Algérie

LA SAINTETE DE SIDI MHAMMED BENBOUZIANE



Ne devient pas « un saint » qui veut. Selon la tradition, l'homme éligible à la sainteté doit posséder des
prédispositions et des qualités supérieures, exceptionnelles et manifestes qui le différencient de ses congénères.
Ces prédispositions se manifesteraient très tôt dans la vie du saint et ce, par des signes extérieurs prémonitoires
remarquables dans le comportement et dans l'intelligence de l'homme, des qualités analogues à celles des
prophètes. D'aucuns ajouteraient d'autres vertus, aptitudes et valeurs que seuls les soufis savent développer.
Bien évidemment, le milieu d'extraction du saint, souvent nobiliaire et une ascendance qui le ferait remonter
jusqu'au Prophète (QSSL) est un plus dans l'illumination de son aura qui associerait « Le Sharaf et la Sainteté ».
Celle-ci ne se révélerait pas uniquement par la science ésotérique et exotérique (ilm el baatine oua ilm ed-dhahir)
de l'homme, son ascétisme, les bienfaits et la baraka qu'il répand autour de lui, mais par les prodiges et autres
miracles dont il se rend capable devant des difficultés exigeant une solution urgente, voire, face à des épreuves
périlleuses. La vie de Sidi M'hamed aurait été jalonnée de ses prodiges, nous disent ses bio-hagiographes. Nous
pourrions citer ceux des plus saillants que les dits hagiographes se plaisent à souligner. Ainsi, par exemple, pour
la période où le saint était encore étudiant à Fez, pauvre et désargenté, il aurait fait couler à partir de son calame
(plume de roseau) de l'huile pour l'éclairage et qui servait aussi à payer ses études: il fut accusé de magie (voir
supra). Mais c'est à Kénadsa, après l'établissement de sa zaouïa où affluaient des foules de pieux visiteurs que
les miracles du saint homme vont se multiplier. A. COUR nous donne une série de ces miracles page 374 et
suivantes de la Revue du Monde musulman de novembre 1910, faisant référence au fameux manuscrit de «
Taharat Al Anfas ouel Arrouah Al Djesmania fi ettariqa azziyania Ach-chadhoulia» : La purification des esprits et
des pensées charnelles dans la voie de la confrérie des Ziyania-Ach-chadhoulia. Ainsi, notre saint aurait guéri un
cul-de-jatte venu en ziara (quête de bienfaits et de bénédictions) auprès de lui. Il rendit l'ouïe à un sourd et fit parler
un muet. Cela rappelle beaucoup les vertus prophétiques. Sidi M'Hammed aurait été souverainement puissant
surtout contre les pillards, les bandits et autres coupeurs de route.

A. MOUSSAOUI qui abonde dans ce sens, nous dit, rappelant les écrits hagiographiques : « Sa puissance s'est
surtout manifestée dans la réparation des torts. Depuis son lointain ksar saharien, il a veillé sur tous ceux qui l'ont
imploré. Qu'ils soient en route vers la zaouïa ou établis à Kénadsa et ses alentours; qu'ils soient à Tlemcen, Fès,
Meknès ou même du Caire, d'Espagne ou de La Mecque, BEN BOUZIAN était là auprès d'eux quand ils
l'invoquaient...

Les distances importaient peu à ce saint qui pouvait faire traverser à son disciple Abdallah At-Twaty, la distance
du Caire à la Mecque en une heure ou faire voyager un autre disciple, Alhadj Ali El Qortobi, de Tlemcen à la
Mecque, de Médine au Caire ou d'une Île vers Kénadsa en un moins de temps qu'il faut pour le dire. Tous ses
miracles montrent le saint comme un souverain, dominant un espace où il fait la pluie et le beau temps, au sens
propre comme au figuré ». (Thèse précitée p. 44).

Evidemment, nous sommes en plein dans l'extraordinaire. Quand bien même que ce don d'ubiquité qui permet à
notre saint d'être partout en même temps, ici et ailleurs, à des distances inimaginables, en train de secourir des
caravaniers en danger de mort, ou de faire traverser des distances époustouflantes « entre l'Occident et l'Orient »
à des pèlerins en difficulté, ne relèverait que de la légende, force est de constater que cette puissance dissuasive
prodigieuse avait doté la zaouïa de Kénadsa d'un pouvoir fabuleux qui assurera la protection de la ville et des
caravanes. C'est ce qui assoira pour longtemps la réputation de la puissante institution politico-religieuse.

