Algérie

«La menace des armes nous guette»


Le recteur de la Grande mosquée de Paris, Chems-Eddine Hafiz, a été reçu, avant-hier, par le pape François au Vatican. Avant d'inviter le pape à venir visiter la Grande mosquée de Paris, Chems-Eddine Hafiz a brossé un large tableau sur les convulsions qui animent le monde soulignant la portée que peut revêtir la visite à ce lieu de culte musulman hautement symbolique de Paris. «La menace des armes, de l'extrémisme, de l'adversité, de l'exclusion et de l'égoïsme grandit sur le Vieux Continent», a écrit Chems-Eddine Hafiz dans une lettre de huit pages remise en main propre au pape François. Cette menace guette plus singulièrement «la France, fille aînée de l'Eglise, qui rassemble le plus grand nombre de juifs et de musulmans en Europe», a-t-il ajouté dans sa missive soulignant que «si les divisions de la société française s'aggravent, la coexistence religieuse cédera devant l'intolérance, en Europe et partout dans le monde où les existences se mêlent entre les frontières». La rencontre entre le recteur et le pape intervient dans un contexte international explosif: la Vieille Europe est appelée à des révisions déchirantes induites par une confrontation à long terme avec la Russie dans le cadre d'une féroce guerre. La menace nucléaire qui ravive le douloureux souvenir de Nagasaki et de Hiroshima en 1945, ou de la crise des missiles à Cuba, il y a exactement 60 ans. Coïncidence de l'Histoire, le pape Jean XXIII a joué un rôle déterminant dans le règlement de cette crise. Son appel à la paix radiodiffusé et relayé en première page par la Pravda, a poussé à l'organisation de négociations entre Khrouchtchev et Kennedy et éviter ainsi une troisième guerre mondiale qui allait dévaster la planète. L'un des points forts de la conversation entre les deux hommes de religion, a été souligné dans la lettre de Maître Hafiz qui a exprimé sa «préoccupation sérieuse au regard de ce moment décisif de l'histoire des peuples d'Europe, qui parviennent de moins en moins à repousser les affres de l'extrémisme». Aussi, a-t-il relevé les efforts du pape François pour le rapprochement entre chrétiens et musulmans et entre toutes les religions».Maître Hafiz explique: «Après des années de menaces terroristes, après la tragique décapitation du professeur Samuel Paty, en octobre 2020, les représentants de l'islam se devaient de démontrer et d'expliquer à tous que leur religion n'engendre pas la violence». Mais le «défi est si âpre à relever» pour «les musulmans de France», estime Chems-Eddine Hafiz, qu'ils doivent aussi pouvoir compter sur «l'Eglise catholique en France». La Grande mosquée de Paris fut érigée, par la volonté de la République, en reconnaissance du sacrifice des soldats musulmans venus des colonies, entre 1914 et 1918, pour la sauvegarde de la France. Ce lieu de culte musulman a été le témoin des lueurs d'humanité qui parvinrent à entretenir l'espoir au cours de la tragédie de la Seconde Guerre mondiale. Faut-il rappeler à ce propos qu'en mai 2021, le Conseil de Paris a voté pour qu'un lieu de la capitale française porte le nom d'Abdelkader Mesli, imam de la Grande mosquée de Paris, résistant, déporté en 1944, qui participa au sauvetage de personnes juives' Hasard aussi symbolique qu'heureux, trois serviteurs de Dieu et de l'Eglise, dont le cardinal Eugène Tisserant, bibliothécaire du Vatican et membre de l'Académie française, ont reçu, en octobre de la même année, le titre de «Juste parmi les nations». Le recteur de la Grande mosquée de Paris, regrette cependant, que l'hommage à ces héros soit passé inaperçu et n'ait pas trouvé d'écho au sein de l'espace médiatique et politique français, préférant plutôt alimenter les poisons de l'angoisse, du repli sur soi et de l'indifférence.
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