Algérie

La protestation au Maroc a d'autres raisons que la grâce royale accordée au pédophile espagnol (expert)



Le spécialiste français du Maghreb Pierre Vermeren a mis en perspective le mouvement de protestation contre la grâce accordée par le roi du Maroc Mohamed VI à un pédophile espagnol et la crise politique que traverse ce pays.Dans un entretien jeudi au quotidien Le Figaro, il a expliqué que ces manifestations contre la grâce royale, ne portaient "pas sur ce point", que cette grâce "n'est qu'un prétexte" et qu'il fallait "bien replacer les évènements dans la crise politique que traverse actuellement le royaume".
Il a souligné alors que le Parti de la justice et du développement (PJD - islamistes au pouvoir), est menacé depuis plusieurs mois et que déjà début juillet "plusieurs ministres conservateurs du parti Istiqlal ont quitté le gouvernement, ouvrant la porte à des législatives anticipées".
Pierre Vermeren a également observé que le PJD "n'est pas étranger au lancement des manifestations" et que "plusieurs indices semblent l'indiquer". Il a rappelé aussi qu'un responsable du parti a ainsi été l'un des premiers à dénoncer "une grosse erreur" de la part du roi Mohammed VI.
Expliquant les raisons qui ont provoqué cette crise, il a notamment indiqué qu'en 2012, le FMI a accordé une aide de six milliards de dollars en échange d'une réforme de la Caisse de compensation pour stabiliser les prix des produits de base et maintenir le pouvoir d'achat des ménages.
Il a ajouté que l'institution internationale suggère que le système actuel soit remplacé par des subventions directes à destination des plus pauvres mais que "Mohammed VI et les conservateurs n'entendent pas que les islamistes tirent profit de cette réforme auprès de cette population".
D'une certaine manière, a-t-il fait valoir, "le roi cherche à refaire ce que son père, Hassan II, avait réussi avec les socialistes en les exposant au pouvoir", ajoutant cependant que "les islamistes ont plus de militants et plus de prise sur la société".
Interrogé sur l'hypothèse que ces manifestions puissent atteindre l'ampleur de celles qui se déroulent en Egypte ou en Tunisie, cet expert a estimé que cette crise politique "survient au mauvais moment".
Il a jugé alors que la "situation économique du pays est déplorable" et que par rapport au Maghreb, "le contexte marocain reste très particulier". Il a ainsi relevé qu'en Tunisie et en Egypte "les islamistes ont vraiment été aux affaires après le +Printemps arabe+, alors qu'au Maroc, Mohammed VI, qui avait réagi très vite à l'époque, a gardé l'essentiel des pouvoirs".
"La réforme de la constitution n'a pas entraîné de changements significatifs" a déploré Pierre Vermeren, observant que l'action des islamistes à la tête du gouvernement "est donc très corsetée".
"Or, l'arrivée des islamistes au gouvernement était la seule vraie nouveauté qui avait suivi le mouvement du 20 Février", a-t-il observé.
Le mouvement du 20 février est un mouvement de contestations politiques majeures apparu au Maroc le 20 février 2011. Ses revendications faisaient appel à des réformes constitutionnelles et sociales qui remettaient en cause le fonctionnement du régime marocain, pour la première fois depuis la succession du roi Mohamed VI au trône.


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