Habib Chawki est satisfait, “très satisfait” de sa télévision ! On serait tenté de partager son bonheur. C’est tellement plaisant, et rare, de voir un Algérien heureux.
Dommage que c’est toujours parmi ceux qui nous imposent “leur” arbitraire Algérie qu’on les trouve ; jamais parmi ceux qui la subissent. Quand on rencontrera un ouvrier, un agent administratif, un fellah satisfait, ou même “moyennement satisfait”, comme on dit dans les enquêtes d’opinion, il y a de quoi être vraiment content. Mais cela ne change rien au bonheur de ses décideurs. Car pas question de se bercer d’illusions ; dans mon pays, on peut être mécontent de son sort et demander un deuxième puis un troisième mandats.
D’ailleurs, tous les sondages que l’ENTV commande lui rendent des résultats “électoraux” : “Près de 80% des Algériens regardent l’ENTV.” Des sondages sûrement réalisés au mois de Ramadhan, juste autour du f’tour, l’heure où l’on guette l’adhan et l’on cherche le programme le plus léger qui puisse accompagner l’épais repas de rupture du jeûne.
Le directeur général de l’ENTV n’est pourtant pas aussi sûr du bien-fondé de sa jouissance ; l’insistance sur son infinie satisfaction montre qu’il semble bien plus se délecter de son pouvoir de narguer les opinions qui le contredisent que la qualité ou la popularité de sa télévision. La rodomontade, quand elle vient d’un responsable, trahit sa propre conviction que sa responsabilité n’a pas été totalement utilisée à bon escient. Elle est l’argument qui pallie l’absence d’arguments.
L’attitude consiste à rejeter d’emblée toute critique, en feignant le défi. Elle est le fait de gérants d’institutions qui savent que, par leur fonction politique dans le système, leur action échappe à toute autre sanction que celle de leur tutelle politique. Si les téléspectateurs sont à 80% satisfaits de leur télévision unique, pourquoi nos villes et villages sont-ils si hideusement repiqués de paraboles et non d’antennes ? Pourquoi oblige-t-on le citoyen, et non le téléspectateur, à payer une redevance concomitante au paiement de la facture d’électricité ? Pourquoi ne pas dispenser ne serait-ce que les 20% d’infidèles de s’acquitter du prix d’un service qu’ils ne demandent pas ?
L’audimat momentané des sketchs de f’tour et des rencontres de football, pour populaires qu’ils peuvent être, semble être utilisé à couvrir l’indigence programmatique et l’œuvre de déculturation et de matraquage politique à sens unique de la télévision d’État.
D’autres institutions que l’ENTV sont aussi déroutées de leur vocation sociale vers une mission politique. Le fait, pour être tacite, n’en est pas moins notoire. Il serait alors paradoxal de vouloir convaincre l’opinion de la cohérence de l’activité de cette institution avec sa mission théorique. Leurs gérants peuvent-ils faire autre chose que d’“assumer”, comme disait l’un d’eux ?
En déclarant notre télévision “très satisfaisante”, HHC veut donc nous faire désespérer de son évolution. Comme s’il n’y avait pas assez de motifs de désespoir dans ce pays !M. H.
musthammouche@yahoo.fr
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Posté Le : 16/10/2008
Posté par : sofiane
Ecrit par : Mustapha Hammouche
Source : www.liberte-algerie.com