Mohamed Tahmi : «Le retrait des forces de l'ordre se fera graduellement» Raouraoua : «La violence est inacceptable»
Le général-major Abdelghani Hamel, directeur général de la Sûreté nationale, l'avait annoncé, il y a quelques mois : les forces de l'ordre vont se retirer, à terme, des enceintes des stades lors du déroulement d'événements sportifs. Il l'a confirmé hier au cours d'une journée d'études organisée à la caserne d'El Hamiz sur l'organisation sécuritaire des rencontres sportives. Cette journée d'études a été rehaussée par la présence de Daho Ould Kablia, ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Mohamed Tahmi, ministre de la Jeunesse et des Sports, du général-major Ahmed Boustila, commandant de la Gendarmerie nationale, ainsi que plusieurs cadres de la DGSN et invités du monde du football, dont Mohamed Raouraoua, président de la Fédération algérienne de football. Cette journée d'étude avait en toile de fond la violence dans les stades et en relation avec les compétitions sportives, un mal endémique qui nécessite des solutions urgentes et pérennes.
Daho Ould Kablia : «En Algérie, tout repose sur les services de sécurité»
Dans leurs allocutions respectives, Ould Kablia et Tahmi ont mis l'accent sur le danger que représente la multiplication des actes de violence dans les stades. Le ministre de l'Intérieur et des collectivités locales a exhorté les clubs à prendre leurs responsabilités en étant comptables de la sécurité dans les stades, comme cela se fait à l'étranger. «En Algérie, tout repose sur les services de sécurité», regrette-il, à l'inverse de ce qui se passe en Europe où les clubs sont responsables de tout ce qui a trait aux aspects organisationnels. Il a qualifié d'«irresponsables» les saccages et agressions autour des matchs et souligné que la priorité de son département est de mettre à un terme à «la violence dans les stades et dans les écoles.»
Mohamed Tahmi : «Le retrait des forces de l'ordre se fera graduellement»
De son côté, le ministre de la Jeunesse et des Sport a annoncé que «des mesures pratiques pour lutter contre la violence dans les stades sont contenues dans le projet de loi de sport qui sera soumis au Parlement, au mois de mars», soulignant que les pouvoirs publics doivent apporter une réponse ferme à ce phénomène. «Le football est un spectacle avant tout et il doit le rester», a-t-il souligné dans son intervention. En marge de la journée d'étude, il nous a déclaré que «le retrait des forces de l'ordre de la gestion sécuritaire au sein des stades se fera graduellement», confirmant que «ce sera aux clubs de s'occuper de l'organisation des matchs où ils sont désignés comme le club recevant».
Abdelghani Hamel : «La prolifération du crime organisé
et transfrontalier constitue une préoccupation fondamentale»
Le général-major Hamel a souligné «la prolifération de multiples types de crime organisé et transfrontalier qui constitue une préoccupation fondamentale requérant davantage de ressource humaine qualifiée» et, de ce fait, «il est évident que les unités territoriales ne doivent s'occuper que de ce qui relève de leur spécialité locale et qualitative et des prérogatives qui leur sont dévolues, tout en assurant l'établissement d'un partenariat constructif avec les différentes institutions administratives, économiques et sociales et avec la société civile, afin de coopérer mutuellement à produire la sécurité préventive». En plus clair, les services de sécurité ne peuvent pas se disperser à s'occuper de la sécurité dans les stades, à un moment où ils ont plus urgent à faire avec la prolifération de la criminalité.
