Algérie

La légende du maréchal Sissi Bonaparte



La légende du maréchal Sissi Bonaparte
Abdelfattah Al-Sissi sera le probable vainqueur de la présidentielle de ce25 mai. Malgré le mythe construit autour du personnage, cette élection perpétuera le règne de l'arbitraire et de la corruption.Le maréchal [Abdelfattah Al-Sissi] flotte dans les habits de feu son prédécesseur Gamal Abdel Nasser [président nationaliste égyptien, 1956-1970]. L'impression de ridicule, et même d'absurde, est à la mesure de la distance qui sépare le drame de la farce, selon l'expression de Karl Marx. On ramasse les débris du passé pour les coller à Sissi en tant qu'emblèmes de gloire et faire de lui une nouvelle figure de légende. Exactement comme lors de l'alliance du sabre et du goupillon avec Napoléon III, l'auteur du coup de force contre les valeurs de la Révolution française. Dans le cas égyptien, cette alliance tripartite s'élargit aux hommes d'affaires égyptiens. Eux aussi veulent raviver les braises du passé.Pourtant, les hommes de religion et ceux des affaires nourrissaient une franche hostilité contre la dictature de Nasser. Aujourd'hui, ils la mettent sous le boisseau afin de s'assurer le confort que seule une nouvelle dictature peut leur procurer.Sacralité. Ainsi, il n'est pas rare d'entendre des discours venus tout droit des années 1950 et 1960, pour vanter les vertus d'une dictature de ce troisième millénaire. On parle de lui [Sissi] comme du «nouveau zaïm [chef incontesté] nécessaire». Et pour faire passer cette idée on entoure «l'ancien zaïm» [Nasser] d'un halo de sacralité et on efface toutes ses erreurs et défaites. En réalité,Sissi n'est ni Nasser ni Sadate [1970-1981], mais seulement Moubarak, dans toute sa splendeur.À savoir un mendiant qui parcourt les allées de la politique internationale en offrant ses services à qui veut bien l'aider à se maintenir au pouvoir afin d'y perpétuer ad aeternam le règne de l'arbitraire et de la corruption. Sous lenouveau maréchal tout autant qu'à l'époque de Moubarak, cela veut dire offrir ses services en tant que gendarme régional, en parfaite conformité avec l'agenda américano-israélien pour la région. Cela ne va pas plus loin que «la guerre contre le terrorisme» et «le contrôle des soubresauts régionaux afin d'assurer la sécurité d'Israël». Alors que cette réalité saute aux yeux, il y en a qui persistent à le présenter comme le zaïm d'une puissance régionale, voire mondiale, dominante. Pour compléter le tableau, on dirait qu'ils voudraient ressusciter Nehru, Tito et Khrouchtchev. C'est le même scénario quis'est joué en France lors du coup d'Etat de 1851, à propos duquel Karl Marx écrivait, dans son livre Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte : «La tradition de toutes les générations mortes pèse d'un poids très lourd sur le cerveau des vivants. Et, même quand ils semblent occupés à créer quelque chose de tout à fait nouveau, c'est précisément à ces époques qu'ils évoquent craintivement les esprits du passé, qu'ils leur empruntent leurs noms, leurs mots d'ordre, leurs costumes, pour apparaître sur la nouvelle scène de l'histoire sous ce déguisement respectable.» On dirait que Marx a voulu décrire la situation de l'Egypte d'aujourd'hui, pays où précisément on essaie de ressusciter un héroïque passé [nassérien] d'outre-tombe.In Al-Araby al-Jadid du 28 avril 2014




Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)