Algérie - Andalous


Qu'est-ce qu'une Nouba ? On a voulu l'apparenter, quant à sa structure générale, à la fois au concerto et à la symphonie classique. La symphonie, telle qu'on la conçoit actuellement, comprend quatre mouvements : allégro, ou largo, ou encore andante, menuet ou scherzo, enfin finale ou allégro vif. L'ordonnancement des parties musicales entrants dans la composition d'une nouba est la suivante :
1°) Le Prélude : un morceau instrumental, arythmique, annonçant la nouba qui va être jouée et permettant de vérifier l'accord des instruments.
2°) La Touchiat : ouverture instrumentale, rythmée, construite avec des motifs qui se déroulent et s'enchevêtrent dans un mouvement uniforme (andante) jusqu'à la finale où le mouvement est plus rapide (allegro) pour finir sur un point d'orgue. Elle permet à l'assistance de se tremper dans le bain de la nouba.
3°) Le Meceddar : mélodie ample, lente, noble, envoûtante, exécutée en chour sur un mouvement uniforme (andante) permet à l'esprit de s'élever vers l'abstraction et au cour des émotions peu communes où l'instrumentation s'efface devant le chant pour reprendre après chaque vers.
4°) Le Betaihi : mélodie moins lente que le Meceddar (allegro), avec alternance du chour et de l'instrumentation, laisse ressortir uneaccélération progressive d'un couplet à l'autre, pur devenir brutalement aussi lent que le Meceddar à la fin de la mélodie.
5°) Le Derdj : une sorte de complainte chantée en chour, avec alternance du chant et de l'instrumentation, sur un rythme lent (largo).
6°) L'Inciraf : mélodie avec alternance du chour et de l'instrumentation, sur un mouvement alerte (scherzando) où les poèmes deviennent plus gais, chantent l'amour, la nature, les oiseaux, les réunions entre amis, etc.
7°) Le Mokhlas : la nouba touche à sa fin. La série nous a amenés à un mouvement rapide se hâtant vers la conclusion, et c'est le Mokhlas qui apporte cette conclusion. C'est un air au rythme vif (allegro vif) qui va en s'accentuant pour finir sur un point d'orgue.

Ces noubas sont : Dil - Rasd Eddil - Maya - Reml Maya - Hassine -
Ghrib - Reml - Zidane - Medjenba - Sika - Mezmoum - Rasd -
Ghribet Hassine - Araq - Djarka - Moual .

Conclusion
On peut juger, par le détail qui précède, si l'importance qu'attribuent nos anciens musiciens à leur nouba classique est justifiée. Cet art musical n'a pas pour nous d'expression plus haute ni plus noble, et notre répertoire si vaste et si varié, ne comporte pas de partie qui soit l'objet d'une vénération plus pieuse et d'une plus grande faveur.
Cette musique classique semble au premier abord difficile par ses règles et son ordonnancement. Cependant elle est la musique de tous, ses poèmes et ses airs si variés forment le folklore de la popu lation. Elle accompagne dans l'effort quotidien le tisserand, le coif feur, le teinturier, l'artisan. Les femmes le chantent en faisant leur ménage. L'intellectuel, le bureaucrate la fredonnent, et chaque morceau éveille l'espoir, la nostalgie, le regret ou une passion déçue.
Elle a inspiré merveilleusement nos poètes tlemceniens, tel que : Mendaci, Ibn Triqui, Ibn Messaib, Bensehla pour idéaliser la beauté féminine, et chanter la nature et les oiseaux. Elle évoque par touches musicales et poétiques à la fois, le corps, le visage, les habits, les bijoux, les parfums de la bien aimée.
Puisse-t-elle cette musique trouver de nouveaux accents et utiliser ses rebebs, ses luths, ses kouitras pour élever nos cours et nos âmes vers ces sentiments nobles et délicats qui ont fait le bonheur de nos aïeux.



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