Algérie

La mise en place des unités neuro-vasculaires, un défi à relever



Les études ont montré que des patients peuvent bénéficier de ces traitements au-delà des quatre heures après l'attaque, jusqu'à 24h.La neuro-imagerie de la pathologie cérébro-vasculaire et de la substance blanche a été au centre des débats, la semaine dernière, à Alger durant les travaux du Congrès national de radiologie, des journées algéro-françaises et du Congrès maghrébin de radiologie, auquels ont pris part des sommités mondiales en la matière. Deux autres sessions, portant sur l'imagerie digestive et les urgences pédiatriques, ont été organisées.
Développer un programme neuro-interventionnel pour traiter les AVC, la thrombectomie dans les AVC, le traitement endovasculaire des anévrismes cérébraux et urgences en neuro-imagerie étaient les principaux thèmes débattus lors de cette session. Des techniques pratiquées globalement dans des unités neurovasculaires mises en place dans les pays européens il y a quelques années pour la prise en charge, notamment des AVC.
Des unités qui nécessitent un personnel qualifié, des moyens adéquats et une organisation rigoureuse. Prendre en compte les considérations pratiques, selon Pr Lotfi Hacein Bey, radiologue dans un groupe hospitalier en Californie, constitue l'élément essentiel dans la mise en place de ce type de structures, en l'occurrence les unités neurovasculaires. «Avoir une machine qui coûte des millions d'euros ne veut pas dire que vous avez réglé le problème.
Il s'agit de prendre en compte tous les aspects liés à cette prise en charge qui a besoin d'une coordination, car il s'agit d'une longue chaîne. C'est bien qu'il y ait une volonté politique des pouvoirs publics de mettre en place ce type de structures, mais il faut développer tous les maillons de la chaîne. C'est très important», nous a-t-il expliqué en aparté, avant de signaler qu'un travail d'éducation à la prévention doit être fait en amont.
«La prévention reste le meilleur moyen pour éviter un AVC, un infarctus du myocarde et surtout pour lutter contre les facteurs de risque modifiables qui sont l'HTA, le tabagisme, le stress, les maladies cardio-vasculaires. On ne peut pas changer l'âge et le sexe, mais le reste oui. C'est avec la prévention que l'on pourra réduire le nombre d'AVC qui est en augmentation et de nombreux pays ont réussi», a-t-il ajouté.
Il faut apprendre à la population à reconnaître les symptômes des AVC, tels que la faiblesse d'un membre, une paralysie faciale, un trouble visuel soudain, un trouble du langage, une perte d'équilibre brutale, un mal de tête inhabituel ou encore des vomissements, ce qui permettra d'arriver très vite au centre de prise en charge où les moyens thérapeutiques existent et sont très efficaces.
En termes pratiques pour la création de ces centres, Dr Hacein Bey estime que «les solutions dépendent des situations géographiques du pays et des moyens dont on dispose afin de permettre un accès équitable aux soins à tous les citoyens, sans pour autant penser que cela pourrait coûter cher», a-t-il relevé, en rappelant la célèbre citation de Derek Bok : «Si vous pensez que l'éducation coûte cher, essayez l'ignorance.»
Le président de la Société française de radiologie, Jean François Meder, a, quant à lui, rappelé les bénéfices des traitements assurés dans ces structures, à savoir la thrombolyse, qui doit être faite dans les quatre heures et demie qui suivent l'attaque selon des critères bien définis et la trombectomie est aussi bénéfique au-delà des quatre heures trente.
«C'est à travers ces traitements qu'on arrive à réduire la mortalité et les handicaps. Ce type d'unité, qui fonctionne 24h sur 24 h, doit être doté d'une IRM pour évaluer l'étendue de l'hémorragie et d'un personnel spécialisé. Les patients sont au préalable triés puis admis en unité neurovasculaire après confirmation du diagnostic par imagerie, et traités pour être par la suite placés pour la rééducation», a-t-il indiqué. Et de signaler que des études ont montré que des patients peuvent bénéficier de ces traitements au-delà des quatre heures de l'attaque jusqu' à 24 heures.
Le président de la Société française de radiologie a noté que la France, qui enregistre plus de 120 000 AVC par an, compte 140 unités neuro-vasculaires sur 37 sites et la réflexion est engagée afin d'ouvrir d'autres sites et de renforcer les équipes existantes pour réduire les délais d'accès. Pour Pr Jean-François Pruvo, responsable du service d'imagerie au CHRU de Lille, en France, grâce à ces unités, on a pu réduire de manière considérable la mortalité : «L'imagerie et la recherche clinique ont beaucoup apporté ces dernières années.
C'est ce qui nous a permis de prendre en charge les AVC et de réduire le taux de mortalité en France. Nous sommes prêts à partager notre expérience avec les spécialistes algériens et les pouvoirs publics pour offrir une prise en charge aux patients, d'autant que les compétences existent en Algérie. Il y a aujourd'hui les moyens de confirmer le diagnostic et d'évaluer le patient afin de le sauver de la la mort et du handicap.»
Et de rappeler que le traitement consiste «à déboucher l'artère très rapidement. On procède par une perfusion qui s'appelle la thrombolyse, et récemment on a introduit en complément de la thrombolyse une thrombectomie, c'est-à-dire la montée d'un petit cathéter qui vient retirer le caillot. Ce qui doit se faire dans les premières heures de l'attaque.
Il faut que le malade arrive très vite à l'hôpital», a-t-il expliqué, en précisant que beaucoup de choses doivent être faites en amont, en l'occurrence la régulation des transports. Selon lui, pour que la filière neurovasculaire fonctionne, l'ensemble des acteurs de la prise en charge des AVC, comprenant le SAMU, les services d'accueil des urgences, les services d'imagerie, de neurologie, de cardiologie, de réanimation médicale et de rééducation doivent être associés en réseau afin de partager les plateaux techniques et les compétences.
«La télémédecine est un des moyens efficaces pour assurer une prise en charge des patients dans les zones isolées, telles que les régions montagneuses et éloignées», suggère-t-il. Et de signaler : «Nous avons réussi à mettre en place 125 unités neurovasculaires en 30 ans, dont 15 sont réunies toutes ensemble autour d'une IRM ou d'un scanner grâce aux manipulateurs et à un neuroradiologue.»
Riyad Hanafi, interne de radiologie exerçant dans le service du professeur Jean-François Pruvo, regrette qu'à l'heure actuelle l'accès au traitement des accidents vasculaires cérébraux (AVC) reste très inégal, selon qu'on se trouve à proximité d'une grande ville ou non. «Alors qu'on assiste à des progrès majeurs dans le traitement des AVC, le grand défi est de mettre en place ce dernier dans l'ensemble du territoire national afin de permettre à tous les patients d'être pris en charge de manière équitable, notamment grâce à l'essor de la radiologie interventionnelle.
Il est impensable en 2017 d'envisager qu'en France, des patients puissent être moins bien pris en charge que d'autres, surtout dans un domaine aussi important que l'AVC, en raison d'une couverture territoriale insuffisante de l'offre de soins», a-t-il déploré. Le traitement en question doit être réalisé, a-t-il recommandé, le plus rapidement possible une fois l'indication posée.
La décision doit être prise par une équipe multidisciplinaire comprenant au moins un neurologue, (et/ou un médecin compétent en pathologie neurovasculaire et un neuro-radiologue interventionnel qualifié. Il rappelle que 6000 thrombectomies mécaniques ont été réalisées durant l'année 2017 et les prévisions pour les années 2020 et 2025 seront respectivement de 10 000 et 13 600 actes.


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