Vers 1150, des tribus
s'autogouvernant arrivent de la presqu'île Arabique et s'installent sur le
territoire du Sahara Occidental. Elu par les plus importantes d'entre elles, le
conseil des « 40 » ( Aït Arbain ) les dirige pour les décisions communes
importantes. Ainsi, par décision du Conseil, ces tribus ne pouvaient dépasser,
sauf en cas d'agression, une « ligne noire » qui correspondait aux frontières
actuelles du Sahara Occidental.
De l'arrivée des
tribus sahraouies à la fin de la colonisation espagnole
Au XIVème siècle
débarquent les premiers colons portugais, qui laissent rapidement la place aux
Espagnols. En 1476, les espagnols établissent un comptoir à Tarfaya en accord
avec une tribu locale. A partir du XVI siècle le Maroc commence à manifester
des velléités expansionnistes. Le sultan Moulay Mohamed veut contrôler les
routes du sud. En 1566 ses troupes sont refoulées à la Saguia el hamra par les
tribus sahraouies.
Sous le sultan
Moulay Ismaël (1672-1727), nouveaux échecs dès qu'il y a tentative de
pénétration à l'intérieur des terres. Plus malins, les espagnols signent des
accords avec les tribus pour multiplier l'installation de comptoirs le long de
la côte.
Un traité
hispano-marocain est signé le 18 mai 1767 entre le sultan Mohamed Benabdallah
et le roi Charles III. Traité dans lequel le sultan prend la précaution de
préciser: «Sa majesté marocaine s'abstient de délibérer au sujet de
l'établissement que sa majesté catholique veut fonder au sud de la rivière
Noun, car elle ne peut se rendre responsable des accidents et des malheurs qui
pourraient se produire, vu que sa souveraineté ne s'étend pas jusque là et que
les peuplades vagabondes et féroces des habitants de ce pays ont toujours causé
des dommages aux habitants des îles Canaries et les ont réduits en captivité».
Le sultan Moulay
Hassan continue de vouloir envahir sans succès le SO en 1882 et 1885.
En 1884 les
accords de Berlin, par lesquels les puissances coloniales d'Europe se partagent
le monde, reconnaissent à l'Espagne le droit de coloniser le territoire
sahraoui.
A partir de 1965
L'Onu prie le gouvernement espagnol de mettre fin à sa domination coloniale au
SO. Les manifestations indépendantistes se manifestent dès la fin des années
60. Ainsi le 17 juin 1970 des manifestations réprimées font plusieurs dizaines
de morts. (Disparition forcée de Bassiri, instigateur du MLS Mouvement de
Libération du Sahara)
En Décembre 1972
une nouvelle résolution de l'Onu affirme:«sa solidarité et son appui à la
population du Sahara dans sa lutte pour l'exercice de son droit à
l'autodétermination et à l'indépendance». 10 mai 1973 Création du Front
Polisario
Enfin en 1974,
sous la pression de la première intifada sahraouie, l'Espagne accepte un
referendum d'autodétermination sous le contrôle des nations Unies et recense 74
000 personnes. Hassan II saisit alors la Cour Internationale de Justice (CIJ).
Le16 Octobre 1975 la CIJ déboute le roi du Maroc et la Mauritanie.
D'autre part, la
conclusion de la Cour est d'avis que les éléments et renseignements portés à sa
connaissance n'établissent aucun lien de souveraineté territoriale entre le
territoire du Sahara occidental et le royaume du Maroc ou l'ensemble
mauritanien. Ainsi, la Cour n'a pas trouvé de liens juridiques de nature à
modifier l'application de la résolution 1514 (XV) dans la décolonisation du
Sahara occidental et, en particulier, du principe de l'autodétermination à
travers l'expression libre et authentique de la volonté des populations du
territoire.(1)
Pour contester
cette décision négative des Nations Unies et de la Cour Internationale de
Justice, faire pression sur l'Espagne affaiblie par un Franco agonisant et
souder l'unité marocaine fragilisée, Hassan II organise la marche verte le 6
novembre 1975.
