Publié le 01.02.2024 dans le Quotidien d’Oran
par Brahim Lakhlef*
La politique de relance économique repose sur des mesures qui visent à redynamiser la production, à relancer l'investissement notamment les investissements financés sur fonds publics. Ce plan repose sur des mesures budgétaires et juridiques pour, d'une part, financer la relance économique et, d'autre part, de lever les obstacles qui bloquent l'évolution de l'activité économique.
L'objectif fondamental est de relancer la croissance, favoriser le dynamisme des entreprises, créer des emplois et relancer la demande. La relance économique repose essentiellement sur cinq conditions incontournables et déterminantes :
- une volonté politique et le choix d'une option de relance économique
- l'existence d'un programme d'action et de projet avec des objectifs mesurables
- des moyens, notamment financiers
- des entreprises compétitives
- un climat des affaires approprié
Dans tout modèle de relance économique, l'entreprise, par son rôle prépondérant dans la réalisation des objectifs, est au centre de toutes les préoccupations.
L'entreprise est un facteur stratégique et essentiel dans l'évolution d'une économie. De ce fait, elle est un instrument inévitable pour toute politique économique d'une nation. Elle participe d'une manière déterminante à la croissance, à la création d'emplois et à la production des richesses d'un pays.
Elle est le résultat de la combinaison de plusieurs facteurs : l'activité, les moyens (notamment les ressources financières et les ressources humaines), le marché, l'organisation choisie, la stratégie retenue et le profil du dirigeant.
En effet, l'entreprise emploie une main-d'œuvre, consomme des matières premières et intermédiaires, produit, crée de la valeur ajoutée, paye ses impôts et innove. Elle est le moteur de la croissance et le principal créateur d'emplois.
C'est pour cette raison que la réussite d'un plan de relance dépend essentiellement du dynamisme, de la compétitivité des entreprises et de leur santé financière.
Le climat des affaires est très sensible aux mesures gouvernementales et peut contribuer au dynamisme des entreprises comme il peut constituer un facteur de blocage, de contre-performances et d'étouffement de toute initiative innovante.
Les interactions entre la politique économique d'un pays et l'activité des entreprises sont nombreuses et peuvent agir positivement ou négativement sur leur évolution réciproque.
C'est pourquoi, la qualité managériale d'une entreprise et la qualité de la gouvernance d'un pays sont intimement liées. La cohérence et la complémentarité entre ces deux facteurs conduisent à la concrétisation d'un double objectif :
1. l'entreprise agit dans un environnement favorable, elle produit, crée des emplois, investit et s'acquitte de ses obligations envers l'administration, notamment en matière de fiscalité. L'entreprise est rentable, elle concrétise ainsi ses objectifs d'amélioration des résultats;
2. l'économie du pays se porte bien, le chômage baisse, la croissance et le niveau de vie s'améliorent, les recettes de l'Etat augmentent, la paix sociale est assurée, le gouvernement a atteint ses objectifs les plus nobles.
Il est donc évident que la santé des entreprises est déterminante dans la réussite d'un plan de relance économique. Quelles sont les mesures nécessaires pour aider les entreprises en difficulté, corriger leur dysfonctionnement et rendre leur participation positive dans un plan de relance ?
Une entreprise en difficulté est une entreprise qui est confrontée durant son cycle d'exploitation à des contraintes, à des obstacles, à des complications de différentes natures et causes, à des dysfonctionnements dans les principales fonctions. Ces difficultés peuvent, si elles ne sont pas traitées à temps, conduire vers une défaillance et remettent en cause la pérennité de l'entreprise.
Les difficultés que rencontrent les entreprises ont deux origines principales :
Les difficultés endogènes dont l'origine est principalement interne. Des insuffisances sont identifiées dans la qualité de la gestion de l'entreprise, des erreurs dans les choix stratégiques, une organisation inadaptée et coûteuse, un déficit en compétences managériales. Dans ce cas, la recherche et l'analyse des causes se font sur le plan microéconomique par fonction : stratégie, production, finances, marketing, vente, ressources humaines, traitement de l'information...
