Algérie

La violence en tant que constante dans les rapports de conscience



La violence en tant que constante dans les rapports de conscience
Aussi loin que puisse rapporter l'histoire de l'humanité pour la mémoire, la violence fait partie intégrante et intime de l'existence en communauté. De même que la nature animale évolue dans l'ordre de la domination à l'intérieur des espèces, selon le principe de l'instinct, nécessaire, voire indispensable, à la survie, dans le schéma établissant les individus en troupeaux, hordes, meutes, hardes, et cetera, comportant des dominants, avec un chef à la tête, le genre humain, organisé en groupe, en société, s'invente la structure des classes où celle des leaders règne. Depuis la nuit des temps, l'atteinte à l'hégémonie dans le groupe humain ne se réalise pas sans le recours à la force, à la manifestation de la violence, par tous les moyens existant comme attributs de la guerre. L'apparition des cultes et des dogmes dans les grands processus de l'évolution de la pensée parviennent tant bien que mal à reformuler le comportement des communautés par l'apport de la discipline, de la méthode et de l'ordre, poussant à agir dans les meilleures intelligences, où la notion de la paix est synonyme de prospérité, mais surtout de sauvegarde de l'existence. Les religions abrahamiques, chacune à sa manière, selon les prophètes associés, leur cheminement parmi les hommes dans l'explication de la révélation, bannissent la violence en tant que modèle de comportement dans la vie courante ? on sait pourtant que de tous temps la guerre est imminente dans le cas des faire-valoir cultuels, surtout aujourd'hui, lorsqu'il n'est pas aisé de dissocier la divinité du bien fondé de la construction des nations comme corolaires à la fabrication des armes.Sous le regard de la vieille sagesseConfucius, philosophe chinois du 5e siècle avant JC, professe le maintien de l'ordre social en tant que consensus préétabli entre les hommes dans une communauté où chaque interaction individuelle ou collective est liée par un certains nombre de relations prescrites comme «le gouvernant et le gouverné, le père et le fils, le mari et l'épouse», d'après Confucius, les individus sont tenus d'agir les uns envers les autres en fonction de leurs rôles prescrits. D'où la violence n'a pas droit de cité dans ces interactions, du moment que chacun est en mesure de mettre en valeur et promouvoir l'harmonie et la paix. Selon Confucius, même si la violence est motivée par un besoin justifié de punition, de châtiment sur autrui, dans un acte de la passion ou de la colère, elle reste une violence caractérisée car elle corrompe l'intégrité de la communauté et disqualifie l'ordre social, et mène irréversiblement à la discorde, c'est-à-dire à la liberté dans la production des affects et la manifestation dangereuse des instincts.Confucius nous enseigne sa notion du «Ren» et du «Li», précepte prépondérant dans le processus vers la quiétude de l'individu et du groupe. Pour lui, le Ren, que les sages chinois de l'époque appelaient la «règle d'or», la promotion de la bienveillance, l'altruisme et le maintien de l'ordre social, est la pensée de la miséricorde infinie, dans le sens où il s'agit de traiter autrui comme on le voudrait pour soi, sans qui toute tentative de lien social est compromis. Ainsi donc la condescendance et le désintéressement ne s'accommodent jamais et nulle part avec les procédés de la violence, sauf en cas de la légitime défense et la protection de la famille. La philosophie de Confucius dans le cas de la paix et de la plénitude pour la prévention de l'espèce, «agir correctement et faire le bien envers toute l'humanité» doit au départ se traduire dans la lutte contre soi pour le bon fonctionnement de la société.Ce qui amène au concept du Li, la meilleure manière d'inscrire son comportement dans la société, établie par des règles d'actions individuelles par rapport à l'ordre social et inversement, la mentalité de celui-ci en relation avec les besoins de chacun.La philosophie de Confucius est basée