De la
colonisation marocaine à aujourd'hui
C'est ainsi que
ce territoire, classé «non autonome» depuis les années 60 par les Nations unies
et à qui l'ONU promettait «un référendum d'autodétermination», fut abandonné
précipitamment par l'Espagne et aussitôt envahi au Nord par le Maroc et au sud
par la Mauritanie. En fait, l'Espagne, «puissance administrante» dans le
processus de décolonisation, malgré sa promesse d'organiser le scrutin
référendaire en 1975, avait initié secrètement un accord tripartite avec le
Maroc et la Mauritanie, qui prévoyait le partage de sa colonie entre les deux
pays maghrébins en contrepartie d'avantages économiques et géopolitiques
(Accord de Madrid). Un accord félon qui fut signé en novembre 1975 à la suite
de la «trop fameuse» marche verte. Un long calvaire attendait alors la
population de ce territoire, conduite par son «seul et unique représentant» le
Front Polisario, crée le 10 mai 1973. D'abord les attaques de l'armée
marocaine, soutenue par les jaguars français utilisant du napalm et du
phosphore blanc. Ensuite la guerre engagée entre l'armée du Polisario, et les
armées marocaine et mauritanienne, avant que Nouakchott décide de se retirer du
conflit fratricide en 1979. Entre temps, le 27 février 1976, la République
Arabe Sahraouie démocratique (RASD) est proclamée. La guerre se poursuit alors
entre les deux parties sahraouie (ALPS) et marocaine (FAR), imposant ainsi à
l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA devenue UA) et aux Nations unies de
s'engager dans la voie du parachèvement de la décolonisation au Sahara occidental.
De 1980 à 1987 le Maroc érige successivement six murs (plus de 2500km), les
quelques 200 000 hommes de l'armée marocaine devant se protéger des presque 30
000 combattants sahraouis ! En 1988, soit 4 ans après l'admission de la
République sahraouie au sein de l'OUA (Organisation de l'Unité Africaine), des
propositions sont avancées conjointement par cette dernière et l'ONU, portant
notamment sur l'instauration d'un cessez-le feu, suivie d'un référendum sur
l'autodétermination. Ces propositions avaient été acceptées par le Maroc et le
Front Polisario. Le cessez-le-feu eu lieu en septembre 1991 et le plan de
règlement onusien de 1991 décida aussi de la création d'une Mission de l'Onu
pour un référendum au Sahara occidental (Minurso) et de la tenue de la consultation
référendaire en janvier 1992, il y aura bientôt 19 ans !
Si le
cessez-le-feu est à ce jour maintenu et contrôlé par les forces de la Minurso,
le référendum, quant à lui, est reporté d'année en année. Profitant de la
situation et utilisant le temps en sa faveur, le Maroc demandera l'inscription
de 120 000 nouveaux électeurs pour la plupart venus du territoire marocain, et
alors qu'aucun pays dans le monde, pas même ses alliés, ne reconnaît sa
souveraineté sur le Sahara occidental, le royaume chérifien continue de jouir
des richesses naturelles sahraouies, en toute impunité,
Cette situation est devenue intolérable pour
les Sahraouis qui assistent au reniement, par le Maroc, de ses engagements
internationaux de 1988, 1991 et 1997 (accords de Houston) et au silence des
instances onusienne devant toutes ces volte-face. Depuis son avènement il y a
une douzaine d'années, le roi Mohammed VI, pour asseoir durablement son
occupation, a intensifié les «marches vertes» dans le but de refaire la carte
démographique et ethnique du Sahara occidental, imposé le black-out sur les
zones sahraouies occupées, créé un Conseil consultatif (Corcas) dans le
territoire pour contrecarrer l'influence du Polisario et cherche, depuis 2004,
à avaliser son idée d'autonomie de l'ex-colonie espagnole sous souveraineté
marocaine.