A telle enseigne que les chroniqueurs coloniaux vont qualifier cette zaouïa de: «Compagnie d'Assurance de
Voyages».

En fait, ce serait plus que cela : nous assistons à la naissance d'un véritable «petit Etat» qui va faire date et dont
ses puissants voisins vont en tenir compte et le solliciter dans leurs affaires.

Pour une meilleure compréhension de cette période, il est peut-être nécessaire d'avoir une vison claire sur le contexte géopolitique voire
administratif de la région à cette époque (fin du 16ème s. début du 17ème). Les voisins les plus puissants qui jouxtaient le « territoire » de Kénadsa
étaient sans conteste, d'une part, au nord-est, la Régence Ottomane d'Alger dont le pouvoir s'exerçait sur le nord de l'Algérie et de la Tunisie et
d'autre part, au nord-ouest, le Royaume du Maroc sous la monarchie alaouite, (le Sultan Moulay ISMAIL, était un contemporain de Sidi MHAMMED
BEN BOUZIANE). Comme à l'époque, il n'y avait pas les frontières d'aujourd'hui, l'étendue territoriale d'un pays donné était limitée par les endroits
où s'exerçait réellement son pouvoir, c'est-à-dire sur les villes, les villages et autres agglomérations qu'il pouvait diriger, administrer et contrôler à
partir de sa capitale. Donc, il s'agissait d'un espace sociopolitique à géométrie variable, obéissant aux vicissitudes des guerres et des
arrangements qui en résultaient.

Pour les dirigeants de la Régence ottomane, dont les activités étaient surtout tournées vers la mer, ces régions désertiques étaient trop éloignées,
difficiles d'accès et présentaient de surcroît, trop de risques pour pouvoir les intéresser, d'autant plus que ces « gouverneurs » (Deys et autres
Beys) devaient considérer « qu'il n'y avait pas grand-chose « à gratter » en ces contrées et que donc le jeu ne valait pas la chandelle ». Par contre,
pour le Maroc qui tournait un peu le dos à la mer, le problème était différent puisque ce pays entretenait des rapports commerciaux assidus avec le
« Soudan » et que par conséquent, ses caravanes devaient obligatoirement traverser les grands espaces désertiques. La zaouïa de Kénadsa («
état » indépendant) allait devenir pour ce pays une aubaine et un atout inespéré pour ses affaires commerciales et mêmes administratives. C'est là
que ce rôle kénadsien de « Compagnie d'Assurance de Transports Internationale » va avoir toute sa signification. Nous verrons comment.

Au Maroc, l'Etat est appelé, encore de nos jours, du vocable de « Makhzen», ce qui est un peu l'équivalent chez nous de l'ex et défunt mot
«Beylek». Comme cité plus haut, pour l'époque, la souveraineté du Sultan s'exerçait là où le « Makhzen » avait un réel pouvoir : ce territoire
s'appelait « Ard El Makhzen » (la terre ou territoire du makhzen). Autrement dit, là où existait un semblant d'administration locale dépendant d'un
pouvoir central (Le Sultan). Au-delà de cette limite, c'était « Ard Siba » c'est-à-dire des territoires sans maîtres, en quelque sorte des territoires « en
déshérence » où ne s'exerce aucun pouvoir, cela portait aussi le nom de « Ard El Khaouf », (terre de la peur), ou « Ard El Harb », (terre de la
guerre) c'est-à-dire, là où les conflits armés sont possibles à tout moment.

