Présentation En voulant empêcher la justice algérienne de gracier un dangereux psychopathe, le commissaire Llob va devoir se plonger dans l'histoire tragique de son pays et remonter jusqu'à cette nuit du 12 au 13 août 1962, où furent massacrées des familles de harkis. S'enchaînent alors manipulations, meurtres et intimidations jusqu'à la révélation de l'enjeu véritable de ce complot diabolique. A travers ce roman terrible et fascinant, Yasmina Khadra poursuit son implacable autopsie de la société algérienne.
Fenêtre sur les rues d'Alger “C’est l’Algérie : un tyran de perdu, mille de recrutés dans la foulée. Chez nous, l’abus n’est pas une dérive, c’est une culture, une vocation, une ambition.”
On ouvre le dernier roman de Yasmina Khadra, La part du mort, comme on ouvrirait une fenêtre sur les rues d’Alger pour y voir les coulisses d’une société qui a mal partout depuis des décennies. Une enquête rocambolesque aux nombreux rebondissements nous est contée par son personnage principal, le commissaire Llob. Le policier intègre et romancier talentueux est un homme désabusé, qui finit horripilé par l’obscurantisme immuable de ceux qui se targuent d’être les représentants du peuple, et qui, paradoxalement, refusent d’en faire partie.
L’enfer du despotisme colonial ne brûle plus le peuple algérien depuis longtemps ; pourtant, Alger crépite sous l’incandescence des illusions bafouées, et c’est dans cette atmosphère électrifiée que s’embourbe chaque matin le commissaire Llob pour rejoindre le central et son lot de déconvenues dont certaines s’avèrent inextricables. L’adjectif prend tout son sens durant cette nouvelle enquête qui commence par la traque difficile et risquée d’un dangereux psychopathe sans nom, libéré par l’impénétrable grâce présidentielle et qui se révèle, par la suite, n’être que la partie émergente de l’iceberg sur lequel vont se fissurer les trente années d’expérience du flegmatique commissaire.
L’enquête se complique et les proches la subissent effroyablement une fois qu’elle a atteint la “haute sphère”, les “zaïm”. C’est là qu’une journaliste historienne enquêtant sur les massacres des harkis fait son apparition. Beaucoup de liens entre son travail et celui de Llob se découvrent, seuls les buts diffèrent. Commence alors une recherche de la vérité qui plongera nos deux protagonistes dans le passé jusqu’à cette nuit du 12 au 13 août 1962, une nuit parsemée d’horreurs, de tueries sauvages entre des frères de sang et de calculs machiavéliques complotés par ceux qui décidèrent déjà de s’atteler à la corruption avant même que le pays ne sorte de son coma de 132 ans.
La pugnacité intarissable du commissaire est toujours aussi impressionnante, ses répliques incisives plein le barillet ne cessent d’exacerber la condescendance de ses détracteurs qui sont nombreux dans cette affaire, peut-être un peu trop pour arriver à y voir clair, dès lors, le terrain devient propice aux manipulations et le chemin qu’emprunte aveuglément Llob est jonché de cadavres et le pousse à bout.
Heureusement qu’il y a Mina, sa source et sa femme depuis plus de 25 ans. Une rencontre inopinée entre une jeune lycéenne et un garçon fraîchement décoré de l’école de police, charmeur et obstiné, qui s’est essayé, malgré lui, au jeu de la séduction car d’où il vient, l’évocation d’une femme est ponctuée par un traditionnel “sauf votre respect” mais l’amour a transcendé. C’est dans son modeste appartement de la capitale, aux murs nus et aux robinets asséchés, que la détermination du commissaire s’abreuve de ténacité.
Cela finit par déranger les tenants du pouvoir bien implanté dans le bureau politique du FLN qui voient dans cet acharnement une grave menace qui pèse sur leurs profits et qui risque de lever le couvercle sur leurs magouilles nauséabondes. L’appâter serait vain, car son honnêteté est aussi pure que le sourire d’un mioche ; reste à l’intimider, mais là encore on ne fait que raviver sa rage, tant l’affaire devient personnelle quand la dignité d'hommes valeureux que sont les anciens combattants dont il en fait partie est ébranlée.
Cette fracassante affaire se déroule à la veille de la plus historique déconfiture qu’a connue le pouvoir algérien face à ses “sujets” un certain octobre 1988.
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Posté Le : 28/09/2004
Posté par : nassima-v
Ecrit par : Yacine Hirèche
Source : www.lesoirdalgerie.com