Algérie

La rue réinvente un modèle de mobilisation



La rue ne décolère pas. Ce troisième vendredi de mobilisation confirme l'ampleur d'une mobilisation d'un genre nouveau. Ni partis politiques, ni organisations de masse n'en sont à l'origine. Les milliers de personnes qui rejettent en bloc la candidature du Président en exercice réinventent un nouveau modèle de mobilisation citoyenne qui casse les codes.Nawal Imès - Alger (Le Soir) - Depuis le début de la mobilisation contre le cinquième mandat, une seule question : qui est derrière ce mouvement populaire ' Les vieux réflexes sont aussitôt convoqués pour désigner la main de l'étranger et les ennemis de l'Algérie, dans une tentative de discréditer une dynamique inédite. Il est vrai que pour arriver à convaincre des milliers de personnes à sortir dans la rue, les partis politiques et les organisations de masse sont les plus rodés à l'exercice. Ils disposent d'un réservoir de militants, de sympathisants, de réseaux mais également de moyens financiers conséquents.
Leurs appels sont alors plus ou moins entendus, leur démarche beaucoup plus structurée. Ce qui se passe depuis bientôt un mois ne correspond pas du tout à ce schéma traditionnel. Nul ne peut aujourd'hui prétendre être à l'origine du mouvement. Pas d'appel signé, pas de communiqué ni de communication à l'ancienne. La mobilisation en cours sort des traditionnels sentiers battus. Les réseaux sociaux lui sont d'un apport certain.
Plusieurs pages ont vu le jour. Sans pour autant se revendiquer comme instigateurs, leurs administrateurs relayent en boucle des informations, partagent des vidéos en temps réel. Ces dernières deviennent virales et sont vues par des millions d'internautes.
De partage en partage, l'information circule loin des circuits classiques. Quel rôle jouent pour le moment les partis politiques et autres organisations de masse ' Aucun ! Ils étaient quelques leaders de partis politiques à être présents aux marches organisées ces dernières semaines. Souvent, disent-ils, en qualité de «citoyen». Ils ont pu constater l'ampleur du ras-le-bol populaire puisque l'accueil qui leur avait été réservé était loin d'être chaleureux.
Beaucoup ont d'ailleurs été contraints de quitter précipitamment les lieux pour se soustraire à la colère des manifestants. Que leur reste-t-il donc à faire ' Soutenir un mouvement qui échappe totalement à leur contrôle. Hormis les partis qui ont fait allégeance au Président-candidat, l'opposition se dit aux côtés des marées humaines mais semble pour le moment incapable de trouver les mécanismes appropriés pour accompagner le mouvement. Pourtant à moyen et long terme, toute contestation à aussi large échelle devra trouver le chemin vers une meilleure structuration. Laquelle ' Pour l'heure, nul n'est en mesure de l'affirmer. Réunis jeudi, plusieurs leaders de l'opposition en étaient encore à se questionner sur le meilleur moyen de rentabiliser et de maintenir la dynamique populaire. Des questions restées sans réponses à l'issue de ladite rencontre.
Les partis acquis au Président en exercice et tous ceux qui gravitent autour sont également dans une mauvaise posture. Impossible pour eux de soutenir un mouvement qui menace leurs acquis, il ne leur reste que très peu d'alternatives. Les manifestants ont clairement identifié le FLN comme le symbole d'un système moribond, mais il n'est pas le seul parti à provoquer le même sentiment de ras-le-bol.
Le personnel politique, vieillissant et incapable d'écouter une rue déterminée, est devenu persona non grata. La rue réclame du changement.
Son appel sera-t-il entendu, provoquant une recomposition du champ politique ' Seul l'avenir proche est en mesure d'apporter des réponses qui seront certainement déterminantes.
N. I.


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