Algérie

«La vie démocratique a un coût»



«La vie démocratique a un coût»
- Vous avez une responsabilité historique et morale de conduire à  bon port ce processus électoral…
Sans vouloir tomber dans une espèce de démagogie, je dirais que c'est la responsabilité collective et j'ai de la chance, je crois, une espèce de baraka… Je pense que c'est un choix fait par les Tunisiens d'organiser l'élection de l'Assemblée nationale constituante. C'était le choix le plus difficile, mais aussi le plus clair parce qu'il peut permettre la rupture avec le passé et refonder les institutions du pays sur une base solide. J'ai eu la chance en tant que militant des droits de l'homme de connaître un grand nombre de cette élite politique et associative qui a combattu la dictature de Ben Ali. J'ai eu la chance aussi parce qu'en faisant avec d'autres camarades notre devoir d'informer sur la violence des droits de l'homme en Tunisie, nous avons dû donc connaître tous ces gens qui étaient des victimes. Donc, avec l'arrivée de la révolution et à  un moment précis sur la question, j'ai présenté ma candidature.
- Vous sentez-vous l'énergie nécessaire pour garantir des élections libres, honnêtes et transparentes '
Je crois que ceux qui m'ont élu (la haute instance chargée de l'atteinte des objectifs de la révolution) me faisaient confiance, c'est-à-dire que je suis un homme transparent, indépendant et respectueux des autres, mais qu'à la fin j'agis suivant des références déclarées.
Mais assurer un processus indépendant ce n'est pas que cela. C'est nécessaire, mais pas suffisant. Il faut d'autres conditions sur le plan juridique, logistique et l'administration.
Aussi et surtout faut-il que les Tunisiens aient confiance. C'est fondamental. Quel est la mal le plus dangereux dans une élection ' Le doute. C'est quelque chose qui peut àªtre fatale.
- Partagez-vous l'inquiétude selon laquelle des électeurs, parmi eux surtout des analphabètes, ne sachent pas comment voter du fait de la complexité technique du scrutin '
Oui, je partage cette inquiétude. Mais en même temps, ces électeurs sont pour la plupart très sensés…
- N'empêche que techniquement cela reste un peu difficile, n'est-ce pas '
Ils peuvent le faire même techniquement. Nous avons fourni des efforts pour présenter un bulletin qui soit très présentable, plus visible. Chaque liste a un numéro, et chaque liste a un sigle et donc ne serait-ce que par le fait du numéro et du sigle, ce sont deux facteurs qui peuvent faciliter le choix.
- On a soulevé çà et là la circulation de beaucoup d'argent durant la campagne électorale. N'y a-t-il pas risque de parasitage des chances des candidats '
D'abord l'argent a existé avant la campagne électorale. On a effectivement relevé que certains partis manifestaient d'une manière ostentatoire en disposant de locaux luxueux, financement des campagnes de publicité de grande ampleur dans des médias, disposer de moyens techniques et logistiques impressionnants au lendemain de la révolution. L'ISIE est chargée de contrôler le financement de la campagne électorale. Et puis il y a le financement politique, celui des partis politiques. Ce sont deux choses différentes, mais qui sont, certes, liées. S'agissant de la campagne électorale, nous avons opté pour un financement public. Toutes les listes à  égalité sont financées par le budget du ministère des Finances. Et on a plafonné les dépenses. Comme on a interdit le financement étranger et privé. Là nous aurons le moyen de contrôler. Nous avons la compétence, y compris d'annuler les résultats s'il s'avère que le dépassement a atteint un seuil qu'il ne faut pas.
Par ailleurs, la question de l'argent relative au financement des partis politiques, que ce soit le financement privé ou étranger, rien n'indique qu'il y a un lien d'activité de ces partis avec le financement de la campagne. Il y a certaines activités de partis qui ne sont pas dans la campagne électorale. Mais c'est vrai, la vie politique a un coût, surtout la vie démocratique. Le débat est là ; il faut qu'une décision soit prise. Par exemple, on n'a pas un cadre juridique des partis politiques. C'est la faille à  travers laquelle les partis sont entrés. Il n'y a pas de cadre juridique pour les médias. C'est ainsi que la publicité politique est entrée aussi.
- Mais la publicité politique vous l'avez interdite…
De par les compétences et notre lecture des textes…Le tribunal administratif nous a donné raison. Nous avons interdit la publicité politique à  partir du 12 septembre, c'est-à-dire dès que nous avons pu avoir une image relative de toutes les listes. Au nom du principe d'égalité.
- Allez-vous confirmer que l'ISIE a interdit aux candidats de faire des déclarations aux médias étrangers '
Ce n'est pas l'ISIE, mais le code électoral qui l'interdit. Les textes interdisent effectivement à  tout candidat de faire appel aux médias étrangers. L'interdiction peut paraître formelle, mais il ne faut pas que le candidat promeut sa campagne. Mais les médias peuvent assurer la couverture des activités s'ils le souhaitent.
- Dans quelle mesure la polémique qui enfle autour de Nessma TV peut-elle influencer tout le travail que vous faites '
De créer des troubles et fausser les enjeux essentiels. Nous sommes dans les dix derniers mètres de la course, normalement les débats doivent porter sur les élections. De quoi débat-on actuellement '
- Qu'avez-vous gagné d'avoir reporté l'élection prévue en juillet au 23 octobre '
D'avoir évité un choix très dangereux. On ne pouvait garantir même partiellement la tenue d'une élection libre, indépendante et transparente. On n'était pas prêts.
Elle aurait pu avoir lieu dans un chaos que je n'aurais pas pu imaginer.
- Quel bilan pouvez-vous avoir sur la campagne '
Jusqu'ici, c'est une campagne un peu timide, faible. Il y a d'abord la jeunesse des acteurs. Ensuite, nous sommes sur un terrain d'expérimentation. Enfin, nous n'avons pas eu le temps de bien préparer cette campagne.
- Ne craignez-vous pas un faible taux de participation '
Un taux de participation de 60%, je ne serais pas étonné, pour une première élection libre.
 


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