Sur ces territoires dits « ard siba » ou « Ard el Khaouf », le Maroc puissance avoisinante n'avait aucun pouvoir. D'ailleurs, à ce titre et soit dit en
passant, on se demande par quelle alchimie abracadabrantesque, des partis politiques marocains revendiquent aujourd'hui certaines de ces
régions notamment Kénadsa, Béchar, le Touat - Gourara etc. alors que ces régions à ces époques lointaines, n'appartenaient qu'à elles-mêmes,
c'était pour les Marocains « ard siba ». Consacrées algériennes par la Révolution de Novembre et par le Droit international, elles sont donc à
jamais et officiellement algériennes. Néanmoins, nous continuerons à les désigner par « ard elkhaouf » pour l'époque de « l'institutionnalisation »
de la zaouïa de Kénadsa, établissement politico-religieux (vers 1700). Mais ces territoires n'étaient ni inhabités, ni vides et encore moins en
déshérence. Loin s'en faut. En effet, ces territoires étaient « occupés » par certaines tribus nomades (nous verrons lesquelles) qui se
considéraient chez elles. Elles exerçaient leurs propres lois et n'étaient soumises à aucun pouvoir d'aucune sorte, sauf celui plutôt moral de leurs
chefs respectifs. Elles avaient aussi des égards, du respect envers les cheikhs des zaouïas (Kénadsa, Kerzaz). C'est un peu le même schéma
que l'on retrouverait dans beaucoup de régions du Maghreb de cette époque. Et c'est peut-être ce qui poussa De Gaule à dire qu'ils (les Français)
« ont trouvé une mosaïque de tribus ». Avec les habitants sédentaires des oasis (des paysans pour la plus part), ces tribus avaient généralement
des rapports étroits de « clientélisme » qui consistaient en des clauses de protection contre les dangers extérieurs (razzias notamment). Pour
cette protection, les oasiens devaient payer un « tribut » à leurs protecteurs dont le montant était fixé d'avance. Mais ces tribus « guerrières »,
quand elles ne se faisaient pas la guerre, vivaient relativement en paix selon des conventions et des codes tribaux dont les transgressions étaient
des cas de « casus belli » à l'origine de conflits souvent meurtriers. Pour vivre en paix, et en l'absence de toutes structures étatiques, il fallait à ces
tribus, qu'elles délimitent elles-mêmes les règles de vie applicables à tout le monde et déterminer avec précision les territoires sur lesquels
chacune d'elles était en droit d'évoluer. En fait, ce fut une organisation de survit qui consistait en une adaptation culturelle d'abord au rigueur du
climat et à une adoption d'une économie propre au désert. Trois espaces vitaux entraient pris en considération : d'une part, les oasis qui assuraient
les subsistances en produits agricoles. Les oasis sont en effet des agglomérations humaines fixes, où tout un chacun avait le droit de posséder un
où plusieurs biens à titre individuel (bien Melk) en matière de foncier ou autres, d'autre part, les zones de pacage ou terrains de parcours où l'on
faisait paître les bêtes, associées à des zones d'épandage des oueds sur lesquels se pratiquait une agriculture saisonnière de céréales surtout :
ces terres d'épandages des crues d'oueds étaient considérées comme des biens « Arch » et avaient donc un caractère de biens indivis. A la
naissance de Kénadsa, qui va devenir un « ksar phare » dans la région Béchar - Saoura, les principales tribus nomades qui évoluaient sur cette
aire géographique sont au nombre de quatre. Les Ouled Djérir qui vivaient (et y vivent encore) à Béchar pour la majorité, avaient leurs zones de
pacage au nord de Béchar (Oum Chegag), à l'est, à Ben Zireg vers Béni-Ounif, à Oued Ennamous et à Zouzfana. Ils pratiquaient également la
transhumance sur le Djebel Grouz (nord-est de Béchar). Ils avaient leurs zones céréalières sur les épandages de Oued Zouzfana. Au sud-ouest
de Béchar, vivait la tribu des Doui Ménia, de loin la plus importante tribu en nombre. Les membres de cette tribu ont pour « capitale » traditionnelle
Abadla où bon nombre vit toujours. Ils avaient pour zone de pacage toute la vallée du Guir, où ils pratiquaient également l'agriculture des céréales
sur les abords de cet oued que nous avons vu très important. Mais les zones géographiques « économiques » et de « déplacement » des Doui
Ménia sont loin de se limiter aux seules zones que nous venons de citer. On peut dire qu'ils n'avaient pratiquement aucune de limites précises
dans leur espace d'évolution. On les retrouvent d'ailleurs majoritaires à Kénadsa où le Arch des Ouled Bel Guiz a fait souche de vieille date. Ils
avaient des rapports commerciaux et des échanges étroits avec les métropoles sahariennes de l'époque. Ils allaient commercer très loin vers
l'Ouest au pays des Réguibat, l'actuel Sahara occidental, et aussi avec le sud du Maroc, surtout avec le Tafilalet. Pour mettre en exergue
l'importance de leur nombre, les Doui Menia se définissent par cette formule numérique obscure : « nous sommes 5 X 5 et le 1/6ème c'est Ouled
Djérir ». Entendent-ils par là qu'ils sont 5 archs que multiplient 5 soit au total 25 archs et que les Ouled Djérir ne représenteraient que le 1/6 de 25 ?


