Selon des sources confirmées, le cheptel bovin a enregistré, à l'issue des derniers recensements, entre 2015 et 2017, une régression considérable estimée à 30%, le nombre de têtes ayant chuté durant ces deux années de 39 704 à 26 916 dont 13 022 vaches laitières (VL) avec comme incidence la diminution de la production du lait cru et de viande rouge.Selon des sources concordantes consultées, une des causes qui a provoqué cette réduction du cheptel bovin est la diminution du nombre d'éleveurs, nombre qui est passé de 6 060 à 5 109 soit une diminution de 951 éleveurs qui ont abandonné l'élevage bovin pour diverses raisons et pour différentes activités telles que le maraîchage surtout et autres cultures comme celles du melon, de la pastèque, de l'arboriculture fruitière, la céréaliculture..., activités plus lucratives et permettant de réaliser des dividendes bien plus importants et plus rapides. Il faut ajouter que la cherté de l'aliment du bétail (l'insuffisance hydrique n'encourage pas la culture des fourrages), les problèmes liés au foncier agricole, le morcellement en petites superficies des exploitations agricoles, l'absence de coopératives pour la mécanisation, (une seule coopérative pour toute la wilaya), ont contribué à l'atrophie de la filière de l'élevage bovin.
Entre autres raisons aussi selon les informations que nous avons pu obtenir, il y a lieu de citer le fait que des aides à l'élevage de bovins ont été octroyées via certains dispositifs financiers, à des personnes qui n'ont aucune disposition pour s'adonner à cette activité et qui ont très rapidement conduit génisses et taurillons à l'abattoir sous des prétextes fallacieux tels que l'animal accusé d'avoir avalé un fil de fer, le dicton ne dit-il pas que «quand on veut tuer son chien on l'accuse de rage»'
Il faut ajouter à ces causes que pour certaines fêtes, on ne se contente plus de quelques moutons mais on procède à l'abattage contrôlé (clandestinement) ou non des génisses. Quand on cite la filière de la production bovine, on ne peut omettre d'évoquer la production laitière et ce que fut à un moment donné le «fameux bassin laitier» tant prôné. Pour l'heure, selon le président de la filière lait et du vice-président du CIF (Conseil interprofessionnel de la filière), sur les 5 109 éleveurs restants, seuls 93 peuvent être considérés comme éleveurs professionnels producteurs de lait.
On indique qu'il existe 3 catégories d'éleveurs, en fonction du nombre de V L qu'ils possèdent, à savoir ceux qui détiennent plus de 100 VL et ils sont seulement 2 ou 3, ceux qui possèdent 10 à 50 VL (0,4%), et le reste moins de 10 VL et ils sont les plus nombreux (82%) et dont le lait produit est autoconsommé ou vendu en petites quantités à des crémeries.
Durant l'année 2017-2018, il a été enregistré une production laitière estimée à 20,80 millions de litres répartie en 39% pour l'autoconsommation, 15% pour les crémeries, 22% pour les veaux et seulement 24% destinés à la collecte pour les unités de transformation.
Cependant, il faut noter que 101 étables et 27 bergeries, relevant des ex-DAS (Domaines autogérés socialistes) implantés dans des communes comme Aïn Soltane, Djendel et autre Djelida sont dans la majorité en train de se dégrader et quelques-unes seulement en activité mais sous-exploitées, nécessitant d'importants travaux de réaménagement.
Il y a aussi une autre catégorie qui est venue se greffer à l'élevage bovin, catégorie qui s'est constituée par l'intermédiaire des dispositifs de soutien, à savoir, l'Ansej, la Cnac, l'Angem. Ce sont ceux-là, pour la plupart, qui ont déserté la filière et le cheptel acquis par le biais de ces dispositifs de soutien accordé par l'Etat est en voie d'extinction.
Selon certaines sources, c'est dans cette catégorie qu'on a enregistré les taux les plus forts de mortalité des bêtes acquises à raison de 2 à 3 cas/10 et par an. Ils ont été indemnisés par la Caisse de mutualité agricole parce qu'ils avaient contracté une assurance, celle obligatoire, pour la première année, exigée lors de la constitution du dossier d'acquisition et l'indemnisation devait leur permettre de renouveler leur cheptel. Or statistiques à l'appui, les concernés n'ont plus contracté d'assurances et n'ont plus donné signe de vie auprès de la Mutualité et il est facile de supposer que les vaches ont fini dans les abattoirs ou revendues à des tiers.
Pourtant, selon nos sources, la Caisse de mutualité agricole a indemnisé cette dernière catégorie d'éleveurs pour leur permettre de renouveler leur cheptel et le sauvegarder, à hauteur de 1,21 milliard de centimes en 2017 pour la mortalité de 91 têtes et 1,24 milliard pour 99 têtes en 2018.
Par ailleurs, il est à noter que la Caisse nationale de la mutualité agricole dont la vocation n'est pas lucrative, a accordé de nombreuses mesures de soutiens et de facilitations aux investisseurs dans cette filière, à savoir une réduction sur les contrats d'assurance de 40% pour les éleveurs sociétaires, et 25% pour les jeunes investisseurs avec des paiements échelonnés, l'aimant gastrique (une barrette aimantée posée dans l'estomac de l'animal (pour retenir d'éventuels éléments métalliques avalés par la bête) et un suivi sanitaire à titre gratuit, une indemnisation à hauteur de 90% du prix de l'animal en cas de perte en plus du soutien accordé pour l'insémination artificielle, en plus aussi des multiples campagnes de vulgarisation en direction des jeunes éleveurs, organisées périodiquement par les services de la DSA.
A toutes ces mesures incitatrices, une prime de 50 000 DA est octroyée aux éleveurs pour chaque tête dont la durée de vie atteint les 18 mois.
Par contre les éleveurs professionnels, jaloux de leurs cheptels et conscients, sont restés fidèles à l'assurance. Questionnés à propos des solutions envisageables pour le sauvetage et la préservation de la filière bovine et l'amélioration de la production de lait, les responsables de cette filière et de son Conseil national (Cnif) avancent un certain nombre de propositions :
- un débat réaliste sur la vérité du prix du lait après expertise,
- des solutions à mettre en ?uvre pour le règlement du problème du foncier agricole parce que la plupart des exploitants sont hors sol,
- la levée des garanties exigées par les banques pour l'acquisition des moyens de production (VL et élé) et constitution de coopératives de services,
- octroi de crédits à long terme (5 à 7 ans) sans exigence des garanties,
- confier le choix des vaches à importer non pas aux maquignons comme cela se pratique mais aux vrais éleveurs.
Voilà donc une filière stratégique qui périclite et régresse, en voie d'extinction si rien n'est fait pour sa mise à niveau afin de la rendre réellement productive. Pourtant, ce ne sont pas les potentialités qui manquent telles que la disponibilité des ressources hydriques, un savoir-faire non négligeable chez certains éleveurs, des crédits qui existent mais gelés, un patrimoine foncier agricole très important pour des résultats de moins en moins probants, d'où la nécessité d'un train de mesures à prendre et de réformes en profondeur à engager pour dynamiser la filière si l'on tient à atteindre l'autosuffisance en matière de viande rouge, de lait, de beurre qui aujourd'hui constituent un lourd fardeau pour l'économie nationale.
Karim O.
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Posté Le : 22/11/2018
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Karim O
Source : www.lesoirdalgerie.com