Algérie

La révolution de mon père 18e partie


La révolution de mon père 18e partie
Résumé : J'avais honte de moi. Mes frères affrontaient l'ennemi et se livraient aux balles, et moi j'étais là à ne rien faire. Je demande à Fatiha si elle avait une arme. Elle me répondit que je devrais m'occuper des blessés, comme on me l'avait demandé. L'un d'entre eux nous avait sûrement entendus, car il m'interpella.Fatiha me pousse :
-Va voir ce qu'il veut...
-Heu... je... oui... je vais voir...
Je m'approche de l'homme et
m'agenouille auprès de lui dans la pénombre :
-Oui, mon frère... tu as besoin de quelque chose '
Il tendit son bras valide et me tint par l'épaule :
-Je t'entendais parler jeune homme. J'ai surpris quelques bribes de ta conversation... Tu es très courageux... Mais te jeter ainsi en pâture à l'ennemi n'est pas une bonne chose. écoute...
Il tente de s'asseoir, et y parvint difficilement.
-Lorsque j'avais ton âge, la guerre était encore loin. J'étais un jeune homme plein de vie, et j'avais un tas d'ambitions. Mais juste après la Seconde Guerre mondiale, je me rendis compte que si la France restait chez nous, nous n'irions pas loin. Après les événements du 8 mai 1945, beaucoup d'Algériens ont compris que s'ils ne bougeaient pas, ils allaient rater l'indépendance.
C'est ainsi que beaucoup d'hommes de ma génération décidèrent de se rallier à la cause armée. Seulement, il faut comprendre une chose mon fils : ce n'est pas uniquement par les armes qu'on combat l'ennemi... Toi tu viens d'arriver, et on t'a tout de suite initié aux soins médicaux... Une noble mission pour un débutant... Mais si tu t'entêtes à vouloir porter tout de suite une arme et à rejoindre le front, tu ne seras pas utile trop longtemps... Tu risques d'y laisser la vie et de nous abandonner aussi... Nous avons tous besoin de ton aide Boualem... D'autres blessés ne tarderont pas à arriver... Tu vois bien que la guerre n'est pas clémente, et qu'à chaque minute on risque de passer de vie à trépas. Sois donc courageux et prend ta mission à c'ur... Tôt ou tard, tu seras obligé de prendre les armes et de rejoindre les autres. Mais en attendant, tu dois respecter les consignes de Si Ahmed et attendre le retour de nos camarades.
Je garde le silence. L'homme disait vrai. Son bras gauche saignait et je dus changer son pansement. Il se rallonge et je m'éloigne un peu de lui. Fatiha était occupée à découper des bandages et à les enrouler :
-Viens m'aider... Nous aurons sûrement besoin de tout ça dans un moment... Les blessés vont affluer, et nous ferions mieux de nous préparer.
Elle avait vu juste. Quelques heures plus tard, nos camarades revinrent... Enfin pas tous... On déplorait trois morts... Les blessés étaient au nombre de huit. Les uns avaient reçu plusieurs balles, et on avait dû les transporter sur des civières de fortune, d'autres avaient préféré prendre leur courage à deux mains et remontèrent jusqu'au mont en s'aidant d'un bâton, ou en s'appuyant sur des épaules charitables.
Si Ahmed, à peine remonté, se débarrasse de son arme et de ses vêtements pour revêtir sa blouse et s'occuper des blessés. Il fut content de revoir Fatiha, et encore plus heureux de constater qu'elle avait pu ramener des médicaments, et que tout était déjà prêt pour le traitement des blessés.
Je retrousse mes manches et rallume le feu. Les djounoud s'affalèrent sur le sol et s'emparèrent des outres d'eau ou des cruches... Tout le monde était en nage.
Fatiha me demande de seconder Si Ahmed, ce que je compris en la voyant se lever pour aller s'occuper des autres.
Elle distribue des morceaux de galette et des olives, puis fait passer le bocal de petit-lait.
On devait économiser au maximum les vivres... Une consigne qu'on se répétait à tout bout de champ.
Elle revint enfin vers nous. Si Ahmed découpait, nettoyait, passait ses doigts dans les blessures pour extraire les balles, avant de me tendre le fil pour suturer les blessures ou les pansements pour couvrir les plaies.
Je travaillais sans relâche. La sueur avait inondé mon corps. Je me rendis compte avec une joie démesurée que mes mains ne tremblaient plus, et que la confiance revenait en moi. Mes gestes étaient sûrs et précis, et je pouvais me vanter de reconnaître déjà une blessure infectée de celle qui ne l'est pas.
Nous avons travaillé toute la nuit. Les blessés ne pouvaient même pas crier. Rien ne devrait attirer l'attention de l'ennemi sur nous. L'attaque avait été prompte, mais comme on l'attendait, on avait pu y répondre avec autant de promptitude. Da Belaïd se reposait. Il avait le teint blafard et le regard vide. Amar était triste. Trois morts... Trois vaillants soldats...
(À suivre)
Y. H.
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