Algérie

«La mosquée ou le tribunal»


Pourquoi sommes-nous devenus aussi intolérants? A chaquecrise de vocation collective, ce pays trouve la plus tragique et la plushaïssable des formules: «La valise ou la mer», tout juste après l'Indépendancepour chasser les Français qui voulaient être algériens. «La mer ou le cercueil»à l'époque du FIS contre ceux qui voulaient réfléchir ou s'opposer. «La mosquéeou le tribunal», selon un représentant de l'inquisition religieuse, lors d'unprocès, à Tiaret, contre une femme qui a choisi le Christianisme après l'Islamhérité.Pour trouver la réponse, il faut donc creuser. Dire quenous avons été si souvent colonisés, que chaque étranger est pour nous unemenace et chaque différence, une trahison, ne suffit plus que pour leshistoriens. Dire que c'est l'école et son dressage idéologique qui ont fait denous ce que nous ne sommes pas, nous approche un peu de la vérité. Tout lemonde le sait mais personne ne le dit: les égyptianneriesdes années 70 ont ravagé l'âme de ce peuple, sa langue et son esprit presqueautant que la dernière colonisation. La décolonisation populiste aura même faitpire que la colonisation massacreuse. Qu'en restera-il? Un peuple qui n'aimepas qu'on ne lui ressemble pas et qui ne ressemble à personne justement. Aujourd'hui,à l'époque des grands charmes et des appels à l'investissement et au tourisme, lepays de la RADPvient d'ouvrir la chasse contre lui-même. Il s'Iranise avec vigueur, s'isolecomme son propre Président dans le soufisme panthéiste, se sabote et cède auridicule. A la fin, encouragé par son gouvernant principal qui parle comme unimam, par sa télé qui parle comme une barbe et par des partis qui parlent à laplace de Dieu, le pays populiste a compris le message: la barbe c'est bon, lesautres c'est mauvais, le problème c'est la croix. Dès lors, il suffit dechasser la croix même celle des poteaux, d'arrêter ceux qui lisent la Bible pour passer le tempsdans les bus, de crier à la menace de dix églises contre le parc de cent millemosquées, pour occuper on histoire. A la fin, on arrête une simple jeune femmeà qui on offre un choix strict, hideux, loin de l'esprit de cette religion: lamosquée ou le tribunal. Pourquoi sommes-nous devenus aussi intolérants? Parceque nous n'avons rien à faire et que nous sommes terrifiés. Face à la terribleangoisse de la modernité, chacun répond selon ses capacités: pour nous, celasera par la chasse à la différence.Et comble dans cette affreuse histoire d'une jeuneAlgérienne qui risque d'être brûlée (deux fois après l'interventionmalencontreuse des Français) sur un bûcher, sous les huées de la peupladeexcitée, c'est que cela intervient même où l'Etat affirme, à Nouakchott, par labouche de notre ministre de l'Intérieur que pour lutter contre le terrorisme, ilfaut lutter contre l'intégrisme, faire accepter l'altérité, dissocier lesreligions de leur réduction, expliquer qu'être juif n'est pas être sioniste, êtremusulman n'est pas être terroriste et être chrétien n'est pas être évangéliste.C'est dire que le paradoxe est de taille: il fait 2 millions de kilomètrescarrés et réclame la lutte contre le terrorisme sans la lutte contre lesintégrismes de tous bords.Pourquoi, donc, islamistes, musulmans, laïcs, hystériquesou modernistes, sommes-nous tous devenus aussi intolérants et de la façon laplus ridicule? Parce que nous n'avons rien à faire sur terre sauf se réclamerde Dieu ou des Pouvoirs. Au sud c'est le Sahara, au nord c'est le désert. D'oùcette nouvelle mission qui, à la différence de l'Islam des origines qui s'enprenait à deux empires géants, se réclame d'un Islam local qui s'en prend à unejeune femme dans un bus. L'affreuse histoire de «Le nom de l'Islam contre leprénom de Habiba» sur les écrans géants de cettenation, avec le reste de l'humanité pour spectateurs. Dieu! Que faire pour selaver de cette honte de l'âme?
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