Algérie

La Tunisie, vingt ans après l'Algérie


Quand les islamistes ont traîné en justice le directeur de la chaîne de télévision Nessma, beaucoup de 'démocrates", en Tunisie et ailleurs, se demandaient encore si Nabil Karoui ne l'avait pas cherché en diffusant Persépolis, ce film 'blasphématoire". Quand une jeune Tunisienne a été violée par deux policiers, c'est elle qui fut d'abord poursuivie par la justice, avec une insistance telle que le parquet fit appel de sa relaxe en première instance.
Samedi dernier, soit quatre jours avant l'assassinat de Chokri Belaïd, une réunion de son parti a été attaquée par des islamistes. Des premières manifestations de violences islamistes dans la Tunisie post-Ben Ali au premier assassinat de l'un de ses dirigeants politiques, hier, le processus s'est déroulé selon la norme établie par l'intégrisme : faire reculer, par la terreur ordinaire, jusque dans ses derniers retranchements, l'argument démocratique, avant de passer à l'élimination physique des derniers porteurs du principe de laïcité.
Et ce n'est sûrement pas fini : hier, Moncef Marzouki, en idéal Chadli Bendjedid tunisien, défendait encore la présomption d'innocence des islamistes en réfutant, dès sa première réaction, l'imputation 'précipitée" du crime à Ennahda. Pourtant, nul doute que si ce n'est pas Ennahda, 'c'est donc son frère".
Plus aucun pays de la région n'est à l'abri de la menace terroriste qui traverse l'espace sahélo-maghrébin tout entier. Et la Tunisie a eu à essuyer, ces derniers mois, quelques assauts de groupes terroristes, notamment du côté de la frontière algérienne. Mais le meurtre du secrétaire général du Parti des patriotes démocrates ne relève certainement pas de l'activité d'Aqmi et autres sous-produits d'Al-Qaïda. Il s'agit d'un acte inaugural d'un nouveau contexte politique tunisien : le terrorisme islamiste vient d'investir la scène politique. Quand l'islamisme intervient dans la vie politique d'une nation, il a toujours tendance à user de l'arme, qui fait sa nature et fonde sa stratégie d'expansion : terroriser ou tuer.
En Algérie, la même 'compréhension" que celle de Moncef Marzouki et des défenseurs de la légitimité 'démocratique" d'Ennahda avait encouragé le terrorisme 'pacifique" du FIS, au début du multipartisme. Pas plus que l'attaque d'une patrouille de gendarmes tunisiens, l'an passé, l'attaque de la caserne de Guemmar, en 1991, n'avait suffi à alerter sur le danger terroriste des islamistes en Algérie. Ce sont pourtant les mêmes 'baltaguias" que le pouvoir tunisien incite à casser les manifestations contre le pouvoir d'Ennahda, 'baltaguias" qui formeront, ou qui sont peut-être en train de former, les groupes du terrorisme tunisien de demain. Voire d'aujourd'hui, puisqu'ils viennent d'inaugurer leur 'djihad".
Pourtant, nul n'appelle à 'interrompre" le processus électoral en Tunisie. Le terrorisme est bel et bien indissociable du projet islamiste. Toutes ses formes, 'modérées" ou 'pacifiques", ne sont que des états intermédiaires par lesquels il passe vers son état accompli : un mode de contrôle de la société par la violence et le meurtre. Et au début, c'est moins la force de ses rangs, que l'attitude de 'démocrates" qui, par peur, refusent d'affronter l'islamisme, qui fait sa force.
De ce point de vue, la Tunisie est en passe d'emboîter le pas à l'Algérie, vingt ans après.
M. H.
musthammouche@yahoo.fr
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