Algérie

La gifle



Quand les bruits de couloirs ne sont plus audibles, nous nous faisons un plaisir de vous les faire parvenir. Musique.

La fièvre qui caractérise le discours politique français sur la question migratoire n'est pas celle de l'Europe. Ainsi, moins de vingt-quatre heures après que le ministre de l'Intérieur français eut annoncé l'intention de son pays de fermer ses frontières avec l'Italie en raison du débarquement de réfugiés essentiellement tunisiens et libyens, la Commission européenne a diffusé un communiqué qui apporte un sérieux revers politique et éthique à l'intention française. La Commission a rappelé, vendredi, que la décision française est non conforme au droit européen, en particulier celui contenu dans les Accords de Schengen (1985 et 1997), et ne repose sur aucun argument sérieux. Que du contraire, la Commission européenne rappelle le devoir de solidarité qui doit prévaloir entre les 27 Etats membres de l'UE en pareille situation et le souci de l'Europe de respecter les règles de droit international portant sur l'aide et la protection aux réfugiés.

Dans le cas précis vécu par l'Italie et Malte qui accueillent les migrants tunisiens et libyens, mais aussi érythréens et somaliens, la Commission demande instamment aux autres pays de l'UE d'offrir des places d'accueil et d'aide à l'installation au titre du droit d'asile. Mieux, la Commission a saisi le Conseil et Parlement européen pour l'étude d'un « programme européen commun de réinstallation ». En clair, l'UE réaffirme son attachement au respect des conventions et traités internationaux portant sur le droit d'asile et de protection des civils menacés ou dont l'Etat n'assure pas la protection (Convention de Genève de 1951 notamment).

Par ailleurs, la Commission relève le nombre de 430.000 Libyens déplacés et pris en charge aux frontières tunisienne et égyptienne. Une façon de répondre aux alarmes françaises pour les quelques éventuels 2 ou 3.000 migrants qui pourraient débarquer sur son territoire. Et encore, puisque même dans un tel cas la prise en charge financière des réfugiés n'est pas de la seule charge du pays d'accueil. Le texte de la Commission rappelle l'existence de quatre fonds financiers européens disponibles et prêts à être activés. Il s'agit du Fonds pour les frontières extérieures, celui de l'aide au retour volontaire, celui de l'aide à l'intégration et enfin celui de l'aide aux réfugiés. L'Italie, confrontée aux afflux des migrants, en a bénéficié à hauteur de 55 millions d'euros pour 2010 et 75 millions d'euros pour le premier trimestre de 2011. La Commission insiste sur l'obligation de chaque Etat membre, ainsi que pour l'Union de l'obligation de coordonner les actions avec les organismes de l'Onu, tels ceux du Haut commissariat aux réfugiés et la Migration internationale, pour répondre à l'appel des réfugiés et demandeurs d'asile.

Cependant, cela ne veut pas dire que l'Europe ouvre sans limites ses frontières aux migrants du monde entier et sans conditions. Tout en rappelant son engagement à respecter le droit d'asile et d'aide aux populations fuyant les violences politiques, la Commission insiste sur sa volonté de renforcer les moyens de lutte contre l'immigration économique clandestine et la traite des être humains. Elle souhaite que les Etats membres apportent plus de soutien financier, humain et matériel à l'Agence Frontex, en charge de la surveillance des frontières externes de l'UE. Ainsi, l'Union européenne vient de répondre d'une manière juste, légale et éthique à la France qui s'alarme et crie à longueur de déclarations officielles à l'invasion par les migrants. Pour autant, la Commission ne s'arrête pas à ces précisions techniques et juridiques, puisqu'elle souligne la portée des événements qui secouent l'Afrique du Nord et le monde arabe en général. « Ces événements sont source d'optimisme en ce qu'ils aspirent à la démocratie dans la région méditerranéenne », déclare le communiqué de la Commission.

C'est dans ce sens que l'Europe est appelée à accompagner la transition démocratique dans les pays sud Méditerranée. Une redéfinition d'un nouveau cadre de partenariat et de coopération est plus que jamais nécessaire, estime la Commission européenne. Un partenariat élaboré de concert avec les pays du sud Méditerranée. Pour tout dire, la réaction française à l'arrivée de quelques milliers de migrants en… Italie et à Malte d'abord, est incompréhensible tant il est vrai que la France a été le meneur des attaques militaires contre les forces de Kadhafi. Etrange attitude qui met la France en marge des valeurs européennes, alors même que le président français s'est dit, dès son arrivée au pouvoir, décidé à redonner du souffle et du sens à l'Union européenne.

Ce n'est pas seulement la perspective de l'élection présidentielle de 2012 qui explique la radicalisation du discours politique du gouvernement Sarkozy, non, depuis son arrivée au pouvoir en 2007, Nicolas Sarkozy n'a pas cessé d'user d'un langage guerrier, violent à l'encontre des étrangers et des immigrés. La France est devenue une « anomalie » politique, tant elle rame à contresens des valeurs et fondamentaux de l'Union européenne, plus, à contresens de son propre héritage historique et moral. L'Europe vient de le lui rappeler.




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