Une réelle menace plane sur la démocratie en Turquie. Ce pays, que les peuples arabes ont envié pour son modèle politique et économique, dérive dangereusement et pourrait entrer dans une période d'instabilité chronique. Un homme est responsable de cette évolution : Tayyep Recep Erdogan. Depuis son arrivée au pouvoir en 2003, ce membre influent des Frères musulmans n'a pas cessé de travailler pour changer la société turque, sapant de manière intelligente l'héritage de Kamal Attatürk. Sa première cible a été la presse, au point qu'en 2012 la Turquie comptait le plus grand nombre de journalistes (173) en prison. Le processus connaît une nette accélération après la tentative de putsch de juillet dernier, attribuée par Ankara au prédicateur Fethullah Gülen, qui vit en exil aux Etats-Unis. Depuis, des purges de type stalinien se sont abattues sur la Turquie, les goulags en moins? Jusqu'à maintenant du moins. Aucun secteur n'a été épargné. L'armée, l'administration, les universités, les partis : tout passe à la trappe, au point que les geôles ne suffisent plus pour accueillir tous les suspects qui se comptent aujourd'hui par dizaines de milliers.Le chef de l'Etat prend prétexte de ce coup d'Etat manqué pour consolider davantage son pouvoir, surtout en affaiblissant au maximum l'opposition démocratique. Et le cauchemar continue pour le peuple turc. Ces derniers jours, c'est au célèbre journal Cumhuryet de subir les foudres du pouvoir : 12 de ses journalistes, dont les principaux responsables, ont été jetés en prison. Depuis juillet, 15 quotidiens, magazines et agences de presse ont été fermés. Une particularité : ils sont presque tous domiciliés dans la même région, le Kurdistan turc.Depuis 2003, Erdogan n'a pas cessé de jouer sur la fibre nationaliste, exacerbant un sentiment très ancré chez les Turcs, qui glorifient encore leur passé ottoman. Et l'ennemi tout trouvé pour réveiller les vieux démons sont les citoyens kurdes. Ces derniers, longtemps méprisés et privés de leurs droits, commencent à s'affirmer sur la scène politique, surtout qu'ils sont porteurs de valeurs démocratiques, ce que ne peut tolérer le Président turc, qui a en tête un autre projet de société. Il a poussé sa haine pour cette fraction du peuple jusqu'à arrêter ses députés au Parlement ainsi que les deux coprésidents de l'AKP, le parti kurde. Ils sont accusés de soutien au PKK, qui lutte les armes à la main pour l'autonomie du Kurdistan turc.La phobie d'Erdogan pour les Kurdes est telle qu'il n'hésite pas à engager son pays dans des opérations militaires en Syrie et en Irak avec pour seul objectif, l'affaiblissement des Kurdes dans ces pays et non pour combattre Daech, comme il le prétend. Comment peut-il le faire alors qu'il est accusé d'être le géniteur, avec l'Arabie Saoudite, de l'organisation d'Abou Bakr Al Baghdadi ' L'association des Frères musulmans est soupçonnée d'être derrière l'expansion du wahhabisme et du salafisme. Peut-être qu'Erdogan se voit comme le nouveau calife du monde musulman. Son comportement est, de toute évidence, dangereux pour la Turquie. Elle est dirigée par un potentat, à l'image des pays arabes.
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Posté Le : 06/11/2016
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Tayeb Belghiche
Source : www.elwatan.com