sur la tradition chinoise et ses vieilles croyances, qui attribuent une valeur primordiale à la bienséance. «Peu importe la situation, même si entre un mendiant et un roi, toutes les personnes doivent agir correctement envers l'autre. ??Appropriée'' l'action signifie que vous devez retenir vos émotions et faire ce qui est juste plutôt que de céder à la passion ou la colère. Quand les gens agissent correctement, la violence peut et doit être évitée pour le bien commun. Pour adhérer à Li, un individu doit être conscient de la façon dont il apparaît, ou le public ?'face''. Peu importe la façon dont une personne se sent à l'intérieur, selon Li, elle doit obéir à l'autorité et à adhérer à des normes sociales pour une plus grande unité.»La fascination devant la violence et ses conséquencesDans la même période, à peu près, en territoires de la Grèce classique, à Athènes de Périclès, en pleine exploration de la démocratie, comme forme de gestion de la cité, le père de la philosophie «occidentale» -se dressant contre la démocratie, dans l'élan de son combat contre les sophistes- dont il dit que son objectif n'est pas de conduire les hommes et les groupes vers le juste et le rationnel dans le meilleur pour l'existence en commun, mais de sacrer les arguments qui réussissent à convaincre de tout, y compris des discours sur la paix et la prospérité, derrière qui se cachent les pires violences sur l'entité de l'homme et sur les éléments essentiels qui assurent la pérennité de sa communauté. Mais bref, il avertit sur les constituants fondamentaux de la conscience de l'individu, dont celui de son désir, qu'il maîtrise ou non, mais qu'il veut libérer qu'elle qu'en soit le tribut. Platon écrit dans la République : «Léontios, fils d'Aglaïon, revenant un jour du Pirée, longeait la partie extérieure du mur septentrional lorsqu'il aperçut des cadavres étendus près du bourreau; en même temps qu'un vif désir de les voir, il éprouva de la répugnance et se détourna ; pendant quelques instants il lutta contre lui-même et se couvrit le visage; mais, à la fin, maîtrisé par le désir, il ouvrit de grands yeux, et courant vers les cadavres : ?' Voilà pour vous, mauvais génies, dit-il, emplissez-vous de ce beau spectacle ! ?'» Spécialiste de la métaphore et de l'allégorie dans ses discours de l'argumentation, Platon met ici la l'attention de l'homme devant une dualité d'affect qui constitue sa conscience, en l'occurrence la production du désir et la volonté de lutter contre ce désir et la liberté de le laisser s'assouvir. Cette image de Léontios arrivant à Athènes après un lointain voyage, renvoie les contemporains devant lesmultiples incidents de la vie quotidienne de la cité moderne postindustrielle où les altercations de violence tragiques s'étalent sous les yeux. Combien de fois on ne se fraye pas un chemin dans la foule pour regarder de «visu» une personne gisant morte sur un trottoir foudroyée par une attaque cardiaque ou frappée par quelque objet funeste au cours d'une bagarre.Ou dans un accident de la route quand on s'arrête ou carrément on fait marche arrière, quitte à ajouter à la teneur de l'encombrement et à la difficulté de faire parvenir les services du salut, pour «admirer» le dramatique de l'incident, qui se présente, toute honte bue, comme un spectacle de premier choix. «Toute honte bue» pour expliciter ce désir qui réussit à diluer la honte dans le procès de la curiosité assouvie et l'instinct qui triomphe. On ouvre les yeux et on coure vers la victime : la violence séduit et ses conséquences fascinent. Pour revenir aux deux penseurs de l'Antiquité, dans les communautés qui ont l'intention d'exister dans l'ordre et la discipline, le libre cours aux désirs, même au degré zéro de leur manifestation, dans l'acte d'«apprécier» les résultats de la tragédie, à travers toutes ses formes, depuis la parole jusqu'à l'acte. Beaucoup de journalistes, aujourd'hui, de la presse écrite ou des médias lourds n'estiment souvent pas une fusillade dans la cour d'un collège, par exemple, en période de récréation qui ne fait que