«513 policiers blessés et 83 véhicules endommagés lors de la saison 2011-2012»
Le directeur général de la Sûreté nationale a cité plusieurs facteurs plaidant en faveur du retrait progressif de la police de la gestion sécuritaire dans les stades : «Le transfert continuel en aller-retour des unités, avec les risques liés aux déplacements ; la mise en péril des principes de la disponibilité et de l'aptitude à tout moment pour faire face à d'éventuels troubles qui pourraient se déclencher en l'absence de la force de réserve prévue par le plan global de sécurité ; les formes de prise en charge de l'hébergement et la restauration de la force transférée et ce qui peut en découler négativement sur le rendement et l'efficacité attendue de chaque élément dans son groupe ; les fâcheuses conséquences des opérations d'intervention pour le maintien de l'ordre ou son rétablissement, avec des blessures à des degrés différents contractées par les policiers avec leurs conséquences en termes d'incapacité de travail, en sus des dégâts causés au matériel et aux équipements». Il a même donné quelques chiffres sur les dommages occasionnés aux forces de l'ordre chargés d'assurer la sécurité dans les stades : 137 accidents enregistrés durant la saison 2011-2013 avec 634 blessés dont 513 policiers et 83 véhicules de la police endommagés, 51 accidents depuis le début de la présente saison avec 111 policiers blessés et 22 véhicules endommagés.
«La DGSN aidera à la formation de stadiers et affectera des policiers pour assister les clubs»
«La DGSN accompagnera et appuiera tout effort entrepris pour l'enrichissement des nouveaux textes et dispositions légales ou aider à la formation des stadiers et agents de sécurité à travers les écoles de police, surtout en cette période transitoire qui requiert une concentration et une attention particulières au regard du principe de la professionnalisation des clubs», a affirmé le patron de la police, annonçant, comme première mesure «dès cette journée d'étude, l'affectation de policiers aux présidents de club, comme c'est le cas de la sélection nationale, chargés d'assister les dirigeants et d'encadrer les supporters, surtout lors des déplacements, de sorte à être des coordinateurs avec les autres clubs et les interlocuteurs avec les services de sécurité, afin d'assurer les meilleures conditions d'accueil, d'orientation et de protection». Ainsi, les choses sont on ne peut plus claires : dans quelques mois, la police se retirera de l'intérieur des stades et se contentera d'assurer la sécurité à l'extérieur.
Des spécialistes français et espagnols ont exposé leurs expériences
Cette journée d'étude a vu la participation de spécialistes venus de France et d'Espagne pour communiquer leur expérience dans la gestion de la sécurité dans les stades. Un responsable de la sûreté dans le département du Rhône, chargé de coordonner, avec l'Olympique Lyonnais, la couverture sécuritaire des matches organisés au stade Gerland par le club lyonnais a souligné l'impact que les tragiques événements de 1989 au stade Hillsborough, dans la ville anglaise de Sheffield, ont eu sur la définition et la mise en place d'une loi en France pour organiser la sécurité dans les stades et punir tout acte violent. Une loi qui rend les clubs responsables de la sécurité dans les enceintes qu'ils dirigent, la police se chargeant de la sécurité à l'extérieur des stades et sur l'itinéraire emprunté par les supporters adverses. «En coordination avec l'Olympique Lyonnais, nous n'intervenons dans les stades que dans le cas où les stadiers employés par le club sont dépassés par des actes violents dans les enceintes et notre intervention se fait avec une unité spéciale, la Section d'intervention rapide (SIR), spécialement formée pour intervenir dans les stades.»
«Le passage vers la sécurisation par les clubs devrait prendre deux ou trois saisons»
De son côté, la Directrice de l'organisation et de la sécurité (DOS) à l'Olympique Lyonnais, Annie Saladin, a exposé comment est organisée la sécurité durant un match de football joué par l'équipe professionnelle suivant le degré risque du match. «Nous sous-traitons avec une agence de sécurité et de gardiennage pour mettre à notre disposition des stadiers et des agents d'accueil les jours de match. Suivant l'importance du match, le nombre de stadiers varie de 360- qui est le seuil minimal- et 500, alors que celui des agents d'accueil, chargés de vérifier les billets et les accréditations, est généralement de 170», a-t-elle expliqué, tout en soulignant que tout se fait conformément à une loi et à un décret spécifiques à cette activité. Questionnée sur la durée qu'il faudra à l'Algérie, suivant l'expérience vécue en France, afin d'appliquer l'option de la sécurisation dans les stades par les clubs à travers des stadiers, elle répondra que «cela devrait prendre deux ou trois saisons, surtout que c'est difficile à faire accepter au public de nouvelles habitudes».
