Algérie

La prise de décision dans les situations d'extrême urgence



L´ancien secrétaire d´Etat américain, Henry Kissinger, écrit dans ses mémoires que tout gouvernement quel qu´il soit se trouve toujours confronté au dilemme de la décision qu´il doit prendre. A plus forte raison dans les situations d´exception et de gravité extrême. Comme «gouverner, c´est prévoir», la mission première d´un pouvoir politique est de savoir choisir vite la décision qu´il faut au moment qu´il faut.
Les conséquences de la prise de décision dans les situations d´urgence donnent lieu, souvent, à des interprétations hâtives, voire à des critiques pouvant être virulentes, parce que ses résultats sont connus. Ce que l´on ne saura jamais, par contre, ce sont les conséquences d´une situation d´urgence en cas d´absence de prise de décision. Comment la prise d´otages d´In Amenas aurait tourné si le gouvernement algérien avait hésité à agir alors que les terroristes, eux, avaient déjà mis leur plan à exécution '
Réactions sous le choc
Jeudi dernier, vraisemblablement encore sous le choc de l´annonce de la mort de certains de leurs ressortissants des mains des groupes terroristes qui les avaient séquestrés, certains gouvernements occidentaux avaient critiqué le premier assaut des forces spéciales algériennes.
Or cette décision, l´armée algérienne ne l´avait pas prise à la légère. Les forces spéciales avaient reçu l´ordre de stopper le convoi des groupes terroristes qui tentait de sortir de la zone encerclée pour se rendre vers un «lieu sûr» dans un pays voisin d´où ils pourraient dicter leurs conditions.
Les ravisseurs avaient déjà commencé à exécuter, dès mercredi, les six malheureux ressortissants japonais qui tentaient de leur échapper, selon de nouveaux témoignages de survivants. Un acte barbare qui en dit long sur leur détermination à ne pas faire de quartier, si les conditions de leur chef, Mokhtar Benmolkhtar, n´étaient pas satisfaites. Ces conditions sont entre autres les suivantes :
la fin de l´intervention militaire de la France au Mali et la libération des salafistes emprisonnés aux Etats-Unis pour leur implication dans les attentats du 11 septembre 2011. Une fois en position de force, le chef des ravisseurs pourrait alors revoir à la hausse ses exigences qui seront accompagnées inévitablement du paiement de rançons par dizaines de millions d´euros pour l´achat de missiles en Libye.
Une meilleure évaluation de la situation
Cette évaluation du risque est à la fois immédiate et globale. Elle a pris en en compte le facteur temps. Elle part en même temps des expériences vécues depuis une décennie en matière de rançons, qui sont devenues la première source de financement du terrorisme parce que les gouvernements occidentaux des pays d´origine des otages avaient accepté de payer.
Les gouvernements qui s´étaient montrés, jeudi dernier, réservés sur la rapidité de l´assaut parce qu´il avait donné lieu à des dommages collatéraux inévitables en situation de guerre '
l´Algérie est en guerre contre le terrorisme depuis deux décennies ' donnent l´impression de faire une évaluation plus objective de la réalité sur le terrain et de la détermination de l´ennemi. Ils comprennent mieux que les forces spéciales algériennes n´avaient pas d´autre choix que de donner l´assaut final. Surtout que les terroristes encore actifs à l´intérieur de la base avaient commencé à poser des explosifs qu´ils fabriquaient sur place pour faire sauter le complexe gazier, avant d´exécuter les otages encore entre leurs mains. Ce qu´ils ont d´ailleurs commencé à faire vendredi matin, sans scrupules.
Le soutien international
Il faut noter qu´ils étaient plus de 600 otages, dont une centaine d´étrangers, à avoir été libérés. Aucune armée au monde n´aurait fait mieux. C´est la première fois dans les annales des prises d´otages que tant de vies humines ont été sauvées avec un nombre aussi élevé de terroristes éliminés. Plus d´une trentaine de kamikazes aussi dangereux se sont rendus maîtres d´un site d´une telle sensibilité.
Tous nos confrères ont conclu, comme l´a fait notre journal, qu´une catastrophe inédite dans ce genre de situation a été évitée.
Malheureusement, pour reprendre Henry Kissinger, une telle catastrophe, on n´en mesurera jamais les conséquences réelles en pertes humaines, en dégâts matériels et en charge explosive. Les ingénieurs de Sonatrach ont fait, eux aussi, un travail héroïque en déconnectant, dès vendredi, le système de mise à feu du complexe gazier. Les témoignages des ex-otages d´In Amenas sur la bravoure des soldats qui les ont sauvés suffisent à eux seuls pour conclure qu´aucune armée au monde n´aurait fait mieux que l´armée algérienne.
Le meilleur hommage a été rendue à l´Algérie hier par la France dont le ministre des Affaires étrangère, Laurent Fabius, a invité presse et chancelleries occidentales à pointer du doigt les barbares terroristes et non pas le pays qui leur a opposé la réplique qu´il fallait. C´était exactement l´opinion que venait d´exprimer quelques heures auparavant sa collègue américaine Hillary Clinton, alors que la vie de ressortissants américains était en jeu. Pas de négociations avec le terrorisme.
Des positions qui cadrent parfaitement avec l´unanimité qui s´est dégagée parmi les 15 membres du Conseil de sécurité de l´Onu autour d'un soutien sans faille à l´Algérie.


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