Algérie

La peine de mort, entre la chariaa et le droit positif



Le président de la Ligue algérienne des droits de l'homme (LADH), M. Boudjemâa Ghechir, a déclaré hier en marge de la conférence sur la question de la peine de mort, organisée par l'Université des sciences islamiques Emir Abdelkader de Constantine (USIC), qu'à l'heure actuelle, 136 pays ont aboli la peine de mort et que l'Algérie reste le seul pays arabe à avoir signé le moratoire de l'ONU sur cette peine, document selon lequel elle s'engage à ne pas mettre en exécution les peines de mort prononcées par ses tribunaux.

La conférence en question s'est tenue dans la grande salle Imam Benbadis de l'USIC sur le thème de la peine de mort vue sous l'angle de la chariaa et du droit positif, pour ou contre l'abolition. La rencontre a été animée par des oulémas de la chariaa, des représentants du Conseil supérieur islamique et de l'Association des oulémas algériens d'un côté, des juristes, des défenseurs des droits de l'homme, des sociologues et des criminologues de l'autre, et en présence de représentants du ministère de la Justice et de députés des deux chambres du Parlement, d'hommes de culture, invités et des étudiants de l'université.

«Les invités ont été choisis de façon à ce que la question soit débattue sous tous les aspects», nous a expliqué le Dr Djeddi Aek, directeur du laboratoire des études juridiques de l'Université des sciences islamiques qui a organisé l'événement.

A cette occasion, les implications et incidences juridiques, religieuses, politiques et sociales de l'application ou non de la peine de mort seront examinées et débattues «sereinement», a tenu à préciser notre interlocuteur, au cours des quinze communications inscrites au programme de la journée.

Le Dr Lamine Cheriet, professeur de droit général à l'USIC et président de la conférence, a dirigé les débats au cours de la séance de la matinée marquée par deux communications. C'est le Dr Amar Talbi, représentant de l'Association des oulémas algériens, qui a ouvert le cycle des interventions en présentant le point de vue de la chariaa islamique qui repose sur le principe de la loi du talion (oeil pour oeil, dent pour dent). La seconde thèse, plus nuancée, est présentée par M. Boudjemâa Ghechir, président de la Ligue algérienne des droits de l'homme (LADH), qui a affirmé que la philosophie de l'Islam met en exergue le principe du pardon, qui conduit à l'annulation de la peine. «L'obstacle qui se dresse aujourd'hui sur le chemin de l'abolition est représenté par la nature des débats engagés à un niveau religieux autour des principes du droit positif. Ces discussions sont nettement hors sujet à mon sens, dit-il, parce que le droit positif n'a rien à voir avec les textes de la chariaa. Nous, si nous demandons l'abolition de la peine de mort dans notre pays, nous ne voulons nullement dire qu'il faut abandonner les préceptes de la chariaa. Bien au contraire, mais chacun à son domaine propre.

L'Etat algérien est régi par le droit positif». D'autres lui ont rétorqué que la Constitution précise bien que l'Islam est la religion de l'Etat et qu'on doit en tirer les conséquences découlant de l'énoncé de ce principe !

Ce qui montre l'âpreté des débats passionnants, passionnés par moments, mais contradictoires il faut le souligner, qui ont suivi les deux premières communications. Les conférenciers ont fini par conclure que les deux thèses sont nettement opposées, voire dualistes, et que leur conciliation n'est pas chose aisée. Et c'est dans cette atmosphère que ce débat s'est poursuivi durant la séance de l'après-midi.




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