Ils ont chassé Ben Ali, ils ont eu Ghanouchi. Le premier est un dictateur pro-occidental qui a régné d'une main de fer pendant plus de deux décennies en Tunisie.
Il a fait de Tunis une simple vitrine, une fausse image de prospérité et de modernité tunisiennes qui n'a pas résisté au sursaut d'orgueil de la vraie Tunisie profonde, celle qui n'a pas eu sa part de richesse touristique.
Son ministre du Tourisme, le poumon de l'économie tunisienne, avait trouvé dans la tragédie algérienne son meilleur argument quand il se plaignait que les promoteurs touristiques «nous amalgament avec les pays du sud !» Pas plus que Ben Ali, le second n'est un démocrate de conviction.
Loin de là. C'est au contraire un parfait salafiste qui se revendiquait comme tel lorsqu'il venait en pèlerinage à Alger ou à Tébessa rencontrer les «frères Abassi Madani et Ali Belhadj» durant l'âge d'or du FIS dissous. Pour d'évidentes raisons, il se positionne dans les valeurs démocratiques qui ont conduit ses compatriotes à renverser la dictature de Ben Ali !
Salafiste dans les mosquées, démocrate devant les caméras de télévision occidentales. Ce double langage a été payant pour Ennahda qui a obtenu, avant même d'avoir gouverné, 41,7% de voix, soit 90 sièges sur les 117 que compte l'Assemblée constituante.
C'est un excellent début ! Le choix des Tunisiens apparaît de prime abord comme un acte de confiance aux islamistes qui ont payé, dans les années 1980, le prix fort dans le combat qu'ils ont mené contre un régime pro-occidental, corrompu et farouchement violent. Leur choix se veut aussi un message clair du rejet de «l'alternance» du courant laïc, élitiste ou moderniste, ou le tout à la fois, des gens qui ont eu leur part de «prospérité» sous le régime de Ben Ali dont ils se sont parfaitement accommodés.
Réalité camouflée
Beaucoup de démocrates candidats aux élections de dimanche dernier étaient installés confortablement dans le système Ben Ali. La Tunisie profonde n'était pas dupe ! Elle a tenu à le leur signifier parce qu'ils l'ont ignorée jusque dans ses critères culturels de base. Interdit sous Ben Ali, le hidjab a fait son entrée en force dans la rue Habib-Bourguiba.
Meilleure leçon donnée par Ennahda aux «démocrates» tunisiens : le nombre de femmes élues sur ses listes est majoritaire. L'égalité des sexes sous Bourguiba et Ben Ali aura été une parfaite supercherie. Les puissances occidentales qui ont misé sur le printemps tunisien déchantent quelque part mais font contre mauvaise fortune bon c'ur.
«L'islamisme tunisien est modéré» disent-ils, en gardant tout de même un 'il «vigilant» sur Ghanouchi. Ils ont chassé Moubarak, ils ont eu les «Frères Musulmans». Le premier fut le garant de la «sécurité» d'Israël par l'embargo de Ghaza. Un dictateur pharaonique qui a régné d'une main de fer pendant plus de trois décennies en Egypte.
Les assurances occidentales
Moins intelligent que Ben Ali, il a cru aux assurances des alliés occidentaux qui lui avaient promis l'immunité s'il quittait le pouvoir. Il a eu tort ! Dans un mois, jour pour jour, les islamistes seront au pouvoir, vraisemblablement jusqu'au jugement dernier. Eux, ils sont attentifs à l'Egypte profonde qui vit par millions aux abords des cimetières des grandes villes et à la misère des chiffonniers du Caire qui soutiennent le mouvement Hamas palestinien.
Ce courant fait peur à l'Occident, à Israël et aux élites de Zamalek qui fréquentent Londres en été et Paris toute l'année. Le 27 novembre, ils seront au pouvoir d'où aucun courant politique n'est en mesure de les déloger. L'Occident veut encore croire'
Al Qaïda au pouvoir
Ils ont fait lyncher Kadhafi et ils auront très certainement Al Qaïda. Il sera difficile d'exiger d'Abdelhakim Belhadj, le puissant salafiste qui a libéré Tripoli, de remettre les armes aux nouvelles autorités, à moins que ce ne soit lui et ses partisans ces nouvelles autorités. Aqmi est en train de les ramasser à bout de bras sur les ex-champs de bataille.
Les puissances occidentales qui ont installé le Conseil national de transition au pouvoir en Libye ont reçu une douche froide en entendant Mustapha Abdeljalil annoncer la couleur, une fois la guerre terminée : «Il y aura un Etat islamique en Libye où la loi coranique sera appliquée.»
Au moment de plier bagage, laissant un pays en ruine, la question du pouvoir inquiète l'Otan qui garde là encore un 'il sur la Libye. Parce que la liberté et les droits de l'homme sont moins des principes que des arguments pour satisfaire leurs appétits de puissance, les pays occidentaux se sont toujours trompés de stratégie. Ils ont combattu Najibullah l'homme de l'ancienne URSS en Afghanistan, ils ont eu Oussama Ben Laden. C'est la stratégie du pire.
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Posté Le : 29/10/2011
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Hamid A
Source : www.letempsdz.com