueurs historiques racontent : « Les marins reprirent la mer sans aucune difficulté. A leur arrivée en Espagne, ils firent comme Sidi Yacoub leur avait recommandé. Et le miracle se produisit. Quand les fagots de bois commencèrent à apparaître à l’horizon de la plage d’Oulhaça Gheraba, des riverains voulurent accaparer la flottaison. Ces derniers crurent bon de crier et de faire des signes avec leurs burnous en direction du chargement pour le faire dévier vers eux. Mais ce fut peine perdue, car le bois se dirigea lentement vers la baie, entraîné par le vent et les courants. Ses voisins se mirent à le harponner pour le traîner vers eux, mais ce fut impossible ; le chargement était devenu trop lourd. Sidi Yacoub envoya ses deux maîtres maçons Hammou et Boulifa qui manièrent aisément le bois et le montèrent au sommet de la falaise, lieu choisi pour la construction de la mosquée ».
Le méplat de la piété
La mosquée fut érigée en forme carrée, épousant le style andalou et maghrébin avec une toiture à trois rangées parallèles, soutenue par des arcades en cintre brisé et de gros piliers. Le plafond en arbalétrier et en bois sculpté est semblable à ce qu’on voit à Fès et Tlemcen durant les périodes mérinide et zianide. La mosquée et le village sont situés à environ mille mètres du rivage sur une pente de 500 mètres qui en masque la vue aux marins.
Sidi Yacoub, dit-on, allait prier sur un méplat d’une crête avancée de la falaise. Il avait pour ses ablutions rituelles, une source douce jaillissant au milieu des eaux de la mer (la source existe toujours au même endroit). Selon les chroniqueurs, le choix du littoral serait motivé par des impératifs de « stratégie militaire », en ce sens qu’il fut de tout temps un point de surveillance idéal contre les incursions européennes, comme ce fut le cas en 1503 où les citoyens de la région purent repousser sans trop de difficulté une tentative d’incursion portugaise formée de sept brigantins (voiliers de pirates) sur le rivage ». Il est souligné aussi que la région « a été le haut lieu d’une bataille héroïque qui s’et déroulée en 1836 sous les ordres de l’émir Abdelkader et le commandant Bouhmidi. Plus tard, en 1957, durant la Guerre de Libération nationale, la mosquée a servi de refuge aux djounoud de l’Armée de Libération nationale. Pour cette raison, elle a été la cible de bombardements aériens et terrestres qui ont fait plusieurs victimes, dont treize chahids membres de la famille de Sidi Yacoub ».
Quand la construction de la mosquée fut achevée, Sidi Yacoub donna le meilleur de lui-même pour l’enseignement auquel il se voua corps et âme. Ainsi, tous les habitants de la région d’Oulhaça Gheraba, Béni Khaled et Médiona venaient puiser à la source de son savoir et assister au prêche du vendredi.
« Sidi Yacoub était un jurisconsulte très versé dans le soufisme ; un homme juste et très respecté car il avait, depuis longtemps, renoncé aux biens de ce bas monde », rappellent les historiens de l’époque. Il mourut en 1410 (on rapporte qu’il serait mort à l’âge de 127 ans). Son fils, Sidi Ali, puis son petit-fils, Sidi Berramdane El Khalifa, jurisconsultes, comme le seront plus tard beaucoup d’autres disciples, prirent tour à tour la succession.
La mosquée a été partiellement rénovée avec le concours des habitants. L’ancienne école coranique reçoit toujours des dizaines d’élèves et la zaouïa projette la construction d’un nouvel internat pour y accueillir les enfants de la région.
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Posté Le : 09/10/2011
Posté par : tlemcenislam
Ecrit par : Abdelmadjid B.
Source : tlemcem2011.org