Algérie

La purge politique commence étrangement par les milieux d'affaires



"Cette évolution, si elle se confirme au fil des semaines, devra renforcer l'attentisme des investisseurs étrangers", estime l'organisme français.Sous la pression toujours forte des manifestations de rue et des demandes du peuple algérien pour une transformation radicale du régime politique, les événements s'accélèrent en Algérie, mais prennent aussi une tournure inattendue et probablement préoccupante. C'est ce qu'a relevé le groupe bancaire Crédit Agricole dans le dernier numéro de Perspectives, publié avant-hier sous le titre "Algérie : la purge ?politique' commence étrangement par les milieux d'affaires". Le groupe bancaire français indique qu'"après la démission du Premier ministre Ouyahia en mars, celle du président Bouteflika début avril, la pression reste forte sur le président de l'Assemblée nationale, et sur la question du report de la date de l'élection présidentielle toujours prévue début juillet". Par ailleurs, ajoute le Crédit Agricole, "en quelques jours, les milieux d'affaires qui ont le plus profité des années Bouteflika se sont retrouvés dans la tourmente de ce qui semble être une opération anti-corruption". La liste des hommes d'affaires emprisonnés s'allonge, citant, entre autres, Ali Haddad (BTP), les frères Kouninef (KouGC, équipement), Issad Rebrab (Cevital, industrie), à laquelle il faut ajouter le limogeage d'Ould Kaddour, le patron de Sonatrach. Si certains ont bénéficié des marchés publics attribués par clientélisme, "cela ne semble pas être le cas de tous", estime le groupe bancaire français. Pour ce dernier, "cette évolution, si elle se confirme au fil des semaines, devra renforcer l'attentisme des investisseurs étrangers". Effectivement, au titre de la loi 49/51, ces derniers doivent trouver un partenaire local détenteur majoritaire à 51% de la filiale algérienne. "C'est donc un signe assez défavorable qui est adressé aux milieux des affaires à un moment où l'Algérie a tant besoin de capitaux domestiques ou extérieurs pour assurer une transition de l'économie vers plus de diversification et de développement de l'entreprise privée", estime le groupe bancaire français, qui évoque également, dans la même publication, l'accélération de la chute des réserves en devises. "Fin 2018, les réserves en devises de l'Algérie sont tombées à 80 milliards de dollars, leur plus bas niveau depuis douze ans. Début 2014, elles atteignaient presque 200 milliards de dollars", constate le groupe bancaire français. Elles représentent encore le niveau confortable de 47% du produit intérieur brut (PIB). Après avoir baissé respectivement de 19% et de 21% en 2015 et 2016, la chute s'était un peu atténuée à 15% en 2017 à la faveur de la remontée des cours du pétrole. Mais en 2018, elles se sont contractées de 18%, une accélération imputable à la baisse du prix du pétrole en fin d'année. "La corrélation entre prix des hydrocarbures et déficits budgétaires et courants reste très forte début 2019, car le pays n'a pas encore procédé à des ajustements budgétaires significatifs", indique le Crédit Agricole. Compte tenu des cours à 65 dollars le baril au premier trimestre 2019, "la baisse ne va pas s'atténuer significativement dans les prochains mois", prévoit le groupe bancaire français, estimant que pour l'année 2019 les prévisions de croissance du PIB pourraient être revues légèrement à la baisse, c'est-à-dire à 2,1%, notamment en raison de l'entrée en récession du secteur de la construction, à 6% en moyenne annuelle. "Ce secteur est l'un des principaux relais de croissance, lorsque la rente des hydrocarbures est en panne, et il est désormais affecté par la baisse des commandes publiques", explique le Crédit Agricole, indiquant que cette année les déficits budgétaire et courant devraient rester élevés à plus de 7% du PIB chacun, ce qui continuera à faire peser sur les réserves en devises une forte pression à la baisse.
Meziane Rabhi


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