Algérie

La tribu des Beni Menacer, un long parcours de bravoure et de résistance au colonialisme



La tribu des Beni Menacer, un long parcours de bravoure et de résistance au colonialisme
TIPASA - La tribu des Beni Menacer a constitué l'un des premiers maillons de la résistance populaire algérienne contre l’occupant français, en sacrifiant sur l’autel de la liberté ses meilleurs fils. Parmi eux Mohamed Ben L’hadj, l’un des chouhada de la résistance populaire, tombé au champ d’honneur à la fleur d’âge, dont le crane figure parmi les 24 rapatriés par l’Algérie, à partir de la France.

Le fief de la tribu des Beni Menacer s’étendait jadis de l’est de Mostaganem, en allant vers Beni Haoua, et Chlef, à l’Ouest, puis Miliana et le nord de Médéa, au Sud, Cherchell au Nord, et l’ouest d’Alger à l’Est.

"La tribu des Beni Menacer faisait figure de locomotive de la résistance populaire, en menant la révolte à la tête des grandes familles de la région, à partir de la Zaouia "Sidi Mhamed Aberkane", un véritable centre de rayonnement religieux, géré à l’époque par la famille des Brakna (Aberkane)", a indiqué à l’APS, DR Hassane Mekdouri, professeur en histoire et chercheur.

Avant l’occupation française, le niveau d’organisation de cette tribu était tel qu’elle constituait une sorte de "Fédération" des Beni Menacer, représentée, selon les historiens, par une "force militaire" englobant les tribus de la Dahra, de l’Ouarsenis, de la plaine de Chlef, la Mitidja, et Tissemssilt, en charge de la protection de la partie Est d’Alger, appelée Dar Essoltane, sous la régence Ottomane, a-t-il ajouté.

Menée par M’hamed Ben Aissa El Barkani, la tribu des Beni Menacer a rejoint la résistance populaire, dés les débuts de l’occupation française, soit 1932, en s’alliant à l’Emir Abdelkader, auquel elle prêta allégeance, à la mosquée "100 Arssa" (ou 100 colonnes) de la ville de Cherchell. Elle constitua de ce fait l’un des plus solides soutiens de l’Emir Abdelkader, en "freinant sérieusement" l’expansionnisme colonial, dans l’ouest du pays, durant les années 30 et 40 du siècle dernier, selon les historiens.

"Cette force de résistance de la tribu et son esprit combatif "s’explique selon le chercheur en histoire Dr Mekdouri, par la "jeunesse et bravoure de ses éléments, à l’image du jeune Chahid Mohamed Ben L’hadj, dont le crâne a été rapatrié par l’Algérie".

Après cette allégeance à l’Emir Abdelkader, ce dernier désigna Mhamed Aissa El Barkani "Khalif" de la région du Tell (Titeri) soit Médéa et ses environs, avant d’élargir ses prérogatives jusqu’à la région du Sahel, soit Cherchell. Tandis qu’Allal Ould Mbarek (issu de Koléa) fut désigné "Khalif" de Miliana.

La force de résistance des Beni Menacer était telle que le colonialisme français n’a jamais pu franchir ses frontières géographiques jusqu’à 1934. Ce qui constitua l’un des facteurs à l’origine de la conclusion du "traité Desmichels", un traité de paix par lequel le général Desmichels, gouverneur d'Oran, reconnaît la souveraineté de l’Emir à Abdelkader sur l’Etat national de l’époque. Le traité fut, néanmoins, transgressé par la France coloniale, par l’entremise du Duc d’Orléans, qui mena une attaque à l’est d’Alger, à laquelle la tribu des Beni Menacer fit face.

Poursuivant son offensive, la France coloniale réussi à prendre Cherchell en mai 1840, mais la résistance des Beni Menacer n’a pas fléchi pour autant, en menant plusieurs attaques contre l’ennemi, dont la plus importante fut celle du 19 mai. Une bataille menée à Cherchell, durant six jours contre la France, et dont la férocité a contraint les militaires français à qualifier les Beni Menacer de "véritable épine" qui leur est "restée en travers de la gorge".



