Algérie

La grande bouffe



La grande bouffe
«Quelqu'un d'affamé mangera gloutonnement, bruyamment, avec pour seul souci d'apaiser sa sensation de faim et sans trop goûter ce qu'on lui sert. Pour devenir raffiné et gourmet, il ne faut pas avoir trop faim.» Paule Salomon«Et comment tu vas t'y prendre pour sortir de cette mangeoire où sont attablés tous les spécimens de nos institutions les plus représentatives'- S'il y a une chose qui revient souvent dans le cinéma français et que j'aime par-dessus tout, ce sont bien les scènes de bouffe.Le cinéma français en regorge. J'ai toujours pensé que les réalisateurs doivent en faire commande spécialement pour pouvoir s'empiffrer aux frais de la production. Les séquences de bouffe sont géniales: c'est en général le moment propice où l'atmosphère se détend et où tout baisse la garde pour se remplir l'atmosphère et se rafraîchir les amygdales. Il n'y a pas mieux pour favoriser la communication entre des protagonistes qui s'en voulaient à mort quelques instants plus tôt. Dans une fête comme aux funérailles, le banquet favorise les contacts entre des personnages qui ne se connaissaient pas quelques instants auparavant. Et la bonne chère à l'oeil, aussi bien que l'alcool, délie les langues. Il ne faut pas oublier qu'il y a un esprit de pique-assiette dans ce milieu de profiteurs. Je suis en train de réfléchir à la manière d'amorcer le véritable portrait de ce personnage. Je verrais bien Aâmi El-Hadj passer parmi ses convives pour montrer qu'il s'inquiète vraiment de la manière dont ils sont servis. Tiens, il commence par le personnage le plus médiocre, celui qui se trouve en bout de table. Il se trouve que c'est l'un des rares amis d'enfance de Aâmi El-Hadj. Ils sont du même village, ont fréquenté la même école et ont partagé la même enfance: ils n'ont pas de secrets sur leurs racines. Mais la vie ne leur a pas souri de la même façon.D'ailleurs Aâmi El-Hadj a invité son camarade de classe uniquement afin que tout le monde au village apprenne son étonnante réussite. Mais à côté de ce «Miss tmourth», il y a le journaliste qui va essayer de tirer les vers du nez de ce naïf personnage qui évoquera avec tendresse la période des vaches maigres qu'ils ont connue ensemble pendant les années de guerre. Un astucieux flash-back et nous voilà transportés à l'époque où Aâmi El-Hadj travaillait comme dactylographe à la SAS de la commune. Il rendait évidemment des petits services par-ci et par-là, mais le jour où il lui fut demandé un gros service, il disparut mystérieusement. C'est le vieux colonel en retraite, victime d'une des dernières purges, qui prendra le relais en rappelant les circonstances qui lui ont permis de faire la connaissance de Aâmi El-Hadj:il n'était alors qu'un jeune lieutenant chargé de recruter les candidats pour la fameuse force locale. Aâmi El-Hadj était alors un jeune homme vigoureux en quête d'un travail qui lui permettrait de rester en ville en attendant que les choses se tassent au village. Il était venu se présenter au Rocher noir pour faire partie de cette force locale qui joua un rôle certain durant l'été de la discorde. Le maire, un homme ventru et disert avouera qu'il avait connu son hôte dans un domaine agricole de la Mitidja. Démobilisé, Aâmi El-Hadj, ayant une petite expérience bureaucratique grâce à son bref passage à la SAS, prendra en charge toutes les opérations de secrétariat du comité de gestion et fera équipe avec le président de la coopérative qui n'était autre que le futur maire. De fil en aiguille, tous les convives vont raconter, chacun à sa manière, leur expérience commune avec Aâmi El-Hadj: trafics d'influence, marché frauduleux, détournements de services publics, vont constituer le menu de ces confessions. Il me faudra juste un peu de temps pour trouver les articulations entre les différentes séquences qui vont former le puzzle d'un véritable pourri.»




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