L'Intifada de
l'indépendance
A ce tableau, il
faut ajouter la déception et les frustrations des Sahraouis qui s'estiment
trahis par le Conseil de sécurité de l'ONU, la poursuite de la politique de
peuplement du territoire sahraoui occupé, dont l'une des conséquences est la
marginalisation et la paupérisation de la population autochtone, voire sa
persécution, plus particulièrement envers ceux qui affichent publiquement leur
position en faveur de l'application de leur droit à choisir librement leur
destin, à travers un référendum d'autodétermination : arrestations, tortures,
procès iniques, emprisonnements, disparitions forcées, etc. Technique déjà bien
éprouvée par la Chine au Tibet : Après l'invasion militaire, l'implantation
civile. L'intifada n'est pas inconnue des Sahraouis. Ils en avaient déjà été
partisans dans les années 70 contre l'occupant espagnol. Sévèrement réprimée
elle avait cependant pesé sur le départ des espagnols au bout de cinq années. Malgré
la répression, les manifestations pacifiques d'intifada lancées à partir de mai
2005 ont suscité beaucoup d'espoir dans les rangs des Sahraouis. Négociations
et manifestations pacifiques sont les seules armes utilisées par les Sahraouis
depuis maintenant presque 20 ans. Espoirs déçus par les rapports de commissions
d'enquêtes non publiés, empêchés en 2006, principalement par la France, membre
permanent du Conseil de sécurité, documents accablant le Maroc et montrant le
lien entre la répression des forces marocaines et le déni entourant le droit
légitime du peuple sahraoui à l'autodétermination.
Pendant que la
France entrave régulièrement toute protection humanitaire à l'Onu
(2006-2009-2010), l'Espagne balance entre deux aveux : remords politique et pragmatisme
cynique. En témoignent ces deux déclarations de deux premiers ministres :
«Nous sommes
honteux, non pas que le gouvernement ait fait une mauvaise colonisation, mais
une pire décolonisation !» Felipe Gonzales. Puis il y a quelques jours après
l'attaque des camps, Mr Zapatero expliquant au G20 de Séoul que «les intérêts
de l'Espagne devaient passer en premier». Le passage de Peter Van Walsum au
poste d'envoyé personnel du secrétaire général de l'ONU au Sahara occidental
(2005- août 2008) fut jugé trop partisan à l'égard des thèses pro-marocaines.
Dans son dernier rapport au Conseil de sécurité, le diplomate néerlandais avait
affirmé que l'option de l'indépendance n'était «ni réaliste ni réalisable»,
allant jusqu'à suggérer au Polisario d'y renoncer. Rappelons que son rôle
devait se limiter à l'organisation d'un référendum dont l'indépendance n'est
qu'un des choix possibles, choix que s'engage à respecter le Polisario. Alors
que les négociations s'arrêtent en attendant la nomination de l'Américain Christopher
Ross à la place de Van Walsum, puis devant le rejet marocain à l'idée
d'autodétermination du peuple sahraoui exprimée par le nouvel envoyé spécial de
l'ONU, éclata l'affaire d'Aminatou Haïdar, cette militante sahraouie honorée
par plusieurs prix internationaux. Il y a un an, sa mémorable grève de la faim
de 32 jours a remis un temps la question sahraouie sur le devant de la scène
internationale. L'arrestation à leur retour de visite des camps de Tindouf de
responsables d'Associations de Droits de l'homme le 7 octobre 2009, rencontrés
la veille à la ferme d'El Ayoun, encore emprisonnés sans aucun jugement pour
certains d'entre eux, l'abstention quelques jours plus tard de la France à
l'Onu face à un vote majoritaire annulant l'attribution d'un mandat de
protection des Droits de l'Homme à la Minurso, seule mission de l'Onu de par le
monde a en être dépourvue (2), ainsi que la paupérisation par l'exclusion du
système éducatif et économique des sahraouis ne reconnaissant pas la marocanité
du Sahara, sans oublier le retour au «grand silence»international malgré une
répression continuelle, tous ces éléments concourent à donner à l'intifada des
directions nouvelles.
(2) Le veto ou
l'abstention de l'un des pays membre du Conseil de Sécurité peut annuler le vote,
ce qui explique en grande partie pourquoi l'Onu «gèle» les situations mais ne
les résout pas, confirmant ainsi l'inefficacité du «Machin»!
