Algérie

La surprise du chef


On est toujours pris de malaise quand un responsable sembledécouvrir, avec surprise, ce qui est de notoriété publique. Il fallait bienêtre dans une bulle pour croire que le démantèlement tarifaire dans le cadre del'accord d'association avec l'Europe allait voir ses effets se prolongerjusqu'aux prix à la consommation.Cela aura dû être « logiquement » le cas, a dit le chef dugouvernement, regrettant de ne pas trouver de produits ayant pris le chemin dela baisse. « Logique » la réflexion de M. Abdelaziz Belkhadem ? On peut endouter. Trop naïvement mécaniste ? C'est certain. Elle se fonde en effet surdes présupposés, totalement irréels, au sujet de la réalité de l'économienationale.L'un de ces présupposés est de croire que nous disposonsd'un marché ordonné, sérieux, où la régulation existe et fonctionne. Dans cecas, « logiquement » et « mécaniquement », une suppression des taxes sur lesintrants a une incidence assez large pour que le consommateur final en profiteaussi. Sauf que l'on n'a pas ce marché et cette régulation. Et le chef dugouvernement aura beau s'indigner, les exonérations ne pouvaient logiquementprofiter qu'aux importateurs.On serait presque heureux d'apprendre que des entreprisesde production en ont réellement profité pour améliorer un peu leur situationfinancière. Il y a eu, à la veille de l'entrée en vigueur de l'accordd'association, un discours idyllique sur ses bienfaits pour les consommateurs,lesquels étaient franchement sceptiques. Sans être aussi bien informés que lesgouvernants, les Algériens savent que nous n'avons pas une économie de marchémais une économie d'importation et que le démantèlement tarifaire profiteraiten premier lieu, voire uniquement aux importateurs. Si les prix n'ont pasbaissé, c'est que les entreprises algériennes s'accaparent les gains réaliséspar le démantèlement tarifaire au lieu de les répercuter sur les prix,s'indigne le chef du gouvernement.Pouvait-il en être autrement ? Croyait-on vraiment quel'exigence d'un capital social de 20 millions de dinars serait dissuasive pourla caste de l'import-import si puissante en Algérie ? Quand M. Belkhadems'offusque que le prix de la semoule flambe alors que l'Etat continue àsoutenir le blé fourni aux minoteries, on se demande surtout ce que font lespouvoirs publics. Entre minotiers, importateurs et l'OAIC, le circuit n'est pascomplexe pour déterminer où se trouve la triche, si elle existe, et commentelle fonctionne.«Pourquoi augmenter alors que l'Etat n'a pas augmenté ? »n'est absolument pas la bonne question, cela ressemble même à une supplicationpathétique. Dans le cynisme du « marché algérien », ceux qui savent enprofiter, en général les mêmes, rétorqueront: « Pourquoi ne pas augmenter alorsque l'Etat ne fait rien et que nous pouvons faire ce que bon nous semble ? ».Et Ils agissent en conséquence.C'est ce qui fait que les hausses des salaires ont un effetnul sur le pouvoir d'achat. La « main invisible » du marché a peu de place dansun domaine où l'on observe surtout les mains trop visibles de l'affairisme etde la démission.
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)