«Nos armes sont la vidéo-surveillance et le fichage des hooligans dangereux»
Deux responsables chargés de la sécurisation des matches en Espagne sont également intervenus pour faire part de l'expérience espagnole. Dans ce pays, «c'est la tragédie du Heysel, laquelle a vu plusieurs supporters mourir en direct le 29 mai 1985 (à l'occasion de la finale de la Coupe d'Europe des clubs champions entre la Juventus et Liverpool au stade de Heysel, à Bruxelles, ndlr), qui a incité les autorités à légiférer une loi sur la prévention de la violence», a révélé le responsable de la sécurité d'Osasuna. Cette loi institue le poste d'officier de sécurité sportive qui coordonne l'organisation de toute manifestation à caractère sportive en collaboration avec les clubs. «Nos armes sont la prévention à travers la vidéo-surveillance et le fichage des hooligans dangereux. L'Etat espagnol ne joue pas avec la sécurité et des mesures radicales sont prises, le cas échéant, pour punir les fauteurs de troubles», a-t-il insisté.
Raouraoua : «La violence est inacceptable»
Présent à l'ouverture de la Journée d'étude sur l'organisation sécuritaire des rencontres sportives, Mohamed Raouraoua, président de la FAF, a salué l'initiative de la DGSN, tout en martelant que «la violence est inacceptable» et que «tout doit être fait pour l'éradiquer».
Medouar : «La non-application des lois est une violence»
Abdelkrim Medouar, député et ancien président de l'ASO Chlef, a estimé que «les communications de haut niveau prononcées montrent que nous sommes loin, très loin des normes en matière de sécurité», mais il n'a pas manqué d'insister sur le fait que «des lois, promulguées afin d'aider les clubs, n'ont pas été appliquées et la non-application des lois est en soi une violence administrative».
Serrar : «Il faut professionnaliser les mentalités»
L'ancien président de l'ES Sétif, Abdelhakim Serrar, a souligné la difficulté «d'aller rapidement vers la sécurisation des stades par les clubs alors que nous n'avons même pas avancé d'un mètre, depuis 2010, dans l'application du professionnalisme». Pour lui, «le problème est dans les esprits car ce qu'il faut professionnaliser en priorité, ce sont les mentalités».
Yahla : «9 ans de temps perdu»
Abdelkrim Yahla, président du WA Tlemcen et du Forum des présidents de club, a regretté qu'il «a fallu attendre que Mohamed Tahmi soit à la tête du MJS pour réformer la loi sur le sport, alors que le principe avait été arrêté en 2004», estimant qu' «il y a eu 9 ans de temps perdu, donc de retard».
Kerbadj : «Qu'on donne aux clubs la gestion des stades !»
Mahfoud Kerbadj, président de la Ligue national de football, reconnaît que «le retrait progressif des forces de l'ordre des stades était prévisible, car il faut prendre le professionnalisme en entier». Cependant, il estime que «les pouvoirs publics doivent aller au bout de cette logique en donnant la gestion des stades aux clubs car il faut qu'ils aient un moyen de faire rentrer de l'argent afin de s'assurer une autonomie en matière se sécurité».
Le Buteur a présenté une communication
Le Buteur a présenté, lors de la journée d'étude sur l'organisation sécuritaire des rencontres sportives, une communication sur «Les médias face à la violence dans les stades». Il y est mentionné notamment que la violence dans les stades est liée à des facteurs multiples dont le principal est la non conformité des stades aux normes internationales avec l'absence d'animations et de commodités.
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Posté Le : 01/03/2013
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Le Buteur
Source : www.lebuteur.com