2010… Année de
tous les dangers
L'année 2010 est
très riche en événements. Dès le mois de janvier, le roi du Maroc annonce «la
régionalisation élargie» essayant de noyer dans un plan national le problème
sahraoui continuant de prôner son plan d'autonomie sous tutelle marocaine comme
seul choix, comme lors de chacun des discours du trône, faisant fi de la
légalité internationale. Le mois d'après, seules des discussions informelles
ont lieu, renvoyant les protagonistes au niveau de négociation le plus bas
depuis 20 ans. En septembre, le Maroc, par la voix de son Premier ministre,
appelle l'Assemblée générale (AG) de l'ONU à appuyer l'«initiative nationale
pour la négociation d'un statut d'autonomie de la région du Sahara». Le 10
octobre, à proximité de plusieurs villes la population sahraouie, dans un exode
collectif volontaire, met en place les camps de toile de l'indépendance. Le 11
octobre, la 4e Commission de l'AG de l'ONU chargée de la décolonisation adopte
une résolution qui réaffirme le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination
et à l'indépendance, qui sera soumise à l'adoption par l'assemblée générale de l'ONU
en décembre 2010. Le 18 octobre Christopher Ross, en visite à Alger dans le
cadre de sa tournée au Maghreb, déclare que le statu quo dans la question
sahraouie est «intenable à long terme, étant donné les coûts et les dangers
qu'il entraîne». Il appelle le Maroc et le Polisario à entamer des négociations
«sans conditions préalables», pour trouver une solution politique juste,
durable et mutuellement acceptable, qui pourvoie à l'autodétermination du
peuple du Sahara occidental. Ce sont les mêmes termes employés dans ce
territoire encore «non-autonome» depuis le cessez le feu de 1991 après avoir
tenu tout au long des années 60-70 à l'encontre du colonisateur espagnol le
discours de la décolonisation devant amener l'indépendance. Les autorités de la
RASD( République Arabe Sahraouie Démocratique) alertent la communauté
internationale et l'opinion publique sur la répression marocaine, précisant que
«la police est déterminée à faire cesser ce mouvement». Le 24 octobre, à
quelques jours de la reprise des pourparlers entre Marocains et Sahraouis, un
adolescent sahraouis de 14 ans, qui tentait de rejoindre le camp de Gdeim Izik,
est tué par la gendarmerie marocaine, et cinq autres blessés. Son enterrement,
par les forces d'occupation, dans la même ville, sans la présence de sa
famille, s'effectuera sur fond d'indignation et de répression, selon des
sources sahraouies. Les appels pour éviter un désastre sanitaire en raison du
blocus de l'armée marocaine se multiplient alors. De même, à partir du 6
novembre des mouvements de troupe en provenance du» mur de la honte» sont
signalés dans une indifférence internationale qui fera dire malgré toutes ces
alertes à une certaine presse (aveugle et sourde, en panne d'investigation?)
qu'elle n'a rien vu venir (sic).
Le même jour, le
roi du Maroc, dans son discours à la nation, prononcé à l'occasion du 35è
anniversaire de la «Marche Verte» aura des propos belliqueux à l'égard de
l'Algérie, l'accusant de réprimer les réfugiés sahraouis de Tindouf, «en
violation flagrante des principes les plus élémentaires du droit international
humanitaire.» «Nous ne ménagerons aucun effort pour qu'ils (les «fidèles sujets
dans les camps de Tindouf», ndlr) puissent exercer leurs droits fondamentaux,
notamment le droit à la liberté d'expression, de mouvement et de retour à leur
mère-patrie», soutiendra-t-il. Mohammed VI reviendra en outre sur «l'initiative
d'autonomie», ainsi que sur l'«intégrité territoriale». Pour avoir vécu depuis
3 ans au milieu de «fidèles sujets marocains retenus prisonniers par l'Algérie
dans les camps de Tindouf», je m'interroge. A savoir pourquoi un souverain
soutenu par les principales puissances mondiales a pu laisser pendant 35 ans
ses «fidèles sujets» en captivité dans de telles conditions? Le 8 novembre à
l'aube, l'armée du roi Mohamed VI attaque, brûle et rase les camps...comme son
père l'avait fait 35 ans plus tôt en bombardant les réfugiés de Tifariti,
Emgala et Oum Dreiga, les poussant à fuir dans ce qui deviendront les camps de
Tindouf. Faudra t'il qu'une fois de plus les «fidèles sujets du roi» demande
accueil et protection à leur voisin algérien ?
(1)Lien vers le
site de la Cour Internationale de Justice (Avis consultatif du 16 oct. 1975)
http://www.icj-cij.org/docket/index.php'sum=323&code=sa&p1=3&p2
=4&case=61&k=69&p3=5
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Posté Le : 25/11/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Jean-François Debargue
Source : www.lequotidien-oran.com