Algérie

La marche à contre-sens du pouvoir



Il fallait vraiment chercher des images du chaos pour les trouver. Ils y sont parvenus. Avec zéro réussite mais ils ont quand même osé. Au journal de la mi-journée, on pouvait attendre autre chose que cette ouverture sur un ministre de l'Intérieur suggérant l'apocalypse. Et lançant dans la foulée une promesse de «fin de récréation» dans un dispositif musclé baptisé avec un nom de circonstance : la rigueur de la loi. On pouvait attendre une information qui esquisse une sortie de la glaciation des médias publics, on a eu des demi-mensonges qui préfigurent les prolongements sur l'essentiel. On pouvait espérer une initiative politique qui laisse entrevoir une issue sans conséquences douloureuses. C'est Bédoui, le premier flic qu'on a envoyé au charbon. On l'a envoyé comme personne mais surtout comme incarnation. De la surdité face à ce que leur envoie l'Algérie comme message et de ce qu'ils comptent entreprendre pour «apaiser» la rue, à défaut de la dompter. Ils ont des yeux pour voir et des oreilles pour entendre, ils en ont fait un autre usage. Pour fabriquer des images du chaos là où l'escarmouche ne pouvait même pas prétendre au statut de l'anecdote. On a ouvert le JT d'un lendemain beau comme le jour par un ministre de l'Intérieur en visite dans un hôpital où les images de policiers blessés flirtaient avec le ridicule. Ça, il fallait vraiment le chercher. Ou, tant qu'à faire, le monter de toutes pièces, puisque rien n'indique qu'ils sont enfin capables d'états d'âme. Si c'était le cas, ils n'auraient peut-être pas été jusqu'à jouer sur la mort de Hassan Benkhedda qui a, selon toute vraisemblance, succombé à un malaise cardiaque. Comment a-t-on fait pour détourner les yeux et boucher les oreilles de ce que le monde entier a découvert dans les rues d'une trentaine de villes algériennes pour n'en retenir que l'épreuve du Saint-George ' Comment a-t-on fait pour ne pas voir la sérénité des braves mamans venues avec leurs enfants en bas âge, parce que convaincues qu'il ne peut rien leur arriver. Parce que confiantes en «leur rue», elles voulaient qu'ils soient témoins de ce jour historique ' Comment a-t-on fait pour ne pas voir les milliers de feuilles blanches qui disaient «Silmia» ' Comment a-t-on fait pour ignorer que dans l'ensemble des imposantes processions qui convergeaient vers le centre de la capitale, il n'y a pas eu le moindre incident, pas même la moindre parole déplacée, y compris quand on a signifié fermement à M. Nekkaz que sa tentative d'attirer l'attention sur sa personne n'était pas une bonne idée ' Comment a-t-on fait pour faire l'impasse sur l'essentiel et chercher la grossière entourloupette là où il est question de faire preuve de lucidité ' Ce n'est pas sûr mais c'est encore possible. S'ils ont encore besoin d'un coup de coude, ils l'auront peut-être aujourd'hui.Qu'ils ne nous disent surtout pas que les centaines de milliers qui battent le pavé «demandent des réformes». Le comble, parce que ça voudrait dire que la solution viendrait du? problème.
S. L.


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