La menace du bisphénol A

Le bisphénol A, ou BPA, un produit chimique industriel appartenant à  la famille des composés organiques aromatiques, est utilisé dans la fabrication du polycarbonate, un plastique rigide et translucide employé dans la confection de produits de large consommation, tels que les biberons, les bonbonnes, les bouteilles en plastique, les canettes, les emballages alimentaires, les jouets, les récipients alimentaires en plastique transparent et la vaisselle. Depuis la fin des années 1990, le BPA soulève des inquiétudes chez les chercheurs quant à  ses effets nocifs sur le corps humain. Sa structure étant proche de celle de l'œstrogène, il peut donc circuler dans le sang et déclencher des réactions inattendues. Diverses expériences scientifiques ont montré que le BPA est capable de mimer non seulement l'effet des hormones sexuelles féminines, qui ont un rôle dans la reproduction, mais aussi le développement d'organes comme le cerveau et le système cardiovasculaire. Il peut donc perturber le système hormonal du corps humain, une propriété qu'il a en commun avec plusieurs polluants, dont les phtalates, présents dans les produits de consommation courante et appelés «perturbateurs endocriniens». La contamination au BPA se fait aussi bien par la bouche et l'inhalation que par le simple toucher cutané des produits contenant le BPA, massivement dispersé dans l'environnement depuis des décennies et utilisé au quotidien. Des analyses biologiques ont prouvé la présence du BPA dans l'organisme d'une large partie des populations, quel que soit l'âge, notamment chez les enfants et les bébés contaminés par leur maman, puisque le placenta ne protège pas l'embryon de l'exposition au BPA, et un passage transplacentaire significatif du BPA est avéré chez la souris.  Les effets du BPA connus à  ce jour et attendus sont essentiellement endocriniens. En effet, les endocrinologues constatent une augmentation des problèmes testiculaires chez les garçons, une puberté précoce et un développement prématuré chez les filles.
Selon une étude publiée cette année, ayant porté sur 1239 jeunes filles de trois régions des Etats-Unis, 15%  ont entamé leur puberté vers 7 ans et 20% ont développé leur pilosité à  l'âge de 8 ans, ce qui vient confirmer des résultats danois montrant que la formation des seins est de plus en plus précoce chez les jeunes filles européennes. Par ailleurs, des variations régionales sont constatées, elles pourraient àªtre liées à  l'alimentation et éventuellement à  l'exposition au BPA ou à  d'autres facteurs environnementaux. En 2009, la Société internationale d'endocrinologie a alerté sur les dangers du BPA, en particulier son effet perturbateur endocrinien sur la reproduction, son implication dans les cancers du sein et de la prostate, dans certaines pathologies cardiovasculaires, de la thyroïde et dans l'obésité. Elle juge le problème préoccupant pour la fertilité de l'espèce humaine et appelle à  réduire l'exposition des populations à  ces molécules.
Au nom du principe de précaution, le Canada est le premier pays dans le monde à  interdire les biberons contenant le BPA. Puis d'autres pays ont pris la même mesure, le Danemark, la France et certains Etats américains qui ont même élargi l'interdiction à  tout ou  partie des plastiques alimentaires.
Quant aux industriels du plastique, leurs intérêts financiers étant en jeu, ils soutiennent que les doses du BPA auxquelles sont exposées les populations sont insuffisantes pour provoquer un quelconque effet nocif. Selon eux, la dangerosité potentielle du BPA serait un «mythe». Pourtant, plus de 150 études scientifiques montrent des effets nocifs à  de très faibles doses.
Quelques conseils pratiques :
- Préférer les produits en verre, en polyéthylène ou en polypropylène, (chiffres 1 et 2 dans les triangles de recyclage) ; éviter les biberons en polycarbonate (chiffre 7 dans le triangle de recyclage) ; éviter de réchauffer la nourriture dans des récipients en plastique, en particulier au microonde ; éviter les conserves et les canettes.
- Plus le plastique est abîmé, plus il libère du BPA, il faut donc se débarrasser de son vieux polycarbonate.