Le culte excessif de la personnalité peut conduire à de dangereuses dérives quand il est associé au fait sacré. L'exercice devenu un référent politique et idéologique des partis et personnalités choque de plus en plus les Algériens. L'embarras, poussé jusqu'à la caricature et à la mise en scène, affiché devant les journalistes par le secrétaire général du Fln lors de sa dernière conférence de presse à une question sur le fait de savoir s'il a des ambitions présidentielles, déplace le débat public du champ politique vers quelque chose qui relève de l'idolâtrie et de la mystique religieuse.Dans un geste de quête miséricordieuse, le patron du Fln, Djamel Ould Abbès, désarçonné par «l'impertinence» de la presse, n'a trouvé d'autre salut pour se sortir de ce mauvais pas que de se tourner machinalement vers le portrait du président Bouteflika pour invoquer son pardon pour l'intention qui lui est prêtée d'être calife à la place du calife.
Pour le personnel politique du sérail d'une manière générale, et pour les personnalités du cercle présidentiel de façon plus particulière, se positionner pour la course à la prochaine présidentielle alors que la question de la candidature de Bouteflika pour un 5e mandat n'est pas tranchée relève tout bonnement de l'hérésie. Cela est perçu comme un acte d'insubordination, de trahison, assimilé à une posture blasphématoire passible des pires châtiments.
Contrairement à son partenaire du Fln dans l'alliance présidentielle qui ne s'imagine, même pas en rêve, trôner sur le fauteuil présidentiel à la place de Bouteflika, le patron du Rnd (Rassemblement national démocratique), en fin politique, se garde bien, pour sa part, de jurer «fontaine, je ne boirai pas de ton eau», mais prend l'engagement de ne pas faire ombrage à Bouteflika si celui-ci décide de rempiler pour un nouveau bail.
Ce genre de discours nous rappelle étrangement la liturgie du parti du Fis dissous qui martelait que la démocratie est «kofr» et que voter contre cette formation équivaut à un acte d'apostasie. Quand la messe est ainsi dite en s'appuyant sur la foi et la spiritualité des gens dans une société où le relent du conservatisme religieux est toujours aussi prégnant, ou encore sur l'allégeance à un homme sublimé, hissé au rang de messie et de dernier prophète au point de ne pas concevoir de successeur à Bouteflika, on appelle à l'automutilation collective, on favorise la «déconscientisation» politique de la société.
Le taux d'abstention record enregistré aux différents scrutins de ces dernières années est une réponse citoyenne aux faux prêcheurs de tout poil qui éprouvent beaucoup de peine à mobiliser au-delà de leurs chapelles. Les régimes théocratiques assumés en tant que tels ou de culture et de sensibilité fondées sur un mode de gouvernance proche du califat où le chef incarne un pouvoir autocratique de droit quasi divin doivent se résoudre à l'idée, dans le monde globalisé d'aujourd'hui, que le respect de la souveraineté du peuple est un prérequis non négociable pour la stabilité des nations.
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Posté Le : 05/02/2018
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Omar Berbiche
Source : www.elwatan.com