Côtes. - La cote est accidentée et présente plusieurs bons ports. Elle est échancrée par trois golfes : golfe de Bougie, entre le cap Carbon et le cap Carvallo ; golfe de Philippeville, entre le cap Bou Garoun et le cap de Fer ; golfe de Boone, entre le cap de Garde et le cap Rosa.
Bougie (5,000 habitants) (l’ancienne Saldae des Romains, Bedja¨Ä±a des Berbères) fut un des comptoirs de Carthage. A plusieurs ´epoques, elle a ´et´e la capitale de petits ´Etats musulmans. Elle ´etait enrichie par les courses des corsaires « que la beaut´e de son port attirait de toutes parts » ; les Espagnols l’ont occup´ee pendant pr`es de 50 ans (1509 `a 1555). Nos troupes s’en empar`erent par d´ebarquement (29 septembre 1833). C’est le port principal de la grande et de la petite Kabylie. Il s’y tient des march´es importants, et l’on pr´evoit que lorsque le d´epartement de Constantine sera divis´e, `a cause de sa trop grande ´etendue, Bougie deviendra, comme Bône, le chef-lieu d’une grande circonscription administrative. Sa rade, dans laquelle finit l’oued Soummam (oued Sahel), est aussi belle que celle d’Alger et son port est meilleur parce qu’il est prot´eg´e contre les vents du nord et de l’ouest, par le massif du Gouraya qui projette le cap Carbon. C’est le meilleur mouillage de l’Alg´erie. Les remparts de l’´epoque romaine et de l’´epoque sarrasine ont laiss´e des ruin´es importantes ; les fortifications des Espagnols sont encore utilis´ees en partie. Le fort Abd
el-Kader ou fort de la mer, la Kasba, le fort Barral, d´efendent la ville et le port. Le sommet du Gouraya est couronn´e par un ouvrage ; plus bas, `a l’ouest, est le fort Clausel et, sur la cote, le blockhaus Salomon de Musis.
Djidjelli (3,000 habitants) a eu quelque importance sous la domination arabe ; son port, bien que d’assez mauvaise tenue, ´etait tr`es fr´equente par les Pisans et par les G´enois, puis il devint un nid de corsaires redoutables. Cette ville est destin´ee `a prendre un certain essor lorsque son port sera am´elior´e et lorsque des routes de communication avec l’int´erieur permettront l’exploitation des richesses foresti`eres et m´etallurgiques des montagnes. A la suite de l’insurrection de 1871, on a s´equestr´e une partie des terres des tribus kabyles voisines. Des centres de colonisation ont ´et´e form´es pr`es du cap Cavallo `a l’est, et `a Duquesne au sud.
Le petit port de Collo (1300 habitants) est bien abrit´e, mais de peu d’´etendue ; il manque de communications avec l’int´erieur. Des chemins muletiers conduisent `a Philippeville et, par la vall´ee de l’oued Guebli, `a Robertville, station du chemin de fer
de Constantine. Les montagnes du Sahel de Collo forment un vaste promontoire demicirculaire que termine le cap Bon Garoun (Bougiarone).
Le commerce qui se faisait autrefois `a Collo a ´et´e absorb´e par Philippeville (16,000 habitants). Cette ville a ete créée en 1838, `a 5 kil. au sud de Stora, sur l’emplacement de la station romaine de Rusicada. C’´etait le point de la cote le plus rapproch´e de Constantine (37 kil.), et on le choisit pour en faire le port du chef-lieu de la province, afin d’´eviter le long trajet de la route de Bˆone. Sa population est de 16,000 habitants sur lesquels on ne compte gu`ere que 2,000 musulmans. Les Italiens sont en grand nombre. Des travaux importants ont am´elior´e son port ; des villas et des jardins garnissent d’une mani`ere pittoresque les hauteurs, dont les derni`eres pentes sont couvertes par les maisons de la ville. Entre Philippeville et Bone, le massif de l’Edough projette `a l’ouest le cap de Fer, `a l’est le cap de Garde. Le cap de Fer (Ras el-Hadid) doit son nom aux riches mines de fer qu’on y exploitait autrefois. Sous le cap de Garde se trouve le Fort-Genois, construit au XV`eme si`ecle, pour la protection des barques de corailleurs. A peu de distance se creuse le beau port de Bone.
Bône (20,000 habitants) est une ville en pleine croissance, la quatri`eme de l’Algérie par l’importance de sa population ; `a l’embouchure de la Seybouse, la seule rivi`ere de l’Alg´erie qui m´erite ce nom et que les caboteurs peuvent remonter `a quelque distance. Les environs sont admirablement fertiles. «Le territoire de la banlieue de Bone peut, `a juste titre, ˆetre appel´e le jardin de l’Alg´erie. Il serait difficile, en effet, de trouver sur un meme point plus de richesses agricoles de toutes natures et plus de facilit´e pour les exploiter avec profit 1. »
Bone est `a 2 kil. au nord de l’ancienne Hippone, qui ´etait une des plus belles villes de l’Afrique romaine. Elle eut saint Augustin pour ´eveque pendant 35 ans (395-430) ; prise et ruin´ee par les Vandales, en 431, sa destruction fut achevée en 697 par les Arabes. A l’ouest de Bone, le superbe massif de l’Edough (point culminant `a 1004m) est couvert d’une magnifique forˆet de chenes-lièges. Sur les hauteurs se trouve le village de Bugeaud. Des fermes et des villas se sont construites sur les contreforts qui dominent
la mer. Un nouveau village, Herbillon, a ´et´e cr´e´e pr`es du cap Takouch. On trouve dans l’Edough de riches mines de fer dont la plus importante est celle de Mokta el-Hadid sur son versant m´eridional, pr`es du village d’Ain Mokra 2. Ce massif est un flot de roches plutoniques. Des secousses volcaniques s’y font encore quelquefois sentir.
A la suite d’un affaissement du sol, les eaux, ayant envahi la plaine au sud, avaient form´e le lac Fezzara 3, qui ´etait une cause d’insalubrit´e pour cette riche contr´ee. Des travaux d’ass`echement, aujourd’hui termin´es, ont fait d´ecouvrir dans son bassin les ruines d’une ancienne cit´e romaine.
Le cap Rosa limite `a l’est le golfe de Bone. A quelques milles au sud, on voit les ruines du Bastion de France, qui a ´et´e un des premiers ´etablissements fran¸cais en Afrique.
La Calle (3,600 habitants) est une petite ville construite sur une pointe de rochers, avec un port d’un acc`es assez difficile. Une compagnie fran¸caise, connue sous le nom de Compagnie d’Afrique, et qui jouissait, par trait´e, du monopole de la peche du corail sur les côtes d’Algérie, y avait de grands ´etablissements. C’est elle qui avait fait construire le Bastion de France. Ses privil`eges remontaient `a 1560 ; elle fut ruin´ee par la Révolution francaise. Les Anglais occupèrent La Calle pendant une dizaine d’ann´ees. Nous en reprîmes possession en 1816 ; mais la guerre qui ´eclata en 1827 en détermina de nouveau l’abandon. Elle ne fut réoccupée qu’en 1836. La p`eche du corail a toujours une certaine activit´e ; elle est pratiqu´ee en majeure partie par des barques italiennes. A 12 kilometres `a l’est, pr`es la fronti`ere tunisienne, sont les mines de plomb argentif`ere
de Kef Oum et Teboul. Le cap Roux marque la limite orientale de l’Algérie.
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Posté Le : 17/06/2009
Posté par : nassima-v
Source : GEOGRAPHIE MILITAIRE - ALGERIE et TUNISIE - 2eme édition - 1890