LA FOIRE DU PORTABLE A ORAN La tombola, la drague et les mythes

Le palais desexpositions à Oran, le ciel est à l'orage et l'ambiance est à la morosité. Lesalon de la communication et des télécommunications a ouvert ses stands, letemps de présenter les nouveautés et d'écouler les stocks, pour la troisièmeannée consécutive.A l'intérieur duhall d'exposition, la foule n'est pas à la bousculade, en ce deuxième jour. «Lafaute est au mauvais temps», argumentera Adel, un habitué du salon. Les alléess'ouvrent sur une suite de stands qui offrent, paradoxalement les mêmesproduits et presque des tarifs similaires. Les hôtesses, aussi pimpantes etsexy les unes que les autres, sourire professionnel aux lèvres, présentent lesdifférentes formules qui peuvent pousser le consommateur à opter pour telproduit et dédaigner telle autre marchandise. Des dernières générations dans ledomaine de la téléphonie mobile aux «populaires» «grelou», la palette est largeet le choix obéit à un premier et unique impératif: le prix. La mercuriale desportables fait tourner les têtes et emballe les portefeuilles puisque descellulaires, dernier cri, grimpent facilement la pente des cinq millions.Nokia, Samsung, L.G jouent des coudes et des zéros pour le plus grand malheurdes amoureux des beaux joujoux. «J'attendrai qu'ils baissent les prix pour m'enoffrir un», avouera, les yeux émerveillés, Youcef, 25 ans et les rêves plein latête. On en trouve aux alentours des quatre «briques» mais aussi ceux quivolent aux ras des pâquerettes avec 2.500 dinars pour les bas de gamme, lessans options. Certains stands de détaillants ont accepté de jouer le jeu desremises «spéciales foire» en revoyant à la baisse quelques-uns de leursproduits. L'exemple est vrai pour les cartes mémoires qui sont cédées presquemoitié prix par rapport au marché. Les inévitables accessoires sont aussi de lapartie et on trouve, ornant les vitrines, les MP3, les bluetooth, les carcassesen passant par les batteries et autres étuis en cuir. Mais ce qui frappe leplus, aux premiers abords, c'est le foisonnement des différentes formules detombola proposées aux visiteurs les incitant à davantage d'intérêt pour leproduit ciblé. «Une manière de booster les ventes», nous dira un revendeur surplace.  Une option de marketing partagée par lestrois opérateurs qui se partagent le marché national de la téléphonie mobile etqui semble, a priori, porter ses fruits puisqu'elle est reconduite après lesdeux dernières éditions du salon. Les appels à la participation fleurissent unpeu partout sur les devantures des stands jusqu'à finir par agacer. Etsérieusement. Si vous n'avez pas la vue suffisamment perçante, une hôtesse vousfera rappeler le concept en vous expliquant par a+b comment procéder. Et sil'explication ne paraît pas assez convaincante, un large sourire suffira à vousfaire comprendre l'équation. La formule est simple et il suffit au futur clientd'acquérir soit une puce au nom d'un opérateur, soit une carte de recharge pourun autre logo, de s'inscrire et de croiser les doigts pour les trois tirages ausort quotidiens réalisés. Les lots varient du téléphone moyen et haute gamme àla playstation et appareil photo numérique en passant par un dîner pour deuxpersonnes dans un hôtel huppé. Le clou du spectacle est à chercher lors dutirage au sort final, proposé le jour de fermeture, et consistera en unevoiture tout terrain. De quoi faire espérer tous les sceptiques. «Ecoute, c'estquoi cent ou cinq cents dinars de déboursés alors qu'au bout tu peux rafler uncadeau qui en vaut au moins cinquante fois plus», lancera Mahmoud, un optimisteà toute épreuve. Son chandail noué à la taille, il nous tourne le dos pours'acheter deux puces, histoire de mettre toutes les chances de son côté.«L'autre est pour ma meuf», se justifie-t-il presque. Le haussement d'épaulesd'une jolie rousse répond à notre question. «Les mecs, ils ne doutent de rien»,lâche-t-elle nous prenant pour de vulgaires dragueurs. La raison en est simpleet pour vingt dinars le prix du ticket, des jeunes n'hésitent pas à investir lepalais pour jouer au Casanova. La tombola, une formule, vieille comme lecommerce, à un effet dynamisant sur les ventes, selon un détaillant en place.Une présence de beaucoup de stands que le bénéfice n'explique pas, à lui seul,mais qui obéit à des contraintes inavouées et des pressions en filigrane deleurs fournisseurs. «Ce n'est pas un bénéfice de cinquante ou cent dinars quiva me pousser à quitter la tranquillité de mon magasin et de verser sept milledinars pour ce stand, et son pouce indique l'espace derrière lui, mais il fautêtre vu ici pour ne pas risquer de me faire doubler par mes fournisseurs»,affirmera un revendeur détaillant. Une liste noire, qui ne dit pas son nom,dont certains détaillants ont peur d'y voir leur adresse couchée.  La foire du téléphone mobile a aussi sesmythes fondateurs et l'un d'eux et non le moindre reste celui du dernier jouroù les crédules de tous bords jurent que les portables sont vendus trois, voirequatre fois moins leur prix réel pour écouler les stocks et de ce faitattendent, avec fébrilité, les dernières heures avant d'occuper les lieux.