La notion de Oumma ou entité trans-ethnique
C’est à Médine, en 622, que le Prophète, a créé une Communauté de type nouveau. Ce n’est plus une communauté tribale fondée sur les liens du sang comme chez les nomades ou les liens du sol comme chez les sédentaires. Ce n’est pas non plus une collectivité nationale fondée sur l’unité du territoire, d’un marché ou d’une histoire.
Il s’agit d’une communauté de foi, qui repose sur une expérience commune de la transcendance de Dieu.
Un communauté véritablement humaine ne peut se créer sur une nature ou une histoire déjà données, déjà faites, mais sur une décision, une volonté de vivre ensemble tournée vers l’avenir et vers un but commun : la «commanderie du Bien».
L’écrivain Roger Garaudy, écrit que «le secret du dynamisme et de l’universalisme du Message de l’Islam est précisément cette ouverture de la Communauté». Il ne s’agit donc pas d’une réalité statique mais d’une entité en devenir.
Dans ce cas, il n’est question ni de «peuple élu» ni de «terre promise» mais de guidance axiologique. Le Message coranique précise : «Cette communauté qui est la vôtre, est vraiment une communauté unique» (Coran, Sourate XXIII [23], verset 52). D’autre part, le terme coranique de ummah est polysémique. Il peut signifier «moment» ou «génération» (Coran, S. XI [11], v. 8) ; «guide» ou «modèle» (Coran, S. XVI [16], v. 120) ; «voie» (Coran, S. XVIII [18], v. 22) ; «groupe de gens» (Coran, S. XXVIII [28], v. 23) ; «unanimité religieuse» (Coran, S. XXII [22], v. 34) ; enfin, le sens le plus spécifique de «communauté avec sa connotation d’avant-garde d’un groupe religieux.Quelle que soit sa racine étymologique - qui implique soit un sens causal, ummi (mère), soit un sens téléologique, amm (visée) -, la Oumma n’est ni l’Islam ni les musulmans, mais elle signifie la Voie qui les relie. D’où son rapport direct à cet effort, jihad (petit ou grand), qu’on doit faire sur soi-même.
Quant à la question de savoir quelle est la nature du lien qui unit les membres de la communauté islamique, nous pouvons partir de ce qu’en écrit Joseph Chelhod : «L’Islam prononce irrémédiablement la dissolution du principe ethnique et national : à la communauté tribale basée sur la parenté du sang, il oppose la communauté religieuse ; elle a Dieu pour chef et législateur, et le vaste bien mystique qui assure la cohésion des fidèles trouve son lieu en lui». La raison d’être islamique est l’antithèse du racisme : «Ô vous les hommes ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous vous avons constitués en peuples et en tribus pour que vous vous connaissiez entre vous. Oui, le plus noble d’entre vous, auprès de Dieu, est le plus pieux» (Coran, Sourate XLIX [49], v. 13).
La communauté islamique est inter-raciale.
Dès la fin du premier siècle de l’avènement de l’Islam, cette égalité s’affirma et fut l’un des signes caractéristiques de la fraternité musulmane.
Cependant, pourrait-on objecter, la notion de ahl al-bayt [les gens de la Maison du Prophète] n’implique-t-elle pas un germe d’inégalité ?
Pour répondre à cette question, il suffit de préciser que la Communauté comprend non seulement la parenté agnatique (âl) du Prophète et la parenté co-agnatique (ahl al-ayt), mais aussi la vaste clientèle adoptive (mawâli). Cette dernière est destinée à embrasser toutes les races du monde.
Non moins significatif est le caractère déterritorialisant de la Oumma: la communauté ne connaît ainsi ni race ni frontières.
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Mohamed Jamil Cherif
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Posté Le : 10/06/2007
Posté par : sofiane
Source : www.voix-oranie.com