Algérie

La maladie de l'espoir...


Violence et interdit
L'institut français a clôturé la semaine dernière son cycle cinématographique dédié à la Palestine par deux intéressants documentaires signés du réalisateur français Dominique Dubosc.
Palestine, Palestine et Réminiscence d'un voyage en Palestine ont été projetés en présence de leur réalisateur qui s'est évertué à raconter la genèse de son travail, tout en décrivant la situation catastrophique des Palestiniens qui n'a pas changé d'un iota. Ces films achevaient tout un cycle de films dédié à la Palestine dont le fameux Le temps qu'il reste d'Elia Suleiman, lequel a été diffusé à Alger, exclusivité pour rappel en 2009 par l'Association A nous les écrans lors des journées cinématographiques d' Alger et en 35 mm svp!. Un film qui méritait d'être vu et revu. Palestine, Palestine réalisé en 2001 retrace le quotidien d'un couple marionnettiste qui va de village en village, tentant de faire retrouver le bonheur dans un pays occupé depuis des décennies. Le réalisateur se souvient que ne supportant pas ce qu'il voyait dans les médias il décide de partir en Palestine, sur impulsion, au deuxième jour de l'intifada. «égoïstement, je souffrais moins en quelque sorte en étant là-bas...». Ce film, le réalisateur l'a conçu comme un triptyque dont la partie centrale est la Palestine entourée de néant ou de paysages de désolation, de temps mort... «Le rêve sioniste d'Israël. Le prisonnier du rêve est la Palestine, une terre pourtant sans peuple. Des Palestiniens sont devenus comme les juifs avant, un peuple sans terre...» Dans ce documentaire à la puissante force suggestive de la parole, le réalisateur s'attarde à démontrer la violence de l'interdit en Palestine. Durant tout son périple, il accompagnera un couple de marionnettistes dans leur aventure périlleuse afin de donner aux enfants ce fameux espoir tant clamé par Mahmoud Darwich où comment une petite marionnette représentant un grand-père tient tête à un militaire israélien quitte à mourir pour son pays. Emouvant! Le volet central du documentaire est consacré à la visite du camp des réfugiés de Dheisheh et bien d'autres images terribles de descentes israéliennes. «Dans les années 1970 nous avons subi un couvre-feu de 48 jours. Les réfugiés du Kosovo sont retournés chez eux après 6 mois. Nous, les Palestiniens, nous attendons depuis 1952!» déclarera à des ONG cet homme. La troisième partie du film est consacrée à Nidal El Khatib, le marionnettiste qui se perd au milieu des camps des réfugiés et ne reviendra chez lui qu'au bout de 18h. Une mésaventure qui fera remonter à la surface ses souvenirs douloureux d'incarcération et son procès en 1988. Le second film de Dominique Dubosc, Réminiscence d'un voyage en Palestine (2004), est le fruit d'un voyage fait par le réalisateur et le dessinateur Daniel Maja, celui-ci invité par le consulat de France à Jérusalem et le ministère palestinien de la Culture afin de relancer un projet d'écoles de dessin à Ghaza et à Ramallah. J'ai ressenti une atmosphère obscure dès mon arrivée. L'Intifada s'est éteinte, c'était à la fin de la guerre au Liban. Mon ami Daniel Maja avait déposé son dossier depuis longtemps. En 2002, ce dossier est arrivé enfin sur le bureau. Ça coïncidait avec l'invasion de la Palestine par l'occupation israélienne. C'était très tendu. L'idée était peut-être qu'il dessinait et moi je ferai des images picturales comme les impressionnistes. Pari improbable tenu. Il y a des parties dans le film où l'image est noire et renvoie à l'effacement de la mémoire, mais elle revient», a confié le réalisateur en préambule de la projection. Un film où le choix esthétique prend le dessus sur l'histoire, plutôt ils s'unissent et font corps avec la détresse humaine. Dominique Dubosc évoque tour à tour le bleu de la mer, le blanc de l'ombre, le vert des tanks et le rouge du sang. Ce documentaire est «un voyage dans la mémoire» avec toutes ses composantes sensorielles et chroniques. Tout est exacerbé, y compris le silence. Le noir et blanc est présent par interstice. Le réalisateur filme un hôpital à Jérusalem, une zone industrielle israélienne, rencontre brièvement des étudiants à Ghaza, filme des attitudes, des gestes, des visages, des corps. Tantôt figés ou en mouvement, comme des spectres, mais aussi des ruines comme témoins de la guerre et la fête d'un mariage malgré tout, l'ambiance animée, la vie, le contraste par petites touches, et puis la mort, les cadavres. Les chansons fantasques des chanteurs moyen-orientaux, qui accompagnent ces images par bribes entrecoupées, cèdent la place alors au néant. Le son est coupé. Retour à Ramallah et cet éternel calme qui précède la tempête ou succède à la fin du monde. Les fers barbelés s'érigent comme un pied de nez aux notes étincelantes du violon. «Les Palestiniens sont atteints d'une maladie incurable qui s'appelle «l'espoir» dixit Mahmoud Darwich, peut-on lire comme paraphe au générique de la fin. Se présentant comme «un spécialiste du regard», le réalisateur Dominique Dubosc expliquera sa démarche cinématographie qui consiste à prendre des images d'abord et non pas d'illustrer des idées formatées pédagogiques comme le font la plupart des documentalistes qui ne connaissent pas cette «aventure du regard». Dominique Duboscun, «homme libre» confiera avoir été viré d'Artée en étant par trois fois sur la liste noire. «Il y a aussi cette idée fausse et absurde qu'on applique à l'objectivité dans ce genre de documentaire, comme si l'on pouvait aller de tous les côtés. Or, il ny a pas d'égalité entre le colonisateur et le colonisé. Dire que le colonisateur souffre autant que le colonisé est faux.» Et de souligner sa vison des choses: «Mon but n'était pas didactique mais artistique. L'art c'est la vie et la question palestinienne est éminemment une question de vie». Et de répondre à une question d'un spectateur sur les motivations des Israéliens: «C'est clair, ce qui motive les Israéliens, Sharon l'a dit en 2001, c'est terminé la guerre de 1948: l'épuration ethnique!»
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