Algérie

La linguistique, une recherche active



Les travaux de linguistique générale et appliquée se déploient au sein des départements de langues étrangères et d?orthophonie. Cet article fait état de la nature des travaux menés par les orthophonistes et les postgraduants des départements de lettres, au sein du département de psychologie et des sciences de l?education, appelé depuis 2003, département de psychologie, des sciences de l?éducation et d?orthophonie. Seront respectivement présentés :  L?objet de la linguistique en termes de langue-langage-parole dans ses limites par rapport à celui de la psycholinguistique ;  une esquisse générale des axes de recherches y attenant au sein du laboratoire des sciences du langage et de la communication (Slancom) de l?Université d?Alger, qui, créé et dirigé par le Pr Nacira Zellal en 2000, réunit des équipes de recherches inscrites dans des projets dont les thèmes sont, outre les pathologies du langage et la psychologie cognitive, la didactique et la linguistique. D?une manière générale, concernant la linguistique, les recherches ont trait aussi bien à l?oral (arabe, kabyle) qu?à l?écrit (langue arabe académique notamment). I- Langue/Langage/Parole Dans la dichotomie classique de F. de Saussure puis d?A. Martinet langue/langage, la langue, objet de la linguistique, est un système de signes doublement articulés, organisés en une grammaire, une phonétique, une phonologie, un lexique ou niveaux d?analyse structurale. La langue est un patrimoine commun à la société, elle se trouve dans les livres, à commencer par le Coran, qui dès les premiers siècles de l?Hégire, a fait l?objet d?études par les grammairiens arabes. Elle est aussi dans les dictionnaires et les textes littéraires. Le langage en est l?usage par l?homme et chaque homme a sa propre façon d?utiliser la langue. Ainsi, pour comprendre la notion de langage, il suffit de mettre en facteur l?idée qu?il implique une relation à autrui et nous communiquons à travers nos perceptions (intelligence) dans une relation cognitive-subjective et une relation objective par le langage, corps de concepts regroupés par la psycholinguistique cognitive (ou pragmatique). Puisant donc sa matière de la linguistique et de la psychologie cognitive, la psycholinguistique émerge aujourd?hui comme science et le langage en constitue l?objet. Une observation en ressort : La linguistique permet donc, d?étudier la langue dans ses structures et ses règles. Au plan méthodologique, le linguiste collecte des corpus, les transcrit, les segmente, puis il en observe les régularités. David Cohen parle de linguistique descriptive ; autrement dit, lorsque le linguiste s?occupe du langage, il en décrit aussi des corpus, c?est-à-dire qu?il approche le langage comme structure, comme langue générale et non comme processus de communication, du fait qu?il n?inclut pas, dans son étude, les concepts cognitivistes. Ces remarques permettent donc de distinguer aujourd?hui, la linguistique de la psycholinguistique. Dans un article proposé dans El Watan par N. Zellal le 10 mai 2005, ce point a été assez largement développé. La parole est le fait de l?individu parlant. Articulation des mots, conscience phonologique, débit (lent, rapide, haché...), registre (haut, grave), intensité (faible, forte), timbre (rauque, clair), durée, rythme en sont les principaux paramètres. La parole est l?objet de la phonétique (physiologique et acoustique) et de la phonologie. Ces deux branches de la linguistique tendent à émerger comme sciences autonomes aujourd?hui. III- Recherches sur la langue Les thèmes des travaux vont des approches lexicales-terminologiques-sémantiques aux approches grammaticales (morphologie et syntaxe) de la langue, sans omettre sa pratique textuelle écrite (norme et pathologie).Un dictionnaire académique terminologique arabe-français spécialisé en sciences humaines normales et cliniques est en cours d?élaboration, dans sa méthodologie et ses premières fiches, un travail lancé sous la direction de N. Zellal par la Société algérienne d?orthophonie en 2003. Plus de 100 termes arabes sont actuellement traités et prêts à être publiés. Ce projet vient d?être agréé sous la forme d?un projet rattaché au laboratoire Slancom. La langue écrite est également approchée pour connaître la dyslexie-dysorthographie et les syndromes écrits d?ordre neuropsychologique ou troubles de neurovision. L?apprentissage d?une deuxième langue écrite s?inscrit dans la didactique. Ici, les recherches ont trait à la didactique de la langue arabe écrite. Les travaux soutenus (deux doctorats et des magistères) offrent des moyens référentiels pour la rééducation des troubles scolaires. Les travaux réalisés ont également trait à la construction de tests linguistiques standardisés qui servent aujourd?hui, les recherches et le praticien des CHU et des établissements spécialisés (exemple : mallette du « MTA 2002 »).Un projet important est actuellement en cours d?élaboration. Il consiste à monter une banque de données, qui réunira l?ensemble des corpus en langues arabe et kabyle traités dans les thèses, la cinquantaine de magistères et les milliers de mémoires de fin de licence soutenus. L?objectif en est le rassemblement et la classification des corpus : productions orales et en langue arabe écrite de locuteurs normaux ou présentant un trouble. Ils constitueront des profils linguistiques par âge, sexe et type de troubles, avant et après rééducation.  