LA VRAIE PRESSION DE LA FOI

Exiger la réouverture des mosquées, c'est accorder peu de considération et de reconnaissance à tous ceux qui se sacrifient aujourd'hui corps et âme pour lutter contre le coronavirus. Le syndicat des imams algériens s'engage dans une précipitation volontariste, comme si ceux qui ont isolé les fidèles des mosquées étaient des farfelus qui sont passés outre la sacralité de la foi. L'exigence est curieuse et elle est totalement en porte à faux avec l'attention évidente que porte l'Etat pour un sujet sensible et délicat à gérer et il est évident que les mosquées n'ont pas été fermées de gaité de c?ur.Le problème des mosquées aujourd'hui est d'abord d'ordre sanitaire avant d'être religieux. Même en y mettant les formes, les imams syndicalistes s'introduisent dans un terrain qui relève des prérogatives de l'Etat et engage la totalité de sa responsabilité.
Il en est de même pour la recommandation qu'ils affichent pour rendre impératif le sacrifice du mouton érigeant leur rôle en doublure de la mission du Haut Conseil islamique. Malgré la tiédeur du verbe, l'énoncé de leurs recommandations est d'abord la manifestation d'une présence syndicale occultant le drame sanitaire complexe que vit le pays et occultant le lot du personnel médical qui y a laissé la vie. Se pose alors en la matière la question de savoir quelles sont les attributions syndicales des imams et quelles sont leurs limites.
Sans doute faudra-t-il les rassurer. Les mosquées rouvriront tôt ou tard et des moutons seront sacrifiés malgré toutes les restrictions imposées sur les places publiques. Mais personne ne doit feindre d'ignorer que le c?ur n'est pas à la fête et on imagine aisément si les espaces publics restent interdits, les tribulations des téméraires clandestins s'accrochant aux festoyades alors que la majorité du personnel médical lutte contre la mort et que les enterrements se font dans l'obscurité de la nuit pour donner aux victimes le statut de pestiférés.
La pression de la rue est certes forte, mais celle de la logique et de la sagesse doit être autrement plus forte. Il se trouve que celle-ci est le fondement de la foi.