Algérie

La "marmite" de l'ONS



La
Les Algériens ont-ils un aussi grand coup de fourchette' C'est ce qu'on pourrait croire, à première vue, à la lecture des chiffres publiés, samedi dernier, par l'ONS (Office national des statistiques). Ainsi, selon cette enquête, les ménages consacrent près de 42% de leur budget à l'alimentation. Ce chiffre est une moyenne obtenue en regroupant les ménages en milieu rural qui dépensent 46% de leur budget pour s'alimenter alors qu'en milieu urbain, ce chiffre passe à 40%. A la campagne, on dépense plus pour manger qu'en ville. C'est l'office qui l'affirme. Nos statisticiens ont voulu être précis. Ils ont différencié la population en catégories en utilisant les déciles (unité de mesure en statistiques) qui vont de un à dix. Des plus pauvres aux plus riches. Le résultat est inversement proportionnel. «Plus la part alimentaire dans le budget est élevée, plus le ménage est pauvre et l'inverse est vrai», a confirmé le directeur technique à l'ONS, Youcef Bazizi. On commence à comprendre la différence. Elle est de taille. 42% d'un budget du smicard ne sont pas comparables au même pourcentage du budget d'un député. En effet, en dépensant 1000 dinars au marché, cela fait trente fois plus mal au smicard qu'au député. Sachant que chez le boulanger et chez le boucher, les prix sont les mêmes pour tous. L'affirmation de Bazizi repose sur la théorie d'Ernest Engel, économiste et statisticien allemand du XIXe siècle. Il le précise d'ailleurs. Ces chiffres le confirment puisque l'enquête fait apparaître que le ménage le plus pauvre, chez nous, dépense 54% de son budget pour ses besoins alimentaires alors que le ménage le plus riche n'en dépense que 28%. Soit la moitié. Pour la clarté, la moitié (54%) de 18.000 dinars c'est 9.000 dinars alors que la moitié de la moitié (28%) de 300.000 dinars, c'est 75.000 dinars. Ce qui revient à dire que si le riche dépense plus que le pauvre pour s'alimenter, l'incidence sur son budget est nettement moindre que sur celle du budget du pauvre. Voilà qui explique bien la théorie d'Engel. Toujours selon l'ONS qui a utilisé les déciles pour son enquête, la première catégorie de la population qui est la plus pauvre est représentée dans le premier décile (D1). C'est 10% de la population. En nombre, c'est près de 4 millions de personnes. La catégorie des plus riches figure au D10 pour le même nombre de personnes. C'est là où nous voulions arriver. Il faut admettre qu'il est injuste que le riche fasse ses achats au même tarif que le pauvre. Nous pensons surtout aux produits subventionnés comme le pain, le sucre, l'huile, l'eau, l'électricité, les carburants, etc. Cela ne nous empêche pas d'y ajouter les soins dans les structures publiques de santé. Surtout que les riches ne s'y opposeraient pas même s'ils ne sont pas pressés de ne plus bénéficier des subventions. Ils en profitent tant que l'administration n'a pas encore mis en place un dispositif qui permettrait de diriger les subventions de l'Etat uniquement vers les plus pauvres. A l'ère du numérique, l'opération n'est pas impossible. C'est, à quelque chose près, le principe de la carte Chifa. Même l'argument des revenus tirés de l'économie informelle ne tient pas puisqu'il n'a pas pesé sur le remboursement automatique du médicament. En réalité, on s'explique mal l'intérêt de la diffusion au grand public d'une telle enquête. Elle ne peut servir qu'au travail des experts. Pour d'autres résultats. Pas pour le coup de fourchette des Algériens!


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