La bataille de Zekkar, un autre maillon de l’histoire de la résistance populaire


Selon les historiens, la bataille du Djebel (mont) Zekkar (juillet 1842) à Miliana, restera dans les annales de l’histoire de la résistance populaire parmi les plus cuisantes leçons infligées à la France coloniale par la tribu des Beni Menacer, qui a dressé une embuscade à un régiment de 500 militaires français, menés par l’officier "Besson", gouverneur de Miliana.

Malgré la chute de l'Emir Abdelkader, les Beni Menacer ne se sont pas avoués vaincus face aux assauts de la France, en 1943, tant et si bien qu’ils faillirent tenir en échec le général Bugeaud, Gouverneur général de l'Algérie, tombé dans une embuscade lors d’une importante campagne, avant de se retirer à Cherchell, selon les historiens.

Après deux mois de siège et de combats acharnés, les militaires français franchirent les monts Menacer le 25 février 1943. Ils arrêtèrent un nombre de chefs de tribus, mais ils rencontrèrent une forte résistance en arrivant à la Zaouia "El Berkani", dont les vaillants défenseurs ont tué 14 militaires français.

Après la prise de ce dernier bastion des Beni Menacer, les autorités coloniales décidèrent la déportation des membres de la famille El Berkani et des éléments de la résistance vers l’ile Sainte-Marguerite, du sud de la France.



Malek El Berkani, un second souffle pour la résistance



En dépit de "la politique de pacification" à la française, basée sur l’appauvrissement des populations, le déni de leur identité et la politique d’évangélisation, tout en détruisant les mosquées et les Zaouias, l’esprit de la résistance populaire demeura en veilleuse chez la population durant 40 ans, avant de renaître totalement avec le retour de Malek El Berkani (neveu de M’hamed Ben Aissa El Bekani), de France, en 1871, après 14 ans d’exil.

Précédée de la bonne réputation de sa famille, il n’eut aucun mal à lier contact avec des notables et familles de la région (du centre du Ténés, jusqu’à Dahra), pour tenir une réunion, le 14 juillet 1871 à la place de Souk el Had, du centre ville de Menacer, à l’issue de laquelle fut décidée la prise des armes pour mener la résistance.

C'est ainsi qu'une série d’attaques fut menée contre les intérêts français et des sites militaires à Beni Haoua, Beni Milek, Sidi Amar, Sidi Ghiles, Damous, Cherchell, Hammam Righa, et Ain Beniane (ouest d’Alger). Ces attaques ont fait 120 morts dans les rangs français, jusqu’au 25 juillet de la même année, indiquent les historiens.

Outre ses qualités militaires, Malek El Berkani était, également, un fin diplomate. Il envoya une correspondance à la reine de Grande Bretagne lui demandant une aide, en armes, pour combattre le colonialisme.

Il mena, également, de nombreuses batailles à Sidi Semaine, Sidi Ghiles, et El Anasser, dans la région de Bouharb (Manacer), jusqu’à sa mort au champ d’honneur le 2 août 1971, dans une bataille dans la région de Lakouass à Sidi Maàmar.

Les vaillants hommes de Beni Menacer ont transporté sa dépouille jusqu’à la Zaouia de ses ancêtres, ou il fut enterré avec tous les honneurs dus à son rang, au grand dam des autorités coloniales de l’époque, qui ont tenté (en vain) de récupérer son corps, pour couper sa tête et la transporter, en France pour l’exposer au musée de l’Homme, comme ce fut le cas avec de nombreux héros de la résistance nationale.

Les Beni Menacer ont renoué avec la résistance, vers 1901 en attaquant de nombreux sites militaires à Ain Torki, dans la wilaya d’Ain Defla.


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