Si ces informations ont quelques intérêts, elles nous donnent au moins une idée de la composante humaine de la région, à la proximité immédiate
de la zaouïa naissante de Kénadsa, car ces tribus vont être à la fois ses approvisionneurs, ses défenseurs et son « bras séculier » à l'occasion.
Les Doui Ménia et les Ouled Djérir, malgré les disproportions de leurs nombres, ont toujours vécu en parfaite intelligence et entretenu des rapports
de bon voisinage, de fraternité, voire d'alliance par la voie des mariages. En fait, ils avaient conclu de tout temps un pacte confédératif
d'auto-défense. Et on peut dire que, de mémoire d'homme, jamais il n'y eut de guerre entre eux. Néanmoins, une quelque opinion tenace leur prête
« certaines rivalités traditionnelles » souvent exagérées, voire malveillantes. Plus tard, pour faire face à la colonisation, ces deux tribus vont
conclure le fameux pacte donnant naissance à la confédération dite « ZEGHDOU » du nom d'un petit ksar près du Draa, en territoire algérien où ce
pacte fut conclu, et ce, avec une troisième tribu celle des Béni-Guil, que l'on dit aussi importants en nombre que celles des Doui Menia. Les
Béni-Guil vivent sur les confins de l'Atlas saharien. Ainsi, au hasard du tracé de la frontière algéro-marocaine, ils se sont retrouvés du côté
marocain et sont donc devenus marocains. Peut-être que si leur avis avait été sollicité, ils seraient actuellement algériens ! La quatrième tribu qui
nous intéresse est celle des Renanma ou Ghenanma. Les Ghannamis ont toujours vécu dans la vallée de la Saoura à partir de Béni-Abbès jusqu'à
Talmine à la frontière de l'actuelle wilaya d'Adrar. Ils auraient eu pour capitale traditionnelle El-Ouata, entre Béni-Abbès et Kerzaz.

La ville de Kénadsa va exercer un pouvoir spirituel et moral sans partage sur ces grands espaces. Le développement du commerce caravanier
dans le sens nord-sud et sud-nord, va permettre à la ville de prendre de l'extension et vivre une prospérité inégalée dans le Sahara de l'ouest. Le
Cheikh de la zaouïa va exercer petit à petit un pouvoir bicéphale : spirituel et civil. Quoique ne possédant pas d'armée, le puissant pouvoir « de
malédiction » de la zaouïa était très craint par les écumeurs de routes, qui pouvaient être « atteints dans leur chair, dans leurs biens, dans leurs
familles et leurs enfants là où ils se trouvent, s'ils osaient s'attaquer à une caravane accompagnée par un guide de la zaouïa, qui souvent était
porteur d'un sauf-conduit portant le sceau du Cheikh. Donc la bienfaisance de la baraka du Cheikh Sidi Mhamed Ben Bouziane était recherchée et
sollicitée. Par contre, sa malédiction et le pouvoir de ses imprécations étaient très craints et exerçaient un pouvoir dissuasif et de l'effroi. Ce
pouvoir-là, remplaçait toutes les armées du monde. Petit à petit, le Cheikh de Kénadsa était devenu « un prince régnant » et ce, subrepticement,
sommes-nous tentés de dire. Le pouvoir théologique était doublé désormais d'un pouvoir séculier. Ce qui, d'ailleurs, était inévitable dans la mesure
où la ville avait une population importante qui exigeait une certaine gestion. Les habitants de Kénadsa, devenus « sujets », se sont habitués
naturellement au pouvoir de leur cheikh qui prendra le titre de « SAYED » (Seigneur) : un protocole des réceptions fut institué, une organisation des
festivités publiques aussi. On institua le cérémonial de la « JALALA ». Ce cérémonial consistait à chaque apparition publique du SAYED de
l'accompagner par un coeur répétant à haute voie la formule : « Allah al Aziz ya Rabbi » (Dieu le Bien-aimé ô Monseigneur). On ne pouvait plus
s'approcher normalement « du prince » sans une raison très valable. Il faut se faire annoncer et attendre d'être reçu en ayant de bons motifs pour
l'entrevue. Sur le plan de la vie civile, le Cheikh administrait la cité. Un pouvoir judiciaire est instauré. Le Sayed rendait la justice à travers les cadis
qu'il nommait officiellement et faisait exécuter les sentences rendues par lesdits magistrats. En cas de divergences d'interprétation du droit
musulman, les oulémas de la ville étaient consultés. Ils se concertaient pour décréter la fatwa idoine qui devenait, dès lors, applicable et que
personne ne contestait. Ces savants étaient nombreux du fait que Kénadsa abritait une « université » théologique à l'instar de celles de Fez et de
Tunis, mais à une échelle plus réduite. D'ailleurs, il était de coutume kénadsienne, que les étudiants qui désiraient parfaire leurs études se
dirigeaient traditionnellement vers ces deux villes maghrébines précitées.