Les causes externes (exogènes) sont liées à l'environnement, au marché, aux politiques économiques du pays, à la réglementation. Ce sont des causes induites par le contexte macroéconomique.
Plusieurs définitions «d'entreprise en difficulté» privilégient l'aspect financier en assimilant une entreprise en difficulté à une entreprise ayant un déséquilibre de trésorerie. Un dysfonctionnement qui ne lui permet pas de faire face à ses engagements à court et moyen terme.
Mais cette définition, bien qu'elle décrive une situation tout à fait probable, elle demeure néanmoins, insuffisante, car il arrive souvent que les difficultés de trésorerie soient une conséquence et non la cause principale ayant conduit l'entreprise à des carences dans son fonctionnement, dans son activité, perdant ainsi sa capacité à faire face à ses obligations.
Des chercheurs en la matière nous livrent des approches qui élargissent la notion de « difficultés d'entreprise » à un ensemble de facteurs inhérents à la gestion d'une entreprise et confirment, par conséquent, que le déséquilibre en trésorerie n'est pas l'unique cause de difficulté d'une entreprise.
Les difficultés peuvent également naître d'une baisse de rentabilité, qui peut s'expliquer par diverses causes : rendement insuffisant, charges importantes, baisse d'activité, désorganisation, incompétences, erreurs dans les choix stratégiques, conflits...
En général, les difficultés aux conséquences mortelles sont liées à la trésorerie, aux clients insolvables, aux surcoûts, à un management défaillant, à un recrutement peu percutant, à une stratégie inadéquate, à un plan marketing en décalage avec la réalité, à des produits qui ne répondent pas aux normes de qualité et de prix, au peu de considération accordée à la nature des besoins du client, à un réseau de distribution défectueux...
Les entreprises algériennes se caractérisent, depuis longtemps, par une série de grandes difficultés. Nous citons, ici, les plus importantes : un management défaillant, des problèmes financiers, une faiblesse de la productivité, une absence de main-d'œuvre qualifiée, un non-respect des délais, des coûts et de la qualité, une absence d'innovation. Comparativement aux grandes entreprises, les petites entreprises (c'est le cas, selon une enquête de l'ONS, de 95% des entreprises algériennes) n'ont pas les mêmes moyens en termes d'organisation, d'équipements, de compétences, de finances, de ressources humaines et d'outils de gestion.
Il est donc évident que la capacité à réagir des petites et moyennes entreprises face aux difficultés est limitée.
Les PME en difficulté doivent avoir la primauté dans toute politique de soutien et d'aide aux entreprises en difficulté. Dans tous les systèmes économiques, la PME est considérée comme le « moteur de la croissance ».
Pour être rentable et dégager un résultat, il y a des conditions qui viennent s'ajouter à un plan marketing performant (sur les plans prix, produit, distribution et communication), la maîtrise des coûts, la réduction des frais généraux, le suivi des salaires, le choix d'un personnel qualifié, toutes ces conditions jouent un rôle dans la réussite de l'entreprise et contribuent par conséquent à améliorer ou à réduire la rentabilité.
Les causes peuvent trouver leur origine dans les choix stratégiques, dans le mode de gestion ou dans le modèle d'organisation, dans la gestion financière et des ressources d'une manière générale (ressources humaines, moyens de production, stocks), ou dans la nature des équipements et des techniques utilisées, dans la situation économique et sociale, dans les caractéristiques du marché (forte agressivité de la concurrence, nouveaux produits, produits de substitution...).
C'est pour toutes ces raisons qu'un plan de sortie de crise comportant des mesures correctives est nécessaire. La réussite de ce plan est conditionnée par un soutien de l'Etat.
La confection d'un plan de sortie de crise est urgente et incontournable. Le but est de redresser l'activité, de rendre l'entreprise compétitive, de doter l'entreprise d'une trésorerie suffisante pour préserver sa rentabilité et ses résultats. Ces mesures nécessitent donc une réadaptation de l'entreprise à son environnement, à son marché, à son activité, une réaffectation des moyens selon les objectifs ciblés.