deux ou trois malheureuses victimes.Et que le forcené ne soit pas ligué à quelque faction terroriste internationalevirulente.Les instincts et les paradoxes de l'agressivitéDans La généalogie de la morale, Nietzsche considère que le combat pour l'existence est l'élément fondamental de la créativité et de la joie. Qui s'accompagne la plupart du temps de violence. Que le penseur partage en deux notions, une violence active, qui s'oppose à une violence «réactive», qui est une violence pathologique, «méchante, pleine de ressentiment. Une violence qui désire la mort et non l'affirmation et la consécration de la vie». Dès lors dans les systèmes judiciaires et cultuels coercitifs, «les sociétés vivent en système de cruauté». Dans tous les pays du monde, industrialisés ou non, dont les cultures dominent dans les échanges civilisationnels ou ne sont pas représentatives, le gros des prisonniers pour droit commun ne retrouvent pas la liberté guéris de leurs pulsions délictuelles. On répond à l'instinct de la violence par un autre instinct de la violence, souvent plus acerbement. Dans le geste de casser la vitre d'une voiture et d'assouvir un instinct de vengeance sur un chauffard qui a failli écraser une jeune personne de dix-huit ans, la conscience ne conçoit pas une contrepartie punitive de toute une année de privation de liberté, établie par les textes de loi. Paradoxalement, la loi produit le hors-la-loi.De son côté Freud, dans Malaise dans la civilisation, explique : «L'homme n'est point cet être débonnaire, au c?ur assoiffé d'amour, dont on dit qu'il se défend quand on l'attaque, mais un être, au contraire, qui doit porter au compte de ses données instinctives une bonne somme d'agressivité. Pour lui, par conséquent, le prochain n'est pas seulement un auxiliaire et un objet sexuel possibles, mais aussi un objet de tentation. L'homme est, en effet, tenté de satisfaire son besoin d'agression aux dépends de son prochain, d'exploiter son travail sans dédommagement, de l'utiliser sexuellement sans son consentement, de s'approprier ses biens, de l'humilier, de lui infliger des souffrances, de la martyriser et de le tuer.» Ce point de vue n'est pas loin de l'explication de Nietzsche, plutôt il l'épuise en le complétant. Freud ne série pas dans la violence, celle qui construit et celle qui détruit, il l'inscrit dans le processus inné de la violence, de l'agressivité latente, constante et permanente chez l'homme depuis ses instincts.Il revient à la notion de l'«homme est un loup pour l'homme», dans une approche de l'analyse de la conscience, par rapport à Thomas Hobbes qui l'interprète d'après les données sociopolitiques, dans son Léviathan dans lequel le penseur écossais dit : «Tant que les hommes s'évertuent de vivre hors d'une autorité souveraine qui les tienne tous en respect, eh bien, ils vivront dans une situation qu'on appelle guerre, et cette guerre sera la guerre de chacun contre chacun.» L'autorité, le maître-mot.Depuis la cellule familiale jusqu'aux grandes structures sociales, sans l'autorité qui définit les limites de l'individu, dans son entité solitaire ou en groupe, étendant ses désirs dans la communauté, par le discours ou par le comportement physique, l'évolution de l'espèce ne possède, désormais, aucune garantie lui assurant les marques de l'humanité victorieuse sur ses faiblessesoriginelles, qui la font sortir du règne animal. Les historiens, les sociologues, les psychologues, et cetera, diront un jour pourquoi les garçons sont d'inné gâtés à la maison dans nos contrées, qui font la loi dans la famille, avant de sortir caillasser, incendier, ensuite aller squatter n'importe quoi dans la rue en insultant gratuitement les filles sur leur chemin. Mais ils diront aussi l'arrogance des gouvernants qui occupent des postes de grandes responsabilités, et qui n'aiment pas qu'on étale leur médiocrité, malgré la preuve par le mécontentement social, qui ne possède que son agressivité pour le dire. Et ainsi va et tourne le cercle vicieux.N. B.




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