Algérie

La grande avancée de la cause amazighe



La Kabylie célèbre aujourd'hui le 41e anniversaire du Printemps berbère du 20 Avril 1980 et le 20e anniversaire du Printemps noir de 2001 durant lequel 128 personnes ont été assassinées. C'était le premier soulèvement populaire d'envergure au début du premier mandat de Bouteflika. 20 ans après, le jugement des auteurs et des commanditaires de ces assassinats est toujours réclamé et les familles des victimes continuent à exiger vérité et justice. Pour la cause amazighe, le constat est presque unanime : des avancées considérables ont été opérées au plan légal et dans la société algérienne.Karim Aimeur - Alger (Le Soir) - La cause amazighe a réalisé des acquis non négligeables depuis l'immersion du Printemps berbère le 20 avril 1980, suite à l'interdiction d'une conférence sur la poésie kabyle ancienne que devait animer l'éminent écrivain et anthropologue Mouloud Mammeri le 10 mars à l'université de Tizi-Ouzou. Des acquis qui sont renforcés suite au Printemps noir de 2001, survenu après l'assassinat du jeune Guermah Massinissa dans une brigade de la Gendarmerie nationale à Beni Douala (Tizi-Ouzou), et durant lequel 128 personnes y laisseront leur vie, à cause de la violente répression du mouvement. Aujourd'hui, la Kabylie fête ces deux évènements qui ont marqué l'histoire contemporaine de l'Algérie. Long et jalonné de sacrifices, le combat identitaire a porté ses fruits et non des moindres.
La langue amazighe a été reconnue, dans un premier temps, comme langue nationale, dans le sillage du Printemps noir. Elle finira par être reconnue et constitutionnalisée comme langue officielle du pays en 2016. Aussi, le premier Yennayer, premier jour de l'année berbère, est inscrit dans la liste des dates nationales célébrées de manière officielle. Tamazight est entré dans l'école, même si l'enseignement est toujours facultatif, alors que des militants de la cause revendiquent le caractère obligatoire de son enseignement, du moins dans les régions berbérophones. La cause amazighe a donc réalisé des acquis considérables sur le plan légal. Mais sur le plan pratique, beaucoup reste à faire. Pour le linguiste Abderrazak Dourari, contacté hier par nos soins, il manque à cette langue une prise en charge réelle, expliquant que l'outil principal pour la développer, coordonner le travail, coordonner la recherche et la création dans cette langue qui est l'Académie de la langue amazighe n'a pas encore été mis en place.
« C'est quelque chose qui manque très sérieusement parce qu'il y a de la recherche, de la créativité qui se fait dans cette langue, particulièrement le kabyle avec une bonne production littéraire dans le domaine du roman et de la poésie surtout, et le chawia, mais malheureusement, il n'y a pas une coordination de toutes ces activités», déplore-t-il. La cause amazighe a enregistré également des avancées sur le plan de la société algérienne après le déclenchement du mouvement populaire de 2019, estiment Abderrazak Dourari et Ali Brahimi, ancien détenu du Printemps berbère et militant de la cause amazighe. Selon eux, les attaques ciblant l'emblème amazigh a provoqué une réaction positive des Algériens qui ont adopté l'amazighité.
Pour le linguiste Abderrazak Dourari, la réaction des Algériens a produit quelque chose de complètement nouveau dans la société algérienne. «Il faut s'en féliciter et aller de l'avant, positiver davantage et avancer en reconnaissant nous-mêmes notre société dans sa diversité. Il y a une force de synergie qui est très importante, des forces centripètes qui travaillent la société algérienne et qui va s'exprimer certainement de plus en plus dans la notion d'algérianité », affirme M. Dourari.
Ali Brahim interpelle l'élite arabophone qui a, selon lui, un très grand rôle à jouer en direction des arabophones qui ne sont pas bien au fait de la problématique identitaire culturelle et linguistique amazighe. «Ce rôle consiste à apaiser et à transmettre le vrai message de cette cause, qui est démocratique d'abord, une cause qui n'entend pas berbériser les arabophones comme tente de le faire croire le régime. Cette élite a un très grand rôle à jouer pour cimenter l'unité nationale du peuple algérien dans sa diversité linguistique et culturelle », a-t-il expliqué, appelant les autorités à faire de la langue amazighe la deuxième langue de l'Etat et de l'administration.
K. A.


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