La grève électorale

À Akbou, deuxième ville de la wilaya de Béjaïa, l'ambiance électorale est plutôt morose en ce 27 novembre 2021. Hormis la présence des agents de l'ordre devant l'entrée des bureaux de vote, rien n'indique que nous sommes en plein jour de scrutin. Bien que le calme règne dans le centre-ville, les Akbouciens tournent le dos à ces élections locales. Si certains vaquent à leurs occupations habituelles, d'autres profitent de cette journée ensoleillée pour aller à la cueillette des olives et se ressourcer dans la nature. "Aujourd'hui, de bon matin, j'ai emmené toute ma famille à la campagne pour la cueillette des olives. Quant à moi, je suis tenu de rester ici pour m'occuper de mon activité commerciale. C'est pour vous dire que je ne me sens pas concerné par ce carnaval électoral. D'autant plus que notre commune n'a présenté aucune liste de candidature pour ces locales", a déclaré à Liberté, Dda Meziane, un sexagénaire propriétaire d'un magasin de fruits et légumes au centre-ville d'Akbou. Même impression chez la plupart des citoyens rencontrés hier, dans les rues de la capitale de la Soummam. "Pourquoi aller voter quand on sait que le président de l'APC ou les élus de l'APW n'ont pas de prérogatives, ni les moyens nécessaires, pour apporter un changement ou améliorer le cadre de vie de leurs concitoyens '" s'interroge Yassine, un jeune chômeur de 28 ans, diplômé de l'université de Béjaïa.Et à son camarade Djamel de renchérir : "Dans les pays qui se respectent, le jour du scrutin ressemble à une fête nationale, alors que chez nous, c'est une journée triste et morose. Peut-on parler aujourd'hui d'un événement festif, sachant que des centaines de nos frères et s?urs croupissent dans les prisons pour avoir exprimé leurs opinions et milité pacifiquement pour une Algérie meilleure '" Lors de notre tournée dans les différents quartiers de la ville d'Akbou, il nous a été donné de constater que la plupart des listes électorales et autres posters des candidats sur les panneaux d'affichage sont déchirés et couverts de graffitis hostiles aux élections. C'est dire combien la population locale est indifférente à ces élections. Pour preuve, Akbou fait partie des rares communes d'Algérie qui n'ont pas présenté de listes pour l'APC. Ce qui a, d'ailleurs, accentué davantage ce sentiment de rejet des élections locales chez les Akbouciens.
C'est en tout cas ce que nous ont affirmé les différents encadreurs de ce scrutin, lors de notre virée, hier, dans certains centres de vote. "L'absence de listes APC dans notre commune est un autre facteur en faveur de l'abstention. Tout le monde sait que les listes APW n'attirent pas beaucoup de monde. Nous avons remarqué que seuls les candidats à l'APW et leurs familles viennent voter dans notre centre de vote", nous confie le président d'un bureau, situé au CEM Mouloud-Feraoun, l'un des plus grands centres d'Akbou. Vers 14h, seuls 22 citoyens avaient voté sur les 1 780 électeurs inscrits sur les matrices des 5 bureaux que compte ce centre. À l'école primaire Abdelhamid-Ben Badis, jouxtant le siège de la mairie, où on dénombre quelque 1 388 électeurs répartis sur trois bureaux, on a enregistré 21 votants.
Le responsable du service des élections à l'APC d'Akbou, nous a fait savoir que sa commune compte 26 480 électeurs répartis sur 67 bureaux de vote. Interrogé sur le taux de participation et l'affluence des électeurs dans cette circonscription administrative, le représentant local de l'Anie refuse sèchement de nous communiquer toute information ayant trait au déroulement du scrutin et encore moins les chiffres même provisoires. "Nous avons reçu des instructions de l'Anie de Béjaïa nous interdisant de communiquer quoi que ce soit. Il faut se rapprocher de notre délégué de wilaya", nous dit-il sur un ton désolé.

KAMAL OUHNIA