Leur utilité est triple : 1) dégagement de systèmes de référence et de moyens de contrôle des résultats d?une démarche rééducative ; 2) illustration des cours basés sur des études de cas ; 3) enseignement en licence et en magistère d?orthophonie, du traitement linguistique des corpus. IV- Recherches sur le langage Les études sur le langage ont essentiellement trait au bagage linguistique de l?enfant dans ses structures, son acquisition et son fonctionnement pragmatique, d?une part, et d?autre part, à la pathologie. L?acquisition du langage et le bagage linguistique de l?enfant constituent, en effet, le souci premier de l?orthophoniste, du fait qu?il s?agit-là, du point de départ de ses recherches et ses travaux cliniques sur les troubles de l?acquisition (dysphasies développementales, retards de langage), les surdités, les troubles mentaux. Autrement dit, il a besoin « d?étalons » pour situer le niveau de langage de son patient et pour le traiter, d?une part, et, d?autre part, d?une bonne maîtrise de la psycholinguistique et des théories d?acquisition. Un travail de recherche, qui a servi de point de départ pour les réflexions sur le bagage linguistique de l?enfant, a été soutenu en 1979 par N. Zellal. Son objet était de dégager des stades d?acquisition de la conscience phonologique chez l?enfant arabophone, et de construire, à partir de ces stades, un test de phonologie et de parole en langue arabe2. Des travaux similaires ont été menés sur le bagage linguistique d?enfants kabylophones. Nos recherches sur le langage portent également, sur les divers ordres de pathologie : aphasies (exemple : la multitude des approches neurolinguistiques), maladie d?Alzheimer (exemple travaux sur la mémoire sémantique), apraxies (exemple : répercussion des apraxies bucco-faciales sur la phonation et l?articulation), agnosies (exemple : agnosies littérales et agnosies verbales), amnésies (études de la mémoire phonologique), syndromes frontaux (raisonnement et langage) ; surdités (performances verbales et éducation du déficient auditif dans une perspective oraliste). Ici donc, les travaux de linguistique ont trait à la description des déficits et leurs classifications3 V- Recherches sur la parole Des magistères ont été soutenus dans l?analyse acoustique des sons de la langue arabe à travers des outils comme le sonagraphe ; le voïoscope de Fourcin ; la radiocinématographie. Ici, les résultats normatifs (exemple : la vocalimétrie) servent de moyens de contrôle des résultats des rééducations phoniatriques (pathologie vocale), de la phonation dans les fentes palatines, des dysarthries, des rhinolalies. Les travaux de phonétique physiologique permettent d?étudier l?articulation de sujets ayant des difficultés en lecture à voix haute, IMC, aphasiques, atteints de la maladie de Parkinson, d?une dysarthrie cérébelleuse, d?une surdité. Les approches phonologiques concernent le retard de parole, les troubles phonologiques d?ordre neurologique (jargon phonémique dans l?aphasie sensorielle), les troubles liés à une dyslexie. La parole du sujet bègue fait également l?objet de nombreuses réflexions. En conclusion, la linguistique permet à l?orthophoniste d?approcher « le symptôme ». C?est la phase I de son travail. La phase Il consiste en des recherches sur l?explication des déficits que la linguistique permet d?analyser et de classer (cette seconde phase a pour objet ce qui représente l?étiologie pour le médecin). Les recherches dans cette phase ou étude de l?arrière-plan des troubles sont inscrites dans la psychologie cognitive. La phase III consiste en l?élaboration du projet thérapeutique à partir des résultats de la phase Il. Son application est la rééducation. Le contrôle scientifique et objectif des progrès de la prise en charge est effectué à travers l?usage des techniques standardisées (tests, vocalimétries). La prévention et l?épidémiologie sont un autre volet de cette jeune science clinique pluridisciplinaire. Un projet Andrs a été réalisé à la fin 2004, dans ce thème.  L?auteur : Chargé de cours à l?université de Mostaganem Laboratoire Slancom, Université d?Alger NOTES :  (1) Nouria Laribi, membre de l?équipe, a résumé la méthodologie de cette recherche sur la base de la présentation d?un exemple de fiche terminologique, dans le cadre de l?atelier « Traductologie et terminologie », 1V0 Colloque international du laboratoire Slancom, Sciences du langage, neurosciences et traductologie, 16 et 17 juin 2006, hôtel Dar Diaf, Chéraga, Actes sous presse à l?OPU.  (2) Acquisition de la conscience phonologique chez l?enfant arabophone, s. d. / F. François, thèse de 3e Cyle, publiée sous la forme de l?ouvrage Test orthophonique pour enfant en langue arabe-Phonologie et parole, Préface d?A. Martinet, O P U, 200 p., 1991.  (3) Le volume I de la thèse es lettres et Sciences Humaines, Contribution à la recherche en orthophonie ? L ?aphasie en milieu hospitalier algérien ? Étude psychologique et linguistique, s. d. / D. Cohen, Paris III, y est consacré. Ses résultats sont réunis dans deux articles : 1) L?aphasie n?est plus dichotomie, essai de démonstration sous l?angle de la psychologie cognitive, GLOSSA, U.N.A.D.R.I.O, n° 23, Icebergues, France, janvier 1991, pp. 34-45 ; 2) Primary versus secondary impairments in aphasia, Revue Bouhouth, n° 1, Université d?Alger, 1992-1993, pp. 185-189.


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