Nous avons vu que le Cheikh n'avait pas d'armée ni de police. Cependant, en cas de menace imminente sur Kénadsa, le Cheikh faisait
promptement appel aux tribus citées plus haut qui se mettaient immédiatement à son service et sur le pied de guerre, notamment la tribu des Doui
Mania, dont nous avons vu plus haut qu'elle disposait de tout un « arch » sur place, à Kénadsa même : les Ouled Bel Guiz. En cas de grand
danger, Abdadla est alertée et les Ouled Djérir de Béchar à quelques encablures de Kénadsa, l'étaient aussi. Ceci était quand même assez rare.
Car, non seulement que les éventuels agresseurs étaient dissuadés par ces « forces » que le Cheikh pouvait mobiliser très rapidement, mais sa
seule force spirituelle constituait une arme « de destruction massive » et donc de dissuasion. Cependant, il est vrai que certains cheikhs de la
lignée, s'étaient dotés d'une petite garde « prétorienne » composée essentiellement de leurs esclaves personnels. Mais c'était plus une garde de
cérémonie qu'autre chose. Ses « agents » servaient surtout d'ordonnance et de domestique au cheikh. Cependant, certains avaient de réelles
fonctions. Ainsi, s'il arrivait que le « prince » veuille convoquer quelqu'un, c'est à l'un de ces « gardes » qu'il ordonne d'aller le chercher. Si
l'interpellé s'avère récalcitrant, le cheikh envoie deux, trois, quatre esclaves pour le faire venir de force. La « contrainte par corps », les
emprisonnements pour divers larcins ou délits étaient également pratiqués.

La tradition nous dit que Kénadsa a connu son apogée sous le règne de l'EMIR Cheikh ABI MADYAN , (1825-1852). Son prestige, sa notoriété,
l'étendue et la quantité de ses propriétés, de ses biens matériels, la dynamique de ses représentations dans tout le Maghreb, au Moyen-Orient et
même dans les pays dits du « Soudan » (Afrique subsaharienne), ont fait de lui une véritable puissance. Evidemment, cette grande notoriété finit
par faire ombrage au Sultan du Maroc, qui ne tarda pas à le faire savoir à Kénadsa. Aussitôt, le Cheikh de Kénadsa, sentant la menace qui pesait
sur son petit empire, dépêcha auprès du souverain marocain, une délégation en ambassade, composée de notables de la ville, avec des présents
de valeur et une lettre où le Cheikh faisait don au Sultan, d'une partie importante de ses propriétés se trouvant dans le sud du Maroc. Ce «
somptueux cadeau » inattendu et la courtoisie de « l'ambassade kénadsienne » calma les appréhensions du alaouite, qui s'aperçut que « Le
Prince de Kénadsa » était plus préoccupé par « les transactions commerciales » que par des velléités de pouvoir hégémonique ». Les bons
rapports qui ont existé entre Kénadsa et la monarchie alaouite ont fait de Kénadsa un partenaire de choix dans les affaires d'Etat. Ainsi, le
souverain marocain sollicitait-il les cheikhs de Kénadsa pour intervenir dans les conflits qui éclataient entre les tribus de l'Atlas pour agir et trouver
des solutions de paix. Ainsi, Kénadsa continua à prospérer et à faire des affaires avec ses voisins et affiliés jusqu'à l'arrivée des Français, qui vont
mettre fin à un établissement humain des plus originaux dans une région désertique réputée pour être des plus hostiles. Cet équilibre de plusieurs
siècles entre la nature et les hommes va être rompu de façon brutale.



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