Algérie

"La fin de l'oralité veut dire la fin de notre civilisation"




L'écrivain et universitaire Rachid Oulebsir était, avant-hier, l'invité de la librairie multilivres Cheikh Omar de Tizi Ouzou, où il a dédicacé son dernier ouvrage intitulé Le premier sera un garçon, édité aux éditions Frantz-Fanon.Ce livre d'une vingtaine de chapitres est "l'histoire d'un couple, celle d'un jeune Kabyle qui a épousé une beurette en France. Deux enfants de harki qui ont fait le même rêve, celui de visiter le Djurdjura. Donc, ils sont venus ici en Kabylie à la fin d'un été." Rachid Oulebsir estime qu'il s'agit d'un roman au féminin "où les femmes jouent un rôle central dans cette aventure de modernisation du village à partir des repères ancestraux et des valeurs partagées avec le reste de l'humanité." Et d'ajouter : "Le roman est aussi l'aventure d'une Parisienne dans le monde secret des femmes kabyles. Une introspection dans le monde féminin de l'intérieur fait par une femme qui vient d'Europe et qui n'a pas tous les tabous de chez nous."Dans ce livre, et dans sa littérature, comme il a tenu lui-même à le préciser, Oulebsir évoque les dangers de la déperdition culturelle en Kabylie qu'il qualifie de mémoire en danger. En effet, selon Rachid Oulebsir, après l'arabisation, arrive celui de l'alphabétisation des personnes âgées pour "nous couper de la mémoire.""Après avoir pris nos enfants dans le mouvement de l'arabisation, et pour nous prendre en tenaille, ils se sont intéressés aux personnes âgées. Des personnes âgées qui ne sont pas, en réalité, analphabètes mais plutôt expertes dans l'oralité qui est une culture à part entière où il y a des valeurs et des repères." Et de renchérir : "Ce n'est pas parce qu'on n'écrit pas qu'on est analphabète", et d'insister : "On essaye de les alphabétiser en arabe et de les islamiser pour les éloigner, en fait, de la transmission de la mémoire, ce qui est très dangereux à mon sens."Pour notre interlocuteur, "c'est quelque peu la fin de notre civilisation si on ne réagit pas à ce phénomène. La fin de l'oralité veut dire la fin de notre civilisation parce qu'elle transmet des valeurs universelles. Pourquoi on veut nous mettre dans un système mercantile où celui qui a le pouvoir d'incarner ce qui est positif et ce qui est fort '"Diplômé de 3e cycle des universités Paris-Nord et Paris 1 - Panthéon Sorbonne en économie politique en 1978, Rachid Oulebsir est l'auteur de nombreux romans, de recueils de contes et d'essais sur le patrimoine culturel amazigh.K. Tighilt


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)