C'est un «petit pavé» dans la mare que vient de lancer un des
responsables de l'UGCAA, Hassan Bellout, selon lequel la rareté du poisson en
Algérie s'explique notamment par la pollution des côtes et des zones de pêche.
Des tonnes de matières organiques et des déchets solides industriels et urbains
sont directement déversées dans la mer, a t-il déploré. La déclaration de M.
Bellout vient ainsi confirmer les observations de scientifiques et
professionnels de la pêche, qui avaient déjà averti contre ce phénomène rampant
de la pollution marine. Et encore, M. Bellout ne fait qu'effleurer le sujet,
tant les côtes algériennes sont aujourd'hui dans un piteux état. La rareté du
poisson, explique t-il, vient notamment de la détérioration de l'environnement
marin, particulièrement près des côtes. Rarement, même s'il existe un ministère
de l'Environnement et des mesures draconiennes contre la pollution marine, un
responsable algérien n'a osé pointer un doigt accusateur vers un phénomène de
dégradation avancé des côtes nationales, en l'absence de tout contrôle des déversements
industriels et urbains anarchiques dans les oueds, souvent directement sur les
plages. Il cite ainsi le cas de la ville de Bou-Ismail, dans la wilaya de
Tipaza où des déversements de déchets toxiques se font, au vu et au su de tout
le monde, directement sur la plage de la ville, devenue dangereuse pour la
baignade. Par ailleurs, M. Bellout, abordant la hausse des prix du poisson,
notamment de la sardine, parle de «bandes organisées» qui ont accaparé le
marché. Ainsi, il a déploré la fermeture de conserveries de poissons, poussées
à la faillite du fait de la hausse des prix de la sardine. «Les bandes
organisées font que le prix de la sardine, souvent vendue en haute mer, restent
à la hausse, même en jetant le surplus, et étouffent les conserveries», qui ne
peuvent acheter leur matière première à n'importe quel prix. Le cas de l'usine
de sardine de Ténès, dans la wilaya de Chlef est, à cet égard, édifiant.
Ouverte vers les années 2000, cette usine, implantée près de Oued K'sob, à
quelque 10 km à l'ouest de Ténès, a fait faillite presque trois années après
son inauguration. Elle a été victime des prix en hausse permanente de la
sardine. Depuis le début de l'année, le prix de la sardine ne descend plus
au-dessous des 100 dinars, les jours de grande abondance de poisson, sinon, la
cote de l'anchois reste au delà de la bourse de la ménagère. Par ailleurs, l'un
des grands problèmes de la pêche en Algérie, selon M. Bellout, reste la vente
en haute mer, et sur pied, du poisson pêché dans les eaux territoriales
nationales à des armateurs étrangers, généralement espagnols. Ce qui se
murmurait depuis plus de dix ans, entre gens de mer, a été ainsi dénoncé par ce
responsable au niveau de l'UGCAA. Même s'il n'a défoncé que «des portes
ouvertes», M. Bellout aura ainsi le mérite de dénoncer publiquement ce que
beaucoup de responsables du secteur savent : le poisson noble pêché en Algérie
se vend sur les marchés européens, et est consommé par les Espagnols et les
Italiens, quand ce ne sont pas des habitants des pays voisins. Il y a dans ce
registre, la pêche effrénée et non réglementée de la crevette, du poulpe et des
crustacés qui sont vendus en haute mer, dans les eaux internationales. Cela est
une vérité que les gens de mer savent, mais souvent n'osent pas en parler ; les
intérêts financiers étant trop importants. Le «coup de gueule» de Hassan
Bellout sera-t-il suivi d'effet par notamment un plus grand contrôle des
pêcheries, surtout celles au-delà des six mille marins ? L'Algérien ne consomme
plus de poisson depuis quelques années, même si la corporation compte, selon M.
Bellout, près de 52.000 pêcheurs et quelque 4.250 unités de pêche, entre
chalutiers et sardiniers. La production de poisson de l'Algérie reste très
faible, à peine 187.000 tonnes les mauvaises années, allant à 200.000 tonnes
les bonnes années. «Des propositions concrètes visant l'amélioration des
conditions de réception et de commercialisation des produits halieutiques, dans
le respect des conditions commerciales, notamment celles liées aux prix», seront
présentées par un groupe de travail, a annoncé la semaine dernière le ministre
du Commerce, M. Mustapha Benbada. Mais, pour le ministre de la Pêche, M.
Khanafou, il s'agit surtout de mettre «un terme à l'anarchie qui prévaut
actuellement au niveau des 11 pêcheries réparties à travers le territoire
national. «Nous voulons, (à travers un nouveau cadre juridique) réguler la
commercialisation des produits halieutiques en vue de conférer davantage de
transparence au secteur où les opérateurs activent sans cahier des charges»,
affirme le ministre de la Pêche. A l'UGCAA, on considère que l'avenir des gens
de mer est «inquiétant», autant par des pratiques maffieuses au niveau d'un
marché des produits de la mer pas totalement contrôlé par l'Etat, que par des pratiques
de pêche qui font ‘froid dans le dos».
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Posté Le : 07/07/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Yazid Alilat
Source : www.lequotidien-oran.com