Pour arrêter un plan de sortie de crise, les dirigeants d'entreprise doivent suivre une démarche cohérente comprenant quatre aspects : un diagnostic, la définition d'une stratégie de sortie de crise, la définition d'objectifs stratégiques et d'objectifs opérationnels, l'élaboration d'un tableau de bord comprenant des indicateurs pour pouvoir suivre la concrétisation des objectifs, évaluer les résultats et tirer les enseignements nécessaires.
- Le diagnostic concernera la structure financière de l'entreprise, la fonction commerciale, la production et les moyens utilisés, les ressources humaines. Un diagnostic de l'organisation est également utile et peut contribuer à expliquer les contre-performances de l'entreprise.
- La définition d'une stratégie est primordiale dans tout plan de sortie de crise. Une fois les difficultés identifiées, les causes déterminées avec précision, les dirigeants doivent décider des mesures à prendre à tous les niveaux de l'organisation pour corriger les dysfonctionnements constatés et faire éviter à l'entreprise d'autres contraintes. Les options retenues dépendent des données internes à l'entreprise (ses forces, ses faiblesses) et des données externes liées aux caractéristiques du marché et aux contraintes et opportunités offertes par l'environnement.
- La définition des objectifs stratégiques repose sur la vision à moyen et long terme retenue par les dirigeants d'entreprise.
- La définition des objectifs opérationnels. Les objectifs stratégiques sont déclinés en objectifs opérationnels par fonction et degré de responsabilité en tenant compte des caractéristiques du marché, de la satisfaction du client, de la qualité du produit.
- La confection d'un tableau de bord avec des indicateurs qui permettent un suivi rigoureux et une évaluation objective et réelle.
La concrétisation de ces objectifs est conditionnée par une maîtrise des coûts, des délais de livraison, de transformation, la réduction, voire la disparition du gaspillage des ressources, une bonne gestion des aspects financiers et posséder une organisation assez flexible apte à s'adapter aux différentes contraintes et évolutions.
Le dirigeant d'entreprise est en permanence en situation d'apprentissage, car la vie de l'entreprise, la nature du marché, l'évolution des besoins du client, le progrès technique, la gestion et la motivation du personnel... Tous ces facteurs exigent d'un dirigeant d'être attentif, d'apprendre et de réunir les outils qui lui facilitent l'analyse et la compréhension des faits et des événements et de pouvoir réagir et s'adapter rapidement.
La performance d'une entreprise ne s'acquiert pas par hasard. Elle est le résultat d'une organisation performante, d'une direction compétente, capable d'anticiper, d'innover, de réagir rapidement, d'évaluer et d'améliorer constamment ses résultats. L'entreprise performante est le produit d'une stratégie mûrement réfléchie, de la présence d'un personnel qualifié, d'un savoir-faire et d'un savoir-agir. La persévérance dans cette option de performance renforcera inévitablement la pérennité de l'entreprise.
Une entreprise pérenne est une entreprise qui réussit, grâce à une gestion remarquable à être présente sur le marché, à préserver sa rentabilité et sa part de marché, voire à les améliorer en permanence, solvable et contrôlant ses coûts. Son avantage concurrentiel lui permet d'être compétitive.
Dans une entreprise compétitive et rentable, le choix des compétences et la gestion des ressources humaines et leur développement sont des facteurs incontournables sur lesquels la direction s'appuie pour concrétiser ses options stratégiques.
*Auteur de trois ouvrages relatifs à la gestion des entreprises : 1) La gestion d'une entreprise en difficulté (les éditions El-Djazaïria 2017), 2) Plan d'urgence pour une entreprise en difficulté 2021 3) Le tableau de bord d'entreprise, les éditions Baghdadi, 2018.
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Posté Le : 24/02/2024
Posté par : rachids