Algérie

LA MAJORITE SILENCIEUSE



Il n'est certainement pas indiqué de prendre à la légère le mouvement phénoménal du Hirak. Il était attendu et pressenti car à mesure que le temps avançait, le pays s'engouffrait dans une immense inconséquence donnant à la majorité des Algériens des profils de chauves-souris, plaqués contre la façade de la désespérance, les pieds en haut et la tête en bas. Il y a bien sûr les marches des vendredis, vindicatives, revendicatives, parfois insultantes, souvent d'une ironie à couper le souffle, et les millions de marcheurs ont marqué le pas pour signifier une colère aux multiples visages et pour conjuguer une mal-vie à tous les temps.Tous ou presque tous n'acceptaient aucune accointance avec les étiquettes politiques ni même avec les coloriages évasifs de ce qui est intitulé société civile. Pour le paysan de Tissemsilt ou celui d'El Oued, comme pour le petit fonctionnaire de Ras El Ma ou celui d'Aflou, le coloriage des activismes, bons ou mauvais, est une donnée trop lointaine, presque fictive sinon inconnue. Il demeure certain que leur préoccupation immédiate est l'accès douloureux aux fournitures scolaires pour leurs enfants, quand le pain a été difficilement garanti. Ils sont à mille lieues des plis bienfaisants des citoyens suisses ou ceux du Japon. Le rêve bien entendu serait que la société algérienne soit une entité homogène goûtant aux bienfaits de la civilisation grâce à des ressorts universels qui permettent de concilier dans la sérénité les avis et les doléances pour aller à la rencontre de la prospérité.
Bien que les outils politiques soient des instruments imparables dans la vie d'un pays, il serait cependant une erreur de ne pas tenir compte de la consistance de la présence d'une large majorité silencieuse pour croire que l'intellectualisme et le militantisme qu'il charrie avec tambours et trompettes serait seul porteur de la vérité. L'Algérie n'est pas la chasse gardée d'une élite autoproclamée et s'en persuader avec ténacité serait faire un bras d'honneur à une indépendance